La nuit, la lune et leur cœur se poursuivent.

 

À son tour un cri : « l’empreinte, l’empreinte, je ne vois plus l’empreinte. À la fin, je ne puis plus compter sur vous ! »

POÈMES

Le cœur sur l’arbre vous n’aviez qu’à le cueillir,

Sourire et rire, rire et douceur d’outre-sens.

Vaincu, vainqueur et lumineux, pur comme un ange,

Haut vers le ciel, avec les arbres.

 

Au loin, geint une belle qui voudrait lutter

Et qui ne peut, couchée au pied de la colline.

Et que le ciel soit misérable ou transparent

On ne peut la voir sans l’aimer.

 

Les jours comme des doigts repliant leurs phalanges.

Les fleurs sont desséchées, les graines sont perdues,

La canicule attend les grandes gelées blanches.

 

A l’œil du pauvre mort. Peindre des porcelaines.

Une musique, bras blancs tout nus.

Les vents et les oiseaux s’unissent – le ciel change.

LIMITE

Songe aux souffrances taillées sous des voiles fautifs

Aux petits amateurs de rivières tournantes

Où promenade pour noyade

Nous irons sans plaisir

Nous irons ramer

Dans le cou des eaux

 

Nous aurons un bateau.

LES MOUTONS

Ferme les yeux visage noir

Ferme les jardins de la rue

L’intelligence et la hardiesse

L’ennui et la tranquillité

Ces tristes soirs à tout moment

Le verre et la porte vitrée

Confortable et sensible

Légère et l’arbre à fruits

L’arbre à fleurs l’arbre à fruits

Fuient

L’UNIQUE

Elle avait dans la tranquillité de son corps

Une petite boule de neige couleur d’œil

Elle avait sur les épaules

Une tache de silence une tache de rose

Couvercle de son auréole

Ses mains et des arcs souples et chanteurs

Brisaient la lumière

 

Elle chantait les minutes sans s’endormir.

LA VIE

Sourire aux visiteurs

Qui sortent de leur cachette

Quand elle sort elle dort.

 

Chaque jour plus matinale

Chaque saison plus nue

Plus fraîche

 

Pour suivre ses regards

Elle se balance.

NUL

Il pose un oiseau sur la table et ferme les volets. Il se coiffe, ses cheveux dans ses mains sont plus doux qu’un oiseau.

 

Elle dit l’avenir. Et je suis chargé de le vérifier.

 

Le cœur meurtri, l’âme endolorie, les mains brisées, les cheveux blancs, les prisonniers, l’eau tout entière est sur moi comme une plaie à nu.

INTÉRIEUR

Dans quelques secondes

Le peintre et son modèle

Prendront la fuite.

 

Plus de vertus

Ou moins de malheurs

J’aperçois une statue

 

Une sorte d’amande

Une médaille vernie

Pour le plus grand ennui.

À CÔTÉ 1

La nuit plus longue et la route plus blanche.

Lampes je suis plus près de vous que la lumière.

Un papillon l’oiseau d’habitude

Roue brisée de ma fatigue

De bonne humeur place

Signal vide et signal

¡A l’éventail d’horloge.

À CÔTÉ 2

Soleil tremblant

Signal vide et signal à l’éventail d’horloge

Aux caresses unies d’une main sur le ciel

Aux oiseaux entrouvrant le livre des aveugles

Et d’une aile après l’autre entre cette heure et l’autre

Dessinant l’horizon faisant tourner les ombres

Qui limitent le monde quand j’ai les yeux baissés.

L’IMPATIENT

Si triste de ses faux calculs

Qu’il inscrit ses nombres à l’envers

Et s’endort.

 

Une femme plus belle

Et n’a jamais trouvé,

Cherché les idées roses des quinze ans à peine,

Ri sans le savoir, sans un compliment

Aux jeunesses du temps.

 

À la rencontre

De ce qui passait à côté

L’autre jour,

 

De la femme qui s’ennuyait,

Les mains à terre,

Sous un nuage.

 

La lampe s’allumait aux méfaits de l’orage

Aux beaux jours d’Août sans défaillances,

La caressante embrassait l’air, les joues de sa compagne,

Fermait les yeux

Et comme les feuilles le soir

Se perdait à l’horizon.

