Comme toutes ces Parties doivent s’exécuter en même tems, on compte les Lignes d’une Partition, non par les Portées, mais par les Accolades, & tout ce qui est compris sous une Accolade, ne forme qu’une seule Ligne. (Voyez PARTITION.)
ACCOMPAGNATEUR. Celui qui dans un Concert accompagne de l’Orgue, du Clavecin, ou de tout autre Instrument d’accompagnement. (Voyez ACCOMPAGNEMENT.)
Il faut qu’un bon Accompagnateur soit grand Musicien, qu’il sache à fond l’Harmonie, qu’il connoisse bien son Clavier, qu’il ait l’oreille sensible, les doigts souples & le goût sur.
C’est à l’Accompagnateur de donner le ton aux Voix & le mouvement à l’Orchestre. La premiere de ces fonctions [8] exige qu’il ait toujours sous un doigt la Note du Chant pour la refrapper au besoin & soutenir ou remettre la Voix, quand elle foiblit ou s’égare. La seconde exige qu’il marque la Basse & son Accompagnement par des coups fermes, égaux, détachés & bien réglés à tous égards, afin de bien faire sentir la Mesure aux Concertans, sur-tout au commencement des Airs. On trouvera dans les trois Articles suivans, les détails qui peuvent manquer à celui-ci.
ACCOMPAGNEMENT. C’est l’exécution d’une Harmonie complete & réguliere sur un Instrument propre à la rendre, tel que l’Orgue, le Clavecin, le Théorbe, la Guitare, &c. Nous prendrons ici le Clavecin pour exemple; d’autant plus qu’il est presque le seul Instrument qui soit demeuré en usage pour l’Accompagnement.
On y a pour guide une des Parties de, la Musique, qui est ordinairement la Basse. On touche cette Basse de la main gauche, & de la droite l’Harmonie indiquée par la marche de la Basse, par le chant des autres Parties qui marchent en même tems, par la Partition qu’on a devant les yeux, ou par les chiffres qu’on trouvé ajoutés à la Basse. Les Italiens méprisent les chiffres; la Partition même leur est peu nécessaire: la promptitude & la finesse de leur oreille y supplée, & ils accompagnent fort bien sans tout cet appareil. Mais ce n’est qu’à leur disposition naturelle qu’ils sont redevables de cette facilité, & les autres Peuples, qui ne sont pas nés comme eux pour la Musique, trouvent à la pratique de l’Accompagnement des obstacles presque insurmontables. [9] Il faut des huit à dix années pour y réussir passablement. Quelles sont donc les causes qui retardent ainsi l’avancement des éleve de embarrassent si long-tems les Maîtres, si la seule difficulté de l’Art ne fait point cela?
Il y en a deux principales: l’une dans la manioc de chiffrer les Basses: l’autre dans la méthode de l’Accompagnement. Parlons d’abord de la premiere.
Les Signes dont on se sert pour chiffrer les Basses sont en trop grand nombre: il y a si peu d’Accords fondamentaux! Pourquoi faut-il tant de chiffres pour les exprimer? Ces mêmes Signes sont équivoques, obscurs, insuffisans. Par exemple, ils ne déterminent presque jamais l’espece des Intervalles qu ils expriment, ou, qui pis est, ils en indiquent d’une autre espece. On barre les uns pour marquer des Dièses; on en barre d’autres pour marquer des Bémols: les Intervalles Majeurs & les Superflus, même les Diminues, s’expriment souvent de la même maniere: quand les chiffres sont doubles, ils sont trop confus; quand ils sont simples, ils n’offrent presque jamais que l’idée d’un seul Intervalle; de sorte qu’on en a toujours plusieurs à déterminer.
Comment remédier à ces inconvéniens? Faudra-t-il multiplier les Signes pour tout exprimer? Mais on se plaint qu’il y cri à déjà trop. Faudra-t-il les réduire? On laissera plus de choses à deviner l’Accompagnateur, qui n’est déjà que trop occupé; & dès qu’on fait tant que d’employer des chiffres, il faut qu’ils puissent tout dire. Que faire donc? Inventer de nouveaux Signes, perfectionner [10] le Doigter, & faire, des Signes & du Doigter, deux moyens combines qui concourent à soulager l’Accompagnateur. C’est ce que M. Rameau a tenté avec beaucoup de sagacité, dans si Dissertation sur les différentes méthodes d’Accompagnement. Nous exposerons aux mots Chiffres & Doigter les moyens qu’il propose. Passions aux méthode.
Comme l’ancienne Musique n’étoit pas si composée que la nôtre, ni pour le Chant, ni pour l’Harmonie, & qu’il n’y avoir gueres d’autre Basse que la fondamentale, tout l’Accompagnement ne consistoit qu’en une suite d’Accords parfaits, dans lesquels l’Accompagnateurs substituoit de tems en tems quelque Sixte à la Quinte, selon que l’oreille le conduisoit: ils n’en savoient pas davantage. Aujourd’hui qu’on a varié les Modulations, renverse les Parties, surcharge, peut-être gâté l’Harmonie par des foules de Dissonances, on est contraint de suivre d’autres regles. Campion imagina, dit-on, celle qu’on appelle Regle de l’Octave; (Voyez REGLE DE L’OCTAVE.) & c’est par cette méthode que la plupart des Maîtres enseignent encore aujourd’hui l’Accompagnement.
Les Accords sont déterminés par la Regle de l’Octave, relativement au rang qu’occupent les Notes de la Basse, & à la marche qu’elles suivent dans un Ton donne. Ainsi le Ton étant connu, la Note de la Basse-continue aussi connue, le rang de cette Note dans le Ton, le rang de la Note qui la précede immédiatement, & le rang de la Note qui la suit, on ne se trompera pas beaucoup, en accompagnant [11] par la Regle de l’Octave, si le Compositeur a suivi l’Harmonie la plus simple & la plus naturelle; mais c’est ce qu’on ne doit gueres attendre de la Musique d’aujourd’hui, si ce n’est peut-être en Italie où l’Harmonie paroît se simplifier à mesure qu’elle s’altere ailleurs. De plus, le moyen d’avoir toutes ces choses incessamment présentes, & tandis que l’Accompagnateur s’en instruit, que deviennent les doigts? A peine atteint-on un Accord, qu’il s’en offre un autre, & le moment de la réflexion est précisément celui de l’exécution. Il n’y a qu’une habitude consommée de Musique, une expérience réfléchie, la facilité de lire une ligue de Musique d’un coup-d’oeil, qui puissent aider en ce moment. Encore les plus habiles se trompent-ils avec ce secours. Que de fautes échappent, durant l’exécution, à l’Accompagnateur le mieux exercé!
Attendra-t-on, même pour accompagner, que l’oreille soit formée; qu’on fache lire aisément & rapidement toute Musique; qu’on puisse débrouiller, à livre ouvert, une Partition? Mais, en fût-on là, on auroit encore besoin d’une habitude du Doigter fondée sur d’autres principes d’Accompagnement que ceux qu’on a donnés jusqu’à M.
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