3. Le traitement de l’officier de santé du chef-lieu de district sera de cinq cents livres. Ses fonctions seront de faire le service de son arrondissement, et de suivre le traitement des maladies qui se manifesteront dans l’étendue du district. Il sera attribué à chacun des deux autres une somme de trois cent cinquante livres. Ces officiers de santé se prêteront mutuellement secours pour assurer le service, en cas de surcharge dans quelques-uns des arrondissements. Il sera délivré à ces officiers de santé une liste nominative des individus portés sur le livre de bienfaisance, chacun pour son arrondissement.

» Art. 4. Il sera distribué par district des boîtes de remèdes les plus usuels et les plus simples ; le nombre en sera fixé à quatre par chaque district : deux sont remises à chacune des municipalités du lieu de résidence des officiers de santé ; elles seront confiées à l’un des membres de la commune, ou à tout autre désigné par elle. Les deux autres resteront en réserve au district, qui en disposera suivant que les circonstances l’exigeront. Ces boîtes pourront être employées, en cas de besoin, au traitement des épidémies ; il sera ajouté à chacune une provision de farine de riz et de fécule de pommes de terre, et pour le tout il sera fait un fonds de cent soixante mille neuf cent cinquante livres.

 

» Art. 6. Pour assurer aux malades les moyens de se procurer les secours en aliments et de pourvoir aux autres dépenses que leur état exigera, il leur sera alloué une somme par jour. Cette somme est fixée à dix sous, et à six sous seulement pour les enfants au-dessous de dix ans.

» Art. 7. L’agent national de la commune, sur la demande qui lui en sera faite, requerra l’officier de santé de l’arrondissement, lequel se transportera sans délai auprès du malade. Sur son rapport, qu’il remettra par écrit et signé à l’agent national dans la forme qui sera déterminée, le secours en argent, mentionné en l’article précédent, sera avancé au malade par la municipalité du lieu, qui en sera remboursée par la caisse du district, ainsi qu’il sera expliqué ci-après.

» Art. 12. Chaque commune, dans les campagnes, fera cultiver, autant que le lui permettront les localités, les plantes les plus usuelles en médecine qui leur seront indiquées par l’officier de santé. Il est fait une invitation civique aux citoyens de l’arrondissement de cultiver dans leurs jardins quelques-unes de ces plantes, et d’en fournir gratuitement aux malades.

TITRE V. – Modes d’exécution et cérémonies civiques.

» Art. 1er. La première fête nationale qui sera célébrée sera indiquée par un décret, aussitôt que les tableaux demandés par les précédents articles auront été formés dans chaque district et envoyés par les départements.

» Art. 3. La formation prompte de ces tableaux est recommandée à l’humanité et au patriotisme des municipalités, des administrations de districts et de départements.

 

» Art. 5. Le jour consacré au soulagement du malheur par le décret sur les fêtes nationales et décadaires, il y aura dans chaque chef-lieu de district une cérémonie civique, dans laquelle les agriculteurs et les artisans vieillards et infirmes, les mères et les veuves désignées dans les articles précédents, ayant des inscriptions, seront honorés, et recevront, en présence du peuple, le payement du premier semestre de la bienfaisance nationale.

» Art. 6. Le livre de la bienfaisance nationale sera lu par l’agent national du district, en présence des autorités constituées et des jeunes citoyens des écoles primaires, dans les lieux où les citoyens se rassemblent le décadi. »

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« Ces admirables décrets te prouvent, – continua Charlotte, – mon enfant, que la république, dans sa tendre commisération pour l’infortune, lui consacre une sorte de culte religieux ; non seulement elle soulage les misères du peuple, mais elle honore le malheur, et en le secourant, ce n’est pas une dégradante aumône qu’elle lui jette, c’est la dette de la patrie qu’elle acquitte solennellement envers ces vieillards, qui ont usé leur vie au travail de la terre ou des métiers ; cette dette, la république l’acquitte encore envers les pauvres veuves qui, malgré leur labeur quotidien, ne peuvent subvenir aux besoins de leur jeune famille. Tu le vois, le VIEILLARD, L’ENFANT et la FEMME sont l’objet constant de la sollicitude de cette république que tu entendras peut-être un jour accuser des plus noirs forfaits. »

– Il faut être juste, – reprend madame Desmarais interrompant de nouveau sa fille, – jamais, au grand jamais, sous l’ancien régime, l’on ne s’occupait ainsi du sort des pauvres gens, et néanmoins en ces temps extraordinaires où nous vivons, cette pauvre madame Camille Desmoulins a été envoyée à l’échafaud.

– Hélas ! bonne mère, c’est le crime des méchants ou des insensés, mais non le crime de la république. Un radieux soleil éclaire l’accomplissement d’un grand forfait, le soleil est-il solidaire de ce forfait ?

Gertrude entre soudain dans le salon d’un pas précipité ; sa physionomie est à la fois si joyeuse et si émue que Charlotte se lève brusquement et, s’adressant à la servante, s’écrie : – Jean est arrivé !

– Madame… c’est-à-dire… mais, pour l’amour de Dieu, n’allez point trop vous émouver dans l’état où vous êtes, – répond Gertrude.