SANS MUSIQUE

Les muets sont des menteurs, parle.

Je suis vraiment en colère de parler seul

Et ma parole

Éveillé des erreurs

 

Mon petit cœur.

LUIRE

Terre irréprochablement cultivée,

Miel d’aube, soleil en fleurs,

Coureur tenant encore par un fil au dormeur

(Nœud par intelligences)

Et le jetant sur son épaule :

« Il n’a jamais été plus neuf,

Il n’a jamais été si lourd. »

Usure, il sera plus léger,

Utile.

Clair soleil d’été avec :

Sa chaleur, sa douceur, sa tranquillité

Et, vite,

Les porteurs de fleurs en l’air touchent de la terre.

LA GRANDE MAISON INHABITABLE

Au milieu d’une île étonnante

Que ses membres traversent

Elle vit d’un monde ébloui.

 

La chair que l’on montre aux curieux

Attend là comme les récoltes

La chute sur les rives.

 

En attendant pour voir plus loin

Les yeux plus grands ouverts sous le vent de ses mains

Elle imagine que l’horizon a pour elle dénoué sa ceinture.

LA MORT DANS LA CONVERSATION

Qui a votre visage ?

La bonne et la mauvaise

La belle imaginable

Gymnastique à l’infini

Dépassant en mouvements

Les couleurs et les baisers

Les grands gestes la nuit.

RAISON DE PLUS

Les lumières en l’air,

L’air sur un tour moitié passé, moitié brillant,

Faites entrer les enfants,

Tous les saluts, tous les baisers, tous les remerciements.

 

Autour de la bouche

Son rire est toujours différent,

C’est un plaisir, c’est un désir, c’est un tourment,

C’est une folle, c’est la fleur, une créole qui passe.

 

La nudité, jamais la même.

Je suis bien laid.

Au temps des soins, des neiges, herbes en soins,

Neiges en foule,

Au temps en heures fixes,

Des souples satins des statues.

Le temple est devenu fontaine

Et la main remplace le cœur.

 

Il faut m’avoir connu à cette époque pour m’aimer,

Sûr du lendemain.

LESQUELS ?

Pendant qu’il est facile

Et pendant qu’elle est gaie

Allons nous habiller et nous déshabiller.

RUBANS

L’alarme matérielle où, sans excuse, apparaît la douleur future.

C’est bien : presque insensible. C’est un signe de plus de dignité.

Aucun étonnement, une femme ou un gracieux enfant de toile fine et de paille, idées de grandeur,

Leurs yeux se sont levés plus tôt que le soleil.

 

Les sacrifiés font un geste qui ne dit rien parmi la dentelle de tous les autres gestes, imaginaires, à cinq six, vers le lieu de repos où il n’y a personne.

Constaté qu’ils se sont réfugiés dans les branches d’une politesse désespérée, d’une couronne taillée à coups de vent.

Prendre, cordes de la vie. Pouviez-vous prendre plus de libertés ?

 

De petits instruments,

Et les mains qui pétrissent un ballon pour le faire éclater, pour que le sang de l’homme lui jaillisse au visage.

Et les ailes qui sont attachées comme la terre et la mer.

L’AMI

La photographie : un groupe.

Si le soleil passait,

Si tu bouges.

 

Fards. A l’intérieur, blanche et vernie,

Dans le tunnel.

« Au temps des étincelles

On débouchait la lumière. »

Plus tard.

 

Postérité, mentalité des gens.

La bien belle peinture.

L’épreuve, s’entendre.

L’espoir des cantharides

Est un bien bel espoir.

VOLONTAIREMENT

Aveugle maladroit, ignorant et léger,

Aujourd’hui pour oublier,

Le mois prochain pour dessiner

Les coins de rue, les allées à perte de vue.

Je les imite pour m’étendre

Dans une nuit profonde et large de mon âge.

A LA MINUTE

L’instrument

Comme tu le vois.

Espérons

Et

Espérons

Adieu

Ne t’avise pas

Que les yeux

Comme tu le vois

Le jour et la nuit ont bien réussi

Je le regarde je le vois.

PARFAIT

Un miracle de sable fin

Transperce les feuilles les fleurs

Éclôt dans les fruits

Et comble les ombres.

