Le Signe des quatre

Le Signe des quatre
Arthur Conan Doyle
Publication: 1890
Catégorie(s): Fiction, Policiers & Mystères
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A Propos Doyle:
Sir Arthur Ignatius Conan Doyle, DL (22 May 1859 – 7 July 1930)
was a Scottish author most noted for his stories about the
detective Sherlock Holmes, which are generally considered a major
innovation in the field of crime fiction, and the adventures of
Professor Challenger. He was a prolific writer whose other works
include science fiction stories, historical novels, plays and
romances, poetry, and non-fiction. Conan was originally a given
name, but Doyle used it as part of his surname in his later years.
Source: Wikipedia
Disponible sur Feedbooks Doyle:
Les Aventures de
Sherlock Holmes (1892)
Le Chien des
Baskerville (1902)
Les Mémoires de
Sherlock Holmes (1893)
Les Archives de
Sherlock Holmes (1927)
La Vallée de la
peur (1915)
Le Retour de
Sherlock Holmes (1904)
Une Étude en
rouge (1887)
Son Dernier Coup
d’Archet (1917)
Le Monde
perdu (1912)
Sherlock
Holmes (1899)
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Chapitre 1
La déduction est une science
Sherlock Holmes prit la bouteille au coin de la cheminée puis
sortit la seringue hypodermique de son étui de cuir. Ses longs
doigts pâles et nerveux préparèrent l’aiguille avant de relever la
manche gauche de sa chemise. Un instant son regard pensif s’arrêta
sur le réseau veineux de l’avant-bras criblé d’innombrables traces
de piqûres. Puis il y enfonça l’aiguille avec précision, injecta le
liquide, et se cala dans le fauteuil de velours en poussant un long
soupir de satisfaction.
Depuis plusieurs mois j’assistais à cette séance qui se
renouvelait trois fois par jour, mais je ne m’y habituais toujours
pas. Au contraire, ce spectacle m’irritait chaque jour davantage,
et la nuit ma conscience me reprochait de n’avoir pas eu le courage
de protester. Combien de fois ne m’étais-je pas juré de délivrer
mon âme et de dire ce que j’avais à dire ! Mais l’attitude
nonchalante et réservée de mon compagnon faisait de lui le dernier
homme avec lequel on pût se permettre une certaine indiscrétion. Je
connaissais ses dons exceptionnels et ses qualités peu communes qui
m’en imposaient : à le contrarier, je me serais senti timide
et maladroit.
Pourtant, cet après-midi-là, je ne pus me contenir. Était-ce la
bouteille du Beaune que nous avions bue à déjeuner ? Était-ce
sa manière provocante qui accentua mon exaspération ? En tout
cas, il me fallut parler.
« Aujourd’hui, lui demandai-je, morphine ou
cocaïne ? »
Ses yeux quittèrent languissamment le vieux livre imprimé en
caractères gothiques qu’il tenait ouvert.
« Cocaïne, dit-il, une solution à sept pour cent. Vous
plairait-il de l’essayer ?
– Non, certainement pas ! répondis-je avec brusquerie. Je
ne suis pas encore remis de la campagne d’Afghanistan. Je ne peux
pas me permettre de dilapider mes forces. »
Ma véhémence le fit sourire.
« Peut-être avez-vous raison, Watson, dit-il. Peut-être
cette drogue a-t-elle une influence néfaste sur mon corps. Mais je
la trouve si stimulante pour la clarification de mon esprit, que
les effets secondaires me paraissent d’une importance
négligeable.
– Mais considérez la chose dans son ensemble ! m’écriai-je
avec chaleur. Votre cerveau peut, en effet, connaître une acuité
extraordinaire ; mais à quel prix ! C’est un processus
pathologique et morbide qui provoque un renouvellement accéléré des
tissus, qui peut donc entraîner un affaiblissement permanent. Vous
connaissez aussi la noire dépression qui s’ensuit : le jeu en
vaut-il la chandelle ? Pourquoi risquer de perdre pour un
simple plaisir passager les grands dons qui sont en vous.
Souvenez-vous que ce n’est pas seulement l’ami qui parle en ce
moment, mais le médecin en partie responsable de votre
santé. »
Il ne parut pas offensé. Au contraire, il rassembla les
extrémités de ses dix doigts et posa ses coudes sur les bras de son
fauteuil comme quelqu’un s’apprêtant à savourer une
conversation.
« Mon esprit refuse la stagnation, répondit-il ;
donnez-moi des problèmes, du travail ! Donnez-moi le
cryptogramme le plus abstrait ou l’analyse la plus complexe, et me
voilà dans l’atmosphère qui me convient. Alors je puis me passer de
stimulants artificiels. Mais je déteste trop la morne routine et
l’existence ! Il me faut une exaltation mentale : c’est
d’ailleurs pourquoi j’ai choisi cette singulière profession ;
ou plutôt, pourquoi je l’ai créée, puisque je suis le seul au monde
de mon espèce.
– Le seul détective privé ? dis-je, levant les
sourcils.
– Le seul détective privé que l’on vienne consulter,
précisa-t-il. En ce qui concerne la détection, la recherche, c’est
moi la suprême Cour d’appel. Lorsque Gregson ou Lestrade, ou
Athelney Jones donnent leur langue au chat – ce qui devient une
habitude chez eux, soit dit en passant – c’est moi qu’ils viennent
trouver. J’examine les données en tant qu’expert et j’exprime
l’opinion d’un spécialiste. En pareils cas, je ne demande aucune
reconnaissance officielle de mon rôle. Mon nom n’apparaît pas dans
les journaux. Le travail en lui-même, le plaisir de trouver un
champ de manœuvres pour mes dons personnels sont ma plus haute
récompense. Vous avez d’ailleurs eu l’occasion de me voir à l’œuvre
dans l’affaire de Jefferson Hope.
– En effet. Et jamais rien ne m’a tant frappé. À tel point que
j’en ai fait un petit livre, sous le titre quelque peu fantastique
de Une Étude en rouge. »
Il hocha tristement la tête.
« Je l’ai parcouru, dit-il. Je ne peux honnêtement vous en
féliciter.
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