Une montagne avait l’air comme couverte de rochers en haut mais vraiment là en haut il y avait toujours de l’herbe et l’herbe toujours lui donnait l’air élégant et c’était beau.

L’herbe est toujours la plus élégante plus élégante que les rochers et les arbres, les arbres sont élégants et ainsi sont les rochers mais l’herbe l’est encore plus.

Et ici en haut il y avait de l’herbe et ça continuait et continuait et il est tellement plus difficile d’escalader tant et plus dans l’herbe que dans les rochers et sous les arbres.

Et de transporter une chaise bleue en haut là encore et encore à travers l’herbe parce que l’herbe est ardue plus ardue que les rochers, c’était une journée vraiment difficile que cette journée et c’était ainsi que Rose poursuivit son chemin.

Elle devait que pouvait-elle faire d’autre elle devait le regarder en montant là-haut en étant le long de ce chemin-là et s’asseoir sur la chaise.

Et quand on marche sur de l’herbe c’est plus difficile de voir où est là. Et de toute façon que disait-on. L’herbe ne disait pas de toute façon, elle était verte et rien de vert n’a jamais rien à dire.

Rose savait ça c’est pour ça qu’elle préférait toujours le bleu.

30

La prairie d’herbe verte

Rose montait maintenant montait et montait la prairie d’herbe verte qui allait droit au sommet. Elle ne dit pas oh de nouveau juste elle allait. Il faisait chaud, et en dessous de l’herbe verte il y avait de la terre et dans cette terre oh cher Rose fit presque un pas dessus il y avait quelque chose de rond.

Rose avait du courage partout elle continua juste à monter en haut là.

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La dernière heure

C’est dur de continuer quand on est proche de là mais pas assez proche pour se dépêcher d’arriver là. C’est là que Rose était et elle bien elle pouvait à peine continuer pour aller là. Et où était là. Elle le dit presque elle le murmura presque à elle-même et à la chaise. Où oh où est là.

Mais elle continua et l’herbe était plus courte et la pente était plus ardue et la chaise était plus bleue et plus lourde et les nuages étaient plus près et le sommet était plus loin parce qu’elle était si près elle ne pouvait voir quel chemin c’était et si elle prenait un chemin et que le sommet c’était l’autre chemin se pourrait-il qu’elle ne voie jamais ce qu’elle pouvait voir. Oh cher moi oh cher petit moi que vit-elle. Elle vit et ses yeux en furent ronds d’effroi et ses mains et ses bras se raccrochaient à sa chaise solide et soudain vert devint bleu et elle sut qu’un deviendrait deux et que trois deviendrait quatre et que jamais plus non jamais il n’y aurait une porte pour elle par laquelle passer.

Mais Rose n’était pas comme ça, trébucher serait le début de la chute et elle ne chuterait pas vers le haut mais chuterait vers le bas si elle se mettait à trébucher et ainsi fronça-t-elle les sourcils et elle sut qu’elle devait se mettre à compter, un deux un deux un deux un deux.

Ferme les yeux et compte un deux ouvre les yeux et compte un deux et alors vert ne serait pas bleu. Ainsi Rose se mit à compter un deux un deux et elle sut qu’elle comptait un deux un deux et ainsi ses yeux étaient bleus cependant que son nom était Rose. Bien sûr ses yeux étaient bleus même si son nom était Rose. C’est la raison pour laquelle elle avait toujours préféré le bleu parce que ses yeux étaient bleus. Et elle avait deux yeux et chacun de ses deux yeux était bleu, un deux un deux.

Et plus tôt qu’il n’était possible là elle vit quelque chose qui n’était ni vert ni bleu, c’était violet et d’autres couleurs c’était tout en haut aussi haut que le ciel c’était là où elle pouvait pleurer c’était un arc-en-ciel. Oh oui oh non c’était un arc-en-ciel.