 

Tout est enfin divisé

Tout se déforme et se perd

Tout se brise et disparaît

La mort sans conséquences.

 

Enfin

La lumière n’a plus la nature

Ventilateur gourmand étoile de chaleur

Elle abandonne les couleurs

Elle abandonne son visage

 

Aveugle silencieuse

Elle est partout semblable et vide.

RONDE

Sous un soleil ressort du paysage

Une femme s’emballe

Frise son ombre avec ses jambes

Et d’elle seule espère les espoirs les plus mystérieux

 

Je la trouve sans soupçons sans aucun doute amoureuse

Au lieu des chemins assemblés

De la lumière en un point diminuée

Et des mouvements impossibles

La grande porte de la face

Aux plans discutés adoptés

Aux émotions de pensée

Le voyage déguisé et l’arrivée de réconciliation

La grande porte de la face

La vue des pierres précieuses

Le jeu du plus faible en plus fort

CE N’EST PAS LA POÉSIE QUI…

Avec des yeux pareils

Que tout est semblable

École de nu.

Tranquillement

Dans un visage délié

Nous avons pris des garanties

Un coup de main aux cheveux rapides

La bouche de voluptueux inférieur joue et tombe

Et nous lançons le menton qui tourne comme une toupie.

ŒIL DE SOURD

Faites mon portrait

Il se modifiera pour remplir tous les vides.

Faites mon portrait sans bruit, seul le silence

À moins que – s’il – sauf – excepté –

Je ne vous entends pas.

 

Il s’agit, il ne s’agit plus.

Je voudrais ressembler –

Fâcheuse coïncidence, entre autres grandes affaires.

Sans fatigue, têtes nouées

Aux mains de mon activité.

Mourir de ne pas mourir (1924)

Je meurs…

 

Pour tout simplifier

je dédie ce livre

à André Breton

P. E.

L’ÉGALITÉ DES SEXES

Les yeux sont revenus d’un pays arbitraire

Où nul n’a jamais su ce que c’est qu’un regard

Ni connu la beauté des yeux, beauté des pierres,

Celle des gouttes d’eau, des perles en placards,

 

Des pierres nues et sans squelette, ô ma statue,

Le soleil aveuglant te tient lieu de miroir

Et s’il semble obéir aux puissances du soir

C’est que ta tête est close, ô statue abattue

 

Par mon amour et par mes ruses de sauvage.

Mon désir immobile est ton dernier soutien

Et je t’emporte sans bataille, ô mon image,

Rompue à ma faiblesse et prise dans mes liens.

AU CŒUR DE MON AMOUR

Un bel oiseau me montre la lumière

Elle est dans ses yeux, bien en vue.

Il chante sur une boule de gui

Au milieu du soleil.

* * *

Les yeux des animaux chanteurs

Et leurs chants de colère ou d’ennui

M’ont interdit de sortir de ce lit.

J’y passerai ma vie.

 

L’aube dans des pays sans grâce

Prend l’apparence de l’oubli.

Et qu’une femme émue s’endorme, à l’aube,

La tête la première, sa chute l’illumine.

 

Constellations

Vous connaissez la forme de sa tête

Ici, tout s’obscurcit :

Le paysage se complète, sang aux joues,

Les masses diminuent et coulent dans mon cœur

Avec le sommeil.

Et qui donc veut me prendre le cœur ?

* * *

Je n’ai jamais rêvé d’une si belle nuit.

Les femmes du jardin cherchent à m’embrasser –

Soutiens du ciel, les arbres immobiles

Embrassent bien l’ombre qui les soutient

 

Une femme au cœur pâle

Met la nuit dans ses habits.

L’amour a découvert la nuit

Sur ses seins impalpables.

 

Comment prendre plaisir à tout ?

Plutôt tout effacer.

L’homme de tous les mouvements,

De tous les sacrifices et de toutes les conquêtes

Dort. Il dort, il dort, il dort.

Il raye de ses soupirs la nuit minuscule, invisible.

 

Il n’a ni froid, ni chaud.

Son prisonnier s’est évadé – pour dormir

Il n’est pas mort, il dort

Quand il s’est endormi

Tout l’étonnait,

Il jouait avec ardeur,

Il regardait,

Il entendait.

