La lettre écarlate

Nathaniel Hawthorne

LA LETTRE ÉCARLATE

(1850)

Traduction par Marie Canavaggia

Édition du groupe « Ebooks libres et gratuits »

Table des matières

LES BUREAUX DE LA DOUANE Pour servir de Prologue

à La Lettre écarlate. ..................................................................4

CHAPITRE I LA PORTE DE LA PRISON .............................49

CHAPITRE II LA PLACE DU MARCHÉ ...............................52

CHAPITRE III LA RECONNAISSANCE ...............................63

CHAPITRE IV L’ENTREVUE ................................................74

CHAPITRE V HESTER À SON AIGUILLE ...........................83

CHAPITRE VI PEARL ...........................................................94

CHAPITRE VII CHEZ LE GOUVERNEUR .........................106

CHAPITRE VIII L’ENFANT-LUTIN ET LE PASTEUR .......115

CHAPITRE IX LE MÉDECIN.............................................. 126

CHAPITRE X LE MÉDECIN ET LE MALADE ................... 138

CHAPITRE XI L’INTÉRIEUR D’UN CŒUR....................... 150

CHAPITRE XII LA VEILLÉE DU PASTEUR ...................... 158

CHAPITRE XIII HESTER SOUS UN AUTRE JOUR...........171

CHAPITRE XIV HESTER ET LE MÉDECIN ......................180

CHAPITRE XV HESTER ET PEARL...................................188

CHAPITRE XVI UNE PROMENADE EN FORÊT .............. 196

CHAPITRE XVII LE PASTEUR ET SA PAROISSIENNE .. 204

CHAPITRE XVIII FLOT DE LUMIÈRE ENSOLEILLÉE.... 216

CHAPITRE XIX L’ENFANT AU BORD DU RUISSEAU.....223

CHAPITRE XX LE PASTEUR DANS UN LABYRINTHE...232

CHAPITRE XXI LE JOUR FÉRIÉ DE NOUVELLE-

ANGLETERRE......................................................................245

CHAPITRE XXII LE CORTÈGE ..........................................256

CHAPITRE XXIII LA RÉVÉLATION DE LA LETTRE

ÉCARLATE ...........................................................................269

CONCLUSION ..................................................................... 280

À propos de cette édition électronique.................................287

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LES BUREAUX DE LA DOUANE

Pour servir de Prologue à La Lettre écarlate.

Il est assez curieux que, peu enclin comme je le suis à

beaucoup parler de mon personnage à mes parents et amis dans l’intimité du coin de mon feu, je me laisse pour la deuxième fois entraîner à donner dans l’autobiographie en m’adressant au public. La première fois remonte à trois ou quatre ans, au temps où je gratifiai le lecteur, sans excuse aucune, d’une description de la vie que je menais en la tranquillité profonde d’un vieux presbytère1. Et comme, plus heureux que je ne le méritais, j’eus alors la chance de trouver pour m’écouter une ou deux personnes, voici qu’aujourd’hui je saisis derechef le lecteur par le bouton de sa veste pour lui parler des trois ans que j’ai passés dans les bureaux d’une douane. L’exemple donné par le fameux « P. P. clerc de cette paroisse2 » ne fut jamais plus fidèlement suivi !

La vérité semble bien être que, lorsqu’il lance ses feuillets au vent, un auteur s’adresse, non à la grande majorité qui jettera ses livres au rebut ou ne les ouvrira jamais, mais à la petite minorité qui le comprend mieux que ses camarades d’école et ses compagnons de vie. Certains écrivains vont même très loin dans cette voie : ils se livrent à des révélations tellement confidentielles qu’on ne saurait décemment les adresser qu’à un es 1 « un vieux presbytère » : voir en particulier l’introduction de Mos- ses from an Old Manse (1846).

2 « P. P. clerc de cette paroisse » : allusion à une parodie de l’autobiographie de l’évêque Gilbert Burnet, A History of His Own Times (1723). Cette parodie a été attribuée à Alexander Pope (1688-1744).

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prit et à un cœur entre tous faits pour les comprendre. Ils agissent comme si l’œuvre imprimée, lancée dans le vaste monde, devait immanquablement y trouver un fragment détaché du

personnage de son auteur et permettre à celui-ci de compléter, grâce à cette prise de contact, le cycle de sa vie. Il est à peine convenable cependant de tout dire, même lorsque l’on

s’exprime impersonnellement. Mais du moment que les paroles se figent, à moins que l’orateur ne se sente rapproché de ses auditeurs par quelque lien sincère, il est pardonnable d’imaginer lorsqu’on prend la parole, qu’un ami bienveillant et compréhensif, sinon des plus intimes, vous écoute parler. Alors, notre réserve naturelle fondant au soleil de cette impression chaleureuse, nous pouvons nous laisser aller à bavarder à notre aise, à

deviser des circonstances qui nous entourent, voire de nousmêmes, sans dévoiler notre secret. Il me paraît qu’en restant dans ces limites, un écrivain peut se permettre de donner dans l’autobiographie sans porter atteinte à ce qui est dû aux lecteurs ni à ce qu’il se doit à lui-même.

Et puis, on va voir que mon esquisse de la vie de bureau a une propriété d’un genre reconnu en littérature : elle explique comment une bonne partie des pages qu’on va lire sont tombées en ma possession et offre des preuves de l’authenticité d’un de mes récits. Ma véritable raison pour entrer en rapport avec le public tient à mon désir de me placer dans ma véritable position, qui n’est en somme guère plus que celle d’un éditeur, vis-àvis de la plus longue des histoires qui suivent3. Du moment que je visais surtout ce but, il m’a paru permis d’entrer dans quelques détails en évoquant un mode de vie jusqu’ici non décrit.