Quartier désert. Donc, conditions excellentes.

Ils escaladent un mur. Puis, l’un portant l’autre, ils traversent le jardin. La trace des pas, ainsi, n’indiquera qu’un seul coupable.

Les volets sont fermés. Un ciseau les ébranle. Lentement, sans respirer — la respiration s’entend — ils escaladent la fenêtre, franchissent une pièce, montent l’escalier et s’arrêtent devant la chambre où dort le riche vieillard.

Ils écoutent. Pas un bruit. Une heure leur est nécessaire pour ouvrir la porte. Ils arrivent au lit, allument une lanterne. Le vieux regarde, les yeux désorbités. Victor l’étreint à la gorge et serre.

Cependant, le Flandrin tire de sa poche une cordelette, se hausse sur un fauteuil et la passe dans un crochet du plafond.

Leur besogne s’achève à la même minute. Ils extirpent la victime de son lit, l’habillent, lui entourent le cou de la corde et le pendent.

Le Flandrin a des qualités de copiste. Il s’asseoit au bureau de travail. Des lettres y sont éparses. Il étudie l’écriture et, sur une feuille de papier, trace hardiment : « Qu’on accuse personne de ma mort… »

Quelques chaises ont pu être dérangées. Ils les replacent. Ils examinent leurs vêtements. Aucun bouton ne manque. Puis ils reprennent le même chemin. Et, tous deux, penchés à terre, ils scrutent les tapis, les parquets, le sable du jardin, pour ne laisser aucune marque de leur passage.

Le mur est sauté. Ils regagnent leur domicile. Ils boivent. Ils fument. Ils se félicitent de leur adresse minutieuse. Ah ! la police, elle n’y verra que du feu !

Et, soudain, Victor s’écrie :

— Cré nom de Dieu, nous avons oublié de voler !

Que voulez-vous ? On ne peut pas être à la fois un bon assassin et un bon voleur.

 

Vers la vie

Le jour où je résolus de me tuer… Et, en vérité, pouvais-je faire autrement, ayant perdu à la fois ma femme, mon meilleur ami et ma fortune ? Soyez sûrs que beaucoup à ma place en seraient devenus fous. Un moment même j’ai eu peur… Je souffrais trop… ma tête s’en allait, et je voyais bien, au visage étonné des gens qui m’écoutaient, que l’on se demandait si j’avais toute ma raison.

Je l’ai, toute ma raison. Il faut l’avoir pour se résoudre à la mort avec un tel sang-froid et une volonté si claire. Je m’y résolus donc, et, tout de suite, mon genre de suicide se précisa, inéluctable et logique. Un homme de sport comme moi ne pouvait mourir que par accident sportif. Un vieux chauffeur de ma trempe ne pouvait mourir que par l’automobile.

Et cela devait se produire immédiatement.