Sa dernière parole :

« Si c’était à recommencer, je te rencontrerais sans te chercher. »

 

II dort, il dort, il dort.

L’aube a eu beau lever la tête,

Il dort.

POUR SE PRENDRE AU PIÈGE

C’est un restaurant comme les autres. Faut-il croire que je ne ressemble à personne ? Une grande femme, à côté de moi, bat des œufs avec ses doigts. Un voyageur pose ses vêtements sur une table et me tient tête. Il a tort, je ne connais aucun mystère, je ne sais même pas la signification du mot : mystère, je n’ai jamais rien cherché, rien trouvé, il a tort d’insister.

 

L’orage qui, par instants, sort de la brume me tourne les yeux et les épaules. L’espace a alors des portes et des fenêtres. Le voyageur me déclare que je ne suis plus le même. Plus le même ! Je ramasse les débris de toutes mes merveilles. C’est la grande femme qui m’a dit que ce sont des débris de merveilles, ces débris. Je les jette aux ruisseaux vivaces et pleins d’oiseaux, mer, la calme mer est entre eux comme le ciel la lumière. Les couleurs aussi, si l’on me parle des couleurs, je ne regarde plus. Parlez-moi des formes, j’ai grand besoin d’inquiétude.

 

Grande femme, parle-moi des formes, ou bien je m’endors et je mène la grande vie, les mains prises dans la tête et la tête dans la bouche, dans la bouche bien dose, langage intérieur.

L’AMOUREUSE

Elle est debout sur mes paupières

Et ses cheveux sont dans les miens,

Elle a la forme de mes mains,

Elle a la couleur de mes yeux,

Elle s’engloutit dans mon ombre

Comme une pierre sur le ciel.

 

Elle a toujours les yeux ouverts

Et ne me laisse pas dormir.

Ses rêves en pleine lumière

Font s’évaporer les soleils,

Me font rire, pleurer et rire,

Parler sans avoir rien à dire.

LE SOURD ET L’AVEUGLE

Gagnerons-nous la mer avec des cloches

Dans nos poches, avec le bruit de la mer

Dans la mer, ou bien serons-nous les porteurs

D’une eau plus pure et silencieuse ?

 

L’eau se frottant les mains aiguise des couteaux.

Les guerriers ont trouvé leurs armes dans les flots

Et le bruit de leurs coups est semblable à celui

Des rochers défonçant dans la nuit les bateaux.

 

C’est la tempête et le tonnerre. Pourquoi pas le silence

Du déluge, car nous avons en nous tout l’espace rêvé

Pour le plus grand silence et nous respirerons

Comme le vent des mers terribles, comme le vent

 

Qui rampe lentement sur tous les horizons.

L’HABITUDE

Toutes mes petites amies sont bossues

Elles aiment leur mère.

Tous mes animaux sont obligatoires,

Ils ont des pieds de meuble

Et des mains de fenêtre.

Le vent se déforme,

Il lui faut un habit sur mesure,

Démesuré.

Voilà pourquoi

Je dis la vérité sans la dire.

DANS LA DANSE

Petite table enfantine,

il y a des femmes dont les yeux sont comme des morceaux de sucre,

il y a des femmes graves comme les mouvements de l’amour qu’on ne surprend pas,

il y a des femmes au visage pâle, d’autres comme le ciel à la veille du vent.

Petite table dorée des jours de fête,

il y a des femmes de bois vert et sombre

celles qui pleurent,

de bois sombre et vert :

celles qui rient.

 

Petite table trop basse ou trop haute.

il y a des femmes grasses

avec des ombres légères,

il y a des robes creuses,

des robes sèches,

des robes que l’on porte chez soi et que l’amour ne fait jamais sortir.

Petite table,

je n’aime pas les tables sur lesquelles je danse,

je ne m’en doutais pas.

LE JEU DE CONSTRUCTION

À Raymond Roussel.

 

L’homme s’enfuit, le cheval tombe,

La porte ne peut pas s’ouvrir,

L’oiseau se tait, creusez sa tombe,

Le silence le fait mourir.

 

Un papillon sur une branche

Attend patiemment l’hiver,

Son cœur est lourd, la branche penche,

La branche se plie comme un ver.

