Je demande à en faire partie.

Les artilleurs du Midi qui f… le camp.

Les premiers blessés restent optimistes et pleins de confiance.

On parle en sourdine d’exécutions à la citadelle – espions pincés.

Le 15e Corps flanche : fureur des hommes en l’apprenant.

« Nous ne sommes pas venus dans l’Est pour nous faire casser la gueule. » Réponse : un coup de poing en pleine figure. L’ineffable Rouzoul.

Pluie : les gens évacués. Cortèges sur les routes.

Les atrocités des Allemands à Étain et ailleurs. Récits de blessés – les chevaux morts. Une exécution au champ de tir de la Blancharderie pour abandon de poste : au petit jour dans la brume sous la pluie – le condamné meurt courageusement. Les blessés arrivent à la gare – corvées. Attentions des médecins, brutalités d’autres – un sergent soupçonné de mutilation volontaire insulté par des majors, sans preuve, engueulé 2 heures et pendant ce temps, les blessés attendent des soins.

Les obus tombent autour des forts – récits du sergent de Troyon – le passage de la Meuse – hécatombe d’Allemands. Joie après la victoire de la Marne.

Le peloton spécial va finir. Genlis et Montandon désignés pour partir, émotion de se quitter – adieux du lieutt Galli, un homme charmant. Le lieutt Thomas est parti. Remplacé par Jeandedieu [6], capitaine à la retraite : cheveux et pommes de terre. Le lieutt Angst.

La nouvelle chambre où je suis est joyeuse. Pabst, Copin, Cartier. Un ami de Raveton, Laverne, éclopé du 105e, arrive : son bonheur de trouver quelqu’un qu’il connaît.

Le casernement des éclopés où j’ai commandé 2 corvées ! Pouah !

L’examen de chef de section : discussions entre Coubat, Dubonnet et Galli. Belle réponse de Galli. Jeandedieu est hanté par les pommes de terre : la permission du sergent Dun – et les cheveux : le perruquier sur le terrain de manoeuvres.

Quelques manoeuvres autour de Verdun : je lève un lièvre.

La garde à Glorieux : le 366e passe : je rencontre Mercereau [7]. Coudé passe et Berthelotti. Je n’ai pu voir Genlis déjà très fatigué me dit-on.

La messe à Glorieux est dans la cour de la caserne – discussions – rhume.

27 septembre

La grande bataille de l’Aisne est engagée : des bruits circulent, nous attendons anxieusement des nouvelles : il paraît que cela va bien.

À Troyon il y aurait eu une nouvelle hécatombe d’Allemands. Le fort est démoli mais des batteries de 75 dissimulées, à droite et à gauche, ont laissé approcher l’ennemi et l’ont massacré à 600 m avec des boîtes à mitraille.

Déjà au pont de Charny, on les avait laissés passer puis on a coupé le pont et massacré ceux qui avaient passé.

28, 29, 30 septembre

La bataille se poursuit. Un certain nombre d’éclopés du 166e rejoignent leur corps. Jean n.d.d. devient de plus en plus insupportable et grotesque. Il inscrit note sur note au cahier des rapports, mélangeant la corvée de pommes de terre et les latrines. Être de jour est un supplice. Tous les matins, levé avant le réveil (4 h) il passe dans les couloirs, entre dans les chambres non éclairées, menace de f… dedans hommes et sergents.

Le 29 l’adjudant Delaweure, nommé lieutt, vient nous voir et nous serrer la main. Nous prenons un verre ensemble à la cantine. Il a assisté aux combats d’Étain et des environs. Des morts non enterrés pourrissent près des fermes, desquelles on ne peut approcher sans recevoir des obus de l’artillerie allemande.

D’autre part, le bois de Forges est inabordable – plus de 2000 cadavres allemands y pourrissent ; dans certains villages évacués bombardés, vides, les poules et les porcs en liberté picorent et dévorent les morts.

Les Allemands sont retranchés à Étain – batteries enterrées et cimentées : leur service d’espionnage doit être fort bien fait car chaque jour à l’heure où se relèvent les avant-postes, plusieurs obus viennent régulièrement tomber aux environs de Grand Garde, rassemblés en ordre serré, bien que les emplacements et heures de relève varient chaque jour.

Le 29 au soir émotion – notre adjudant Daniel nous dit qu’il a reçu confidence sous le sceau du secret, d’une nouvelle sensationnelle, extraordinaire, que nous connaîtrons dans quelques jours. Voici déjà quelques soirs que des bruits semblables circulent. Qu’y a-t-il de vrai là-dessous ? Nous voulons espérer.

Ce matin, 30, rien de nouveau.