Suite et conclusion de l'histoire de la force de l'amitié

CHAP. XVI. Des songes

CHAP. XVII. Où l'on verra plusieurs originaux qui ne sont pas sans copie

CHAP. XVIII. Ce que le Diable fit encore remarquer à don Cleophas

CHAP. XIX. Des captifs

CHAP. XX. De la dernière histoire qu'Asmodée raconta : comment, en la finissant, il fut tout à coup interrompu, et de quelle manière désagréable pour ce démon don Cleophas et lui furent séparés

CHAP. XXI. De ce que fit don Cleophas après que le Diable boiteux se fut éloigné de lui, et de quelle façon l'auteur de cet ouvrage a jugé à propos de le finir

Les béquilles du Diable boiteux  (par l’abbé Laurent BORDELON)

Entretiens sérieux et comiques des cheminées de Madrid

Une journée des Parques, Songe

A propos de cette édition électronique

A propos de l’auteur Alain-René LESAGE

NOTICE SUR LE SAGE.

Rien n'est beau que le vrai,
le vrai seul est aimable,
BOILEAU.

 

LE roman de caractère, qui se rapproche beaucoup de la comédie, a été porté en France à un haut degré de perfection, c'est à LE SAGE qu'on en doit l'introduction dans notre littérature ; et l'immortel auteur de Gil Blas n'eût-il que ce titre à notre reconnaissance, cela aurait dû suffire pour que la plupart des biographes français ne gardassent pas à son égard un honteux silence.{1}

Alain-René LESAGE naquit à Vannes, petite ville de la Bretagne, en 1668. Ainsi, il appartient aux dernières années de ce beau siècle, qui semblait être destiné à donner à la France tous les genres de gloire et d'illustration. Il fut privé de bonne heure de ses parents, qui lui laissèrent une fortune assez considérable, et dont il ne jouit pas longtemps, parce qu'elle fut très-mal administrée par les personnes auxquelles on confia son enfance. A vingt ans, il lui restait à peine les moyens d'exister. Il sentit dès ce moment le besoin de réparer les torts de la fortune par un travail assidu ; et, après avoir produit dans la province quelques essais qui ne réussirent point, il vint s'établir à Paris.

Le goût de la littérature espagnole commençait à se perdre : LE SAGE pensa à le ranimer, en puisant dans une mine véritablement féconde, qui avait fourni au grand Corneille le sujet de l'un de ses plus beaux ouvrages, et que Scarron et. plusieurs autres écrivains avaient exploitée avec quelque succès. En homme de génie, il sut faire emploi de toutes les richesses que lui présentait l'imagination des auteurs espagnols : mais l'imitation qu'il en fit put être considérée comme une véritable création, parce qu'il en rejeta tout ce qui était de mauvais goût, tout ce qui s'éloignait de la vraisemblance, et que, prenant pour guides la nature et la vérité, il sut mieux que personne mettre en pratique ce précepte d'Horace, utile dulci, en amusant ses lecteurs et en les instruisant.

Dans tous les temps, le théâtre a été la première ressource des jeunes gens qui débutaient dans la carrière des lettres. Une comédie, même médiocre, fait plus connaître d'abord celui qui en est l'auteur, et lui procure souvent beaucoup plus d'avantages que tout autre écrit, quelque bon qu'il soit. LE SAGE commença par faire des comédies, dont il prit les sujets dans le théâtre espagnol : elles eurent peu de succès. On y remarqua cependant beaucoup d'esprit, des scènes bien tracées ; et il leur dût d'être attaché à l'entreprise du théâtre de la Foire, qui depuis devint célèbre sous le titre d'Opéra-Comique. Ce genre de spectacle était sans doute bien au-dessous du talent de LESAGE ; mais il lui procurait l'existence, et le mettait dans la situation de s'occuper d'autres travaux.

Le premier ouvrage important qu'il mit au jour fut le Diable Boiteux, dont la littérature espagnole lui fournit l'idée principale. C'était la première fois qu'on voyait paraître en France un roman de ce genre, et il fit époque. Jusqu'alors les romanciers n'avaient su qu'accumuler dans leurs faibles productions, des faits tragiques amenés sans nulle vraisemblance, des incidents merveilleux, tels que les temps fabuleux en fourniraient à peine de semblables.