 

Pourquoi pleurer la fleur séchée

Et pourquoi pleurer les lilas ?

Pourquoi pleurer la rose d’ambre ?

 

Pourquoi pleurer la pensée tendre ?

Pourquoi chercher la fleur cachée

Si l’on n’a pas de récompense ?

 

— Mais pour ça, ça et ça.

ENTRE AUTRES

A l’ombre des arbres

Comme au temps des miracles,

 

Au milieu des hommes

Comme la plus belle femme

 

Sans regrets, sans honte,

J’ai quitté le monde.

 

— Qu’avez-vous vu ?

 

— Une femme jeune, grande et belle

En robe noire très décolletée.

GIORGIO DE CHIRICO

Un mur dénonce un autre mur

Et l’ombre me défend de mon ombre peureuse.

Ô tour de mon amour autour de mon amour,

Tous les murs filaient blanc autour de mon silence.

 

Toi, que défendais-tu ? Ciel insensible et pur

Tremblant tu m’abritais. La lumière en relief

Sur le ciel qui n’est plus le miroir du soleil,

Les étoiles de jour parmi les feuilles vertes,

 

Le souvenir de ceux qui parlaient sans savoir,

Maîtres de ma faiblesse et je suis à leur place

Avec des yeux d’amour et des mains trop fidèles

Pour dépeupler un monde dont je suis absent.

BOUCHE USÉE

Le rire tenait sa bouteille

À la bouche riait la mort

Dans tous les lits où l’on dort

Le ciel sous tous les corps sommeille

 

Un clair ruban vert à l’oreille

Trois boules une bague en or

Elle porte sans effort

Une ombre aux lumières pareille

 

Petite étoile des vapeurs

Au soir des mers sans voyageurs

Des mers que le ciel cruel fouille

 

Délices portées à la main

Plus douce poussière à la fin

Les branches perdues sous la rouille.

DANS LE CYLINDRE DES TRIBULATIONS

Que le monde m’entraîne et j’aurai des souvenirs.

 

Trente filles au corps opaque, trente filles divinisées par l’imagination, s’approchent de l’homme qui repose dans la petite vallée de la folie.

 

L’homme en question joue avec ferveur. Il joue contre lui-même et gagne. Les trente filles en ont vite assez. Les caresses du jeu ne sont pas celles de l’amour et le spectacle n’en est pas aussi charmant, séduisant et agréable.

 

Je parle de trente filles au corps opaque et d’un joueur heureux. Il y a aussi, dans une ville de laine et de plumes, un oiseau sur le dos d’un mouton. Le mouton, dans les fables, mène l’oiseau en paradis.

 

Il y a aussi les siècles personnifiés, la grandeur des siècles présents, le vertige des années défendues et des fruits perdus.

 

Que les souvenirs m’entraînent et j’aurai des yeux ronds comme le monde.

DENISE DISAIT AUX MERVEILLES

Le soir traînait des hirondelles. Les hiboux

Partageaient le soleil et pesaient sur la terre

Comme les pas jamais lassés d’un solitaire

Plus pâle que nature et dormant tout debout.

 

Le soir traînait des armes blanches sur nos têtes.

Le courage brûlait les femmes parmi nous,

Elles pleuraient, elles criaient comme des bêtes,

Les hommes inquiets s’étaient mis à genoux.

 

Le soir, un rien, une hirondelle qui dépasse,

Un peu de vent, les feuilles qui ne tombent plus,

Un beau détail, un sortilège sans vertus

Pour un regard qui n’a jamais compris l’espace.

LA BÉNÉDICTION

À l’aventure, en barque, au nord.

Dans la trompette des oiseaux

Les poissons dans leur élément.

 

L’homme qui creuse sa couronne

Allume un brasier dans la cloche,

Un beau brasier-nid-de-fourmis.

 

Et le guerrier bardé de fer

Que l’on fait rôtir à la broche

Apprend l’amour et la musique.

LA MALÉDICTION

Un aigle, sur un rocher, contemple l’horizon béat. Un aigle défend le mouvement des sphères. Couleurs douces de la charité, tristesse, lueurs sur les arbres décharnés, lyre en étoile d’araignée, les hommes qui sous tous les cieux se ressemblent sont aussi bêtes sur la terre qu’au ciel.