Et Rose passa juste droit au travers, elle passa droit au travers de l’arc-en-ciel et elle sut que c’était ce qu’elle ferait. Elle devait le faire et elle passa droit au travers de l’arc-en-ciel et alors là elle était droit au sommet de telle sorte qu’il n’y avait d’autre sommet là juste le sommet avec de la place pour la chaise bleue et Rose plaça la chaise bleue là et elle s’assit sur la chaise. Et Rose était là.

32

Elle était toute seule au sommet de tout et elle était assise là et elle pouvait chanter.

Ceci était la chanson qu’elle chanta,

Ça commença.

Ici je suis.

Quand je désire me nourrir

Je désire me nourrir au jambon.

Quand je désire un petit désir

Je désire avoir été où je suis.

Elle s’arrêta et s’assit un instant non qu’elle ne se levât jamais, elle était si contente de s’asseoir juste elle s’assit.

Et alors elle chanta,

Quand je vois j’ai vu je peux

Je peux voir ce que j’ai vu j’ai vu où je suis assise.

Oui je suis assise.

Elle soupira un peu.

Oui je peux voir que je suis assise.

Elle soupira de nouveau.

Oui je peux.

Une fois quand cinq pommes étaient cramoisies,

Elles ne le furent jamais c’était mon esprit.

Non dit-elle non ce n’était pas mon esprit c’était mon lit.

Donc elle recommença.

Une fois quand les pommes étaient cramoisies

Quand tout est dit quand tout est dit

Les pommes sont-elles cramoisies

Ou est-il dit que je sais lesquelles lesquelles j’ai.

Elle arrêta de penser

Rose arrêta de penser,

Je pense dit Rose et elle se tortilla un peu sur sa chaise.

Elle était seule là-haut.

Je pense dit Rose.

Et alors elle se mit à chanter.

Suis-je endormie ou suis-je éveillée

Ai-je du beurre ou ai-je un petit sablé,

Suis-je ici ou suis-je là,

La chaise est-elle un lit ou est-elle une chaise.

Qui est où.

Une fois de plus Rose se mit à chanter.

Il faisait un peu sombre et une fois de plus Rose se mit à chanter.

Je suis Rose mes yeux sont bleus

Je suis Rose et qui êtes-vous

Je suis Rose et quand je chante

Je suis Rose comme tout.

Je suis Rose dit Rose et elle se mit à chanter.

Je suis Rose mais je ne suis pas rosée

Toute seule et pas vraiment reposée

Je suis Rose et tandis que je suis Rose

Bien et bien Rose est Rose.

Il faisait un peu plus sombre.

Rose se tint un peu plus droite sur sa chaise bleue. Elle était vraiment là-haut. Elle y était vraiment.

Elle se mit à chanter.

Un jour une fois je sus

Qu’une chaise était bleue.

Un jour une fois je connus celui dont la chaise était bleue.

Ma chaise était bleue personne ne savait mais je savais je savais que ma chaise était bleue.

Rose continua de chanter il faisait plus sombre. Un jour une fois il y avait une façon de rester de rester de quitter, je ne quittai pas je m’en allai je m’en allai loin loin et je suis ici et ici est là oh où oh où est là oh où. Et Rose se mit à pleurer oh où où où est là. Je suis là oh oui je suis là oh où oh où est là.

Il faisait de plus en plus sombre et le monde était de plus en plus rond et la chaise la chaise bleue était de plus en plus dure et Rose était plus là que n’importe où. Oh cher oui là.

Et une fois de plus Rose se mit à chanter.

Quand je chante je suis dans un anneau, et un anneau est rond et il n’y a pas de son et le chemin est blanc et le poivre est brillant et Amour mon chien Amour il est loin d’accord gémit Rose oh cher oh cher jamais je n’ai su que je serais ici, et ici je suis toute seule toute la nuit et je suis dans la plus terrible peur. Oh chaise chère chaise chère solide chaise bleue serre-moi avec force je vais m’asseoir sur toi de toutes mes forces.

