Snodgrass... mon ami, M. Tupman. Docteur Slammer, M. Pickwick.... M. Tup....»

Ici M. Winkle s'arrêta soudainement en remarquant l'émotion profonde qui se manifestait sur la contenance de M. Tupman et du docteur.

«J'ai déjà rencontré ce gentleman dit le docteur avec énergie.

—Ha! ha! fit M. Winkle.

—Et cet individu aussi, si je ne me trompe, reprit le docteur Slammer, en attachant un regard scrutateur sur l'étranger à l'habit vert. Je pense que j'ai fait à cet individu, la nuit dernière, une invitation très-pressante, qu'il a jugé à propos de refuser.» En disant ces mots le docteur lança sur l'étranger un regard plein d'indignation, et commença à parler à voix basse et avec chaleur à son ami le lieutenant Tappleton.

Quand il eut fini, celui-ci s'écria: «Bah! vraiment?»

—Oui, répondit le docteur Slammer.

—Il faut l'assommer sur la place! dit avec le plus grand sérieux le propriétaire du pliant.

—Je vous en prie, Payne, tenez-vous tranquille,» interrompit le lieutenant. Puis s'adressant à M. Pickwick, qui était singulièrement intrigué de ces a parte impolis, il continua en ces termes: «Voulez-vous me permettre, monsieur, de vous demander si cette personne appartient à votre société?

—Non, monsieur, répondit M. Pickwick. C'est seulement un de nos hôtes.

—C'est, je pense, un membre de votre club?

—Non, certainement.

—Et il ne porte jamais l'uniforme du club?

—Non, jamais,» répliqua M. Pickwick avec étonnement.

Le lieutenant Tappleton se retourna vers son ami, le docteur Slammer, avec un léger mouvement d'épaules, qui semblait impliquer quelque doute de l'exactitude de ses souvenirs.

Le docteur paraissait enragé, mais confondu, et M. Payne considérait avec une expression féroce la contenance bienveillante de M. Pickwick.

«Monsieur, vous étiez au bal la nuit dernière,» dit tout d'un coup le docteur à M. Tupman, d'un ton qui le fit tressaillir aussi visiblement que si une épingle avait été insérée méchamment dans son mollet. Il répondit un faible «Oui;» mais sans cesser de regarder M. Pickwick.

«Cette personne était avec vous,» continua le docteur en montrant l'immuable étranger.

M. Tupman admit le fait.

«Maintenant, monsieur, dit le docteur à l'étranger, je vous demande encore une fois, en présence de ces gentlemen, si vous voulez me donner votre carte et vous voir traité en gentleman, ou si vous voulez m'imposer la nécessité de vous châtier personnellement sur la place.

—Arrêtez, monsieur, interrompit M. Pickwick. Je ne puis réellement pas laisser aller plus loin cette affaire sans quelques explications. Tupman, racontez-en les circonstances.»

M. Tupman, ainsi adjuré solennellement, raconta le fait en peu de paroles, passa légèrement sur l'emprunt de l'habit, s'étendit longuement sur ce que cela avait été fait après dîner, exprima un peu de repentir pour son compte, et laissa l'étranger se tirer d'affaire comme il pourrait.

Celui-ci se disposait à parler, quand le lieutenant Tappleton, qui l'avait examiné avec une grande curiosité, lui dit d'un ton dédaigneux:

«Ne vous ai-je pas vu au théâtre, monsieur?

—Certainement, répliqua l'étranger sans se laisser intimider.

—C'est un comédien ambulant, reprit le lieutenant avec mépris; et en se tournant vers le docteur Slammer, il ajouta: Il joue dans la pièce que les officiels du 52e ont montée pour demain sur le théâtre de Rochester. Vous ne pouvez pas pousser cela plus loin, Slammer, impossible.

—Tout à fait impossible! répéta le hautain docteur Payne.

—Je suis fâché de vous avoir placé dans cette désagréable situation, dit le lieutenant Tappleton à M. Pickwick. Mais permettez-moi d'ajouter que le meilleur moyen d'éviter de semblables scènes, à l'avenir, serait d'apporter plus de soin dans le choix de vos compagnons. Votre serviteur, monsieur.