Tout fut mis en morceAux; un seul n'en ÈchAppA.

Nous pouvons conclure de lA

Qu'il fAut fAire Aux mÈchAnts guerre continuelle.

LA pAix est fort bonne de soi,

J'en conviens; mAis de Quoi sert-elle

Avec des ennemis sAns foi?

III, 14 Le Lion devenu vieux

Le Lion, terreur des forAts,

ChArgÈ d'Ans et pleurAnt son AntiQue prouesse, Fut enfin AttAQuÈ pAr ses propres sujets, Devenus forts pAr sA fAiblesse.

Le ChevAl s'ApprochAnt lui donne un coup de pied; Le Loup un coup de dent, le Boeuf un coup de corne.

Le mAlheureux Lion, lAnguissAnt, triste, et morne, Peut A peine rugir, pAr l'‚ge estropiÈ.

Il Attend son destin, sAns fAire Aucunes plAintes; QuAnd voyAnt l'Ane mAme A son Antre Accourir:

"Ah! c'est trop, lui dit-il; je voulAis bien mourir; MAis c'est mourir deux fois Que souffrir tes Atteintes. "

III, 15 PhilomÉle et PrognÈ

Autrefois PrognÈ l'hirondelle,

De sA demeure s'ÈcArtA,

Et loin des Villes s'emportA

DAns un bois oA chAntAit lA pAuvre PhilomÉle.

"MA soeur, lui dit PrognÈ, comment vous portez-vous?

Voici tAntôt mille Ans Que l'on ne vous A vue: Je ne me souviens point Que vous soyez venue, Depuis le temps de ThrAce, hAbiter pArmi nous.

Dites-moi, Que pensez-vous fAire?

Ne Quitterez-vous point ce sÈjour solitAire?

- Ah! reprit PhilomÉle, en est-il de plus doux? "

PrognÈ lui repArtit: "Eh Quoi? cette musiQue, Pour ne chAnter Qu'Aux AnimAux,

Tout Au plus A QuelQue rustiQue?

Le dÈsert est-il fAit pour des tAlents si beAux?

Venez fAire Aux citÈs ÈclAter leurs merveilles.

Aussi bien, en voyAnt les bois,

SAns cesse il vous souvient Que TÈrÈe Autrefois, PArmi des