Il faisait plus sombre et plus sombre et il n’y avait pas de lune, Rose ne s’était jamais souciée de la lune mais il y avait beaucoup d’étoiles et quelqu’un lui avait dit que les étoiles étaient rondes, ce n’étaient pas des étoiles, et ainsi les étoiles ne lui étaient d’aucun réconfort et juste alors bien juste alors qu’était-ce juste alors bien c’était juste que c’était juste alors.

Juste alors gémit Rose j’aurais bien aimé juste alors avoir été une poule.

33

Une lumière

Bien c’était la nuit et la nuit bien la nuit peut être bien oui c’est juste ce qu’une nuit peut être elle peut être toute la nuit. Et Rose savait ça. Rose en savait tant qu’elle en serra d’autant plus près la chaise bleue quand elle s’assit dessus là.

Et alors juste alors qu’était-ce, ce n’était pas la foudre ce n’était pas une lune ce n’était pas une étoile même pas une étoile filante ce n’était pas un parapluie ce n’étaient pas des yeux des yeux dans le noir oh cher non c’était une lumière, une lumière et oh si lumineuse. Et là c’était ailleurs sur une autre colline et ça tournait et tournait et ça tournait tout autour de Rose et c’était un projecteur sûrement c’en était un et c’était sur une colline plus loin et sûrement Will son cousin Will sûrement il était sur une autre colline et il faisait tourner et tourner la lumière et rendait la terre verte pas noire et rendait le ciel blanc pas noir et Rose oh Rose juste sentit une chaleur la transpercer.

Et elle se mit à chanter.

Un petit garçon sur une colline

Oh Will oh Will.

Un petit garçon sur une colline

Il veut oh veut-il.

Oh Will oh Will.

Et je suis ici et tu es là, et je suis ici et ici est là et tu es là et là est ici oh Will oh Will sur n’importe quelle colline.

Oh Will oh Will oh Will

Oh Will oh Will.

Veux-tu chanta Rose oh oui tu veux.

Et elle chanta oh veux oh veux et elle pleura et pleura et pleura et pleura et le projecteur tourna et tourna et tourna et tourna.

34

Fin

Il se trouva que Willie et Rose n’étaient pas cousins, juste comment personne ne le sait exactement, et donc ils se marièrent et eurent des enfants et chantèrent avec eux et parfois chanter faisait pleurer Rose et parfois cela rendait Willie de plus en plus excité et ils vivaient heureux depuis et la terre continua juste à être ronde.

NOTE ÉDITORIALE

1. Principales éditions anglophones :

STEIN Gertrude, The World is Round, illustré par Clement Hurd, New York, William R. Scott, 1939 ; New York, HarperCollins, 2013.

The World is Round, illustré par Francis Rose, Londres, B. T. Batsford, 1939.

2. Éditions francophones :

La Terre est ronde, traduit par Marc Dachy, illustré par Élie Dayan, Paris, Transédition, 1984.

Le monde est rond, suivi de Autobiographie de Rose, traduit par Françoise Collin et Pierre Taminiaux, Paris, Tierce, 1984 ; Seuil, coll. « Points », 1991.

Willie est Willie, extrait de Le monde est rond, illustré par Anne Attali et Marie Van Roey, Noville-sur-Mehaigne, Esperluète, 2010.

Le monde est rond, traduit par Martin Richet, illustré par Alice Lorenzi, Paris, Cambourakis, 2017.

3. Adaptations :

Rose est une rose, pièce radiophonique d’après The World is Round, voix et réalisation : Sabine Zovighian, musique originale et réalisation de Michaël Liot, Arte Radio, 2015, consultable sur www.arteradio.com/son/61657750/rose_est_une_rose.

Voyage au centre de Rose, adapté de The World is Round, théâtre-poème pour acteurs et marionnettes, Paris, L’étoile du Nord, 2006.

À propos de cette édition 

Cette édition électronique du livre La Terre est ronde de Gertrude Stein a été réalisée le 11 mai 2018 par les éditions Payot & Rivages.

Elle repose sur l’édition papier du même ouvrage (ISBN : 978-2-7436-4421-5).

Le format ePub a été préparé par PCA, Rezé.

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