Les parois de l'entonnoir forment une pente entrecoupée de neuf paliers principaux, qui sont les neuf cercles de l'Enfer. Chaque palier ou terrasse fait le tour complet de l'entonnoir et finit au-dessus du palier suivant, dont il est séparé par une sorte de mur ou éboulis de rochers. Ce mur de séparation présente naturellement deux pentes, dont l'extérieure, qui borde le palier supérieur, est plus courte que l'intérieure, qui descend jusqu'au bord de la terrasse suivante. Parfois les deux poètes passent d'un palier à l'autre en montant sur les rochers, d'autres fois ils empruntent des sentiers ou des escaliers ; mais ils descendent en faisant le tour de la fosse de gauche à droite, dans le sens de la vis. Dante indique la topographie du fond de l'Enfer, au fur et à mesure qu'il avance ; mais on trouvera au chant XI une vue d'ensemble sur les derniers cercles, qui comportent de nombreuses sous-divisions.

[37] Le premier cercle de l'Enfer est le limbe, où résident les âmes de ceux qui, sans s'être rendus coupables de fautes réelles, n'ont pas eu accès au salut, pour avoir ignoré la foi de vérité. Leur unique tourment est d'avoir perdu à tout jamais tout espoir de rédemption.

[38] Le Christ, qui descendit aux Enfers pour en tirer les âmes des justes de la loi ancienne.

[39] Le puissant seigneur est Homère. Mais il ne faut pas entendre que c'est lui qui plane comme un aigle au-dessus des autres : Dante ne connaissait Homère que de nom. C'est son chant qui est supérieur aux autres, car il s'agit d'un poème épique, ou tragique d'après la nomenclature employée par Dante ; et la tragédie, telle qu'il l'entendait, se place bien au-dessus de la satire, représentée par Horace, ou de la comédie, qu'incarne Ovide.

[40] Le symbolisme de ce château n'a pas été expliqué de façon satisfaisante. Il représente peut-être les sept arts libéraux, illustrés par les occupants de ce secteur du limbe. D'après d'autres commentateurs, il représente les sept vertus, ce qui serait étrange dans l'Enfer, ou les sept parties de la philosophie.

[41] Ces personnages, comme Euriale, Nyssus et Turnus, cités ailleurs (Enfer, I, 107), rappellent la grande geste, si chère au poète, de la fondation de Rome, car ils appartiennent à la légende d'Énée. Seule Penthésilée, amazone vaincue par Achille, est étrangère à cette légende ; mais son nom vient aussi de L'Énéide.

[42] De ces Romaines illustres, Lucrèce est la plus connue. Marcia est la femme de Caton d'Utique. Julie, fille de César, fut femme de Pompée ; et Cornélie fut mère des deux Gracques.

[43] Aristote.

[44] Démocrite d'Abdère enseignait que le monde est le produit fortuit de la rencontre d'atomes divers.

[45] Le commentaire par excellence, celui d'Averroès aux oeuvres d'Aristote.

[46] Le deuxième cercle est celui des luxurieux, coupables des péchés de la chair et punis par une tempête constante qui les emporte et les tourmente sans cesse. La peine est analogue au péché, qui fut de se laisser emporter par la passion et par les impulsions de la chair.

[47] Minos, roi de Crète, mari de Pasiphaé, était déjà regardé par les païens comme l'un des trois juges de l'Enfer ; mais c'est Dante qui l'a transformé en bête à queue, diable ou Minotaure.

[48] Ces vers sont la répétition textuelle de deux vers antérieurs, chant III, vers 94-95.

[49] Didon.

[50] Achille était tombé amoureux de Polyxène, fille de Priam : cette passion nouvelle fut le dernier aiguillon qui le poussait à la guerre, et l'occasion de sa mort.

[51] Paolo Malatesta et Francesca de Rimini. Francesca, fille de Guido, seigneur de Polenta, épousa après 1275 Gianciotto Malatesta, sire de Rimini, seigneur puissant, mais d'une remarquable laideur. Elle le trompa avec son beau-frère, qui était marié lui-même ; et Gianciotto les tua tous les deux, vers 1285. Dante a connu peut-être les détails de leur aventure à Ravenne, où il passa les dernières années de sa vie, auprès de Guido Novello de Polenta, neveu de Françoise ; cependant Boccace est d'un autre avis : « Je pense qu'il s'agit plutôt d'une fiction formée sur ce qui apparaissait comme possible, car je ne pense pas que l'auteur ait pu savoir comment cela s'était passé. » Cf. M. Barbi, Francesca da Rimini, dans Con Dante e coi suoi interpreti, Florence 1941, pp. 117-151.

[52] Cette ville est Ravenne, qui se trouvait alors bien plus près de la mer qu'elle n'est maintenant.

[53] La Caïne est la zone du dernier cercle de l'Enfer, réservée aux traîtres à leurs parents. Francesca affirme donc que Gianciotto (qui peut-être vivait encore en 1300) ira au fond de l'Enfer, pour avoir agi en traître envers son frère. Cette affirmation peut sembler curieuse, puisqu'il s'agit d'une vengeance tirée de quelqu'un qui justement avait trahi la confiance de son propre frère. Les commentateurs (Scartazzini) considèrent que la trahison imputée à Gianciotto est la mort qu'il donna à son frère et à sa femme. Mais Dante dit « chi a vita ci spense «, celui qui nous éteignit à la vie, qui nous enleva l'espoir de vivre. Il s'agit sans doute de la vie éternelle, la seule vie vraie. La trahison de Gianciotto n'est pas de les avoir tués, mais de les avoir tués par surprise, sans leur laisser le temps de se repentir : il avait le droit de leur prendre la vie, mais il n'avait pas celui d'empêcher leur salut — et c'est cette trahison qui mérite la Caïne.

[54] Probablement parce que cette introduction de Francesca est un écho de celle d'Énée s'adressant à Didon : Infandum, regina, jubes renovare dolorem.

Avant de raconter ses malheurs, Énée signalait ainsi que le récit qu'on lui demandait devait être pour lui la source d'une douleur nouvelle ; et c'est ce que dit ici Francesca paraphrasant la pensée du « docteur ».

[55] Dans l'ancien roman français de Lancelot, celui-ci aime Genièvre, épouse du roi Arthur, mais n'ose pas lui déclarer son amour. Genièvre le sait ; et lorsque Galehaut, ami de Lancelot, demande à la reine la grâce d'un baiser pour son serviteur, Genièvre accède à sa prière et baise longuement Lancelot, en présence de son confident. Ce fut sur ce passage que s'arrêtèrent les deux amoureux. Ainsi qu'il est dit un peu plus loin, le vieux poème français fut pour eux ce que Galehaut avait été pour Lancelot.

[56] Le troisième cercle est réservé aux gourmands. Ils gisent par terre, dans un marais puant, et sont soumis à une pluie mêlée de grêle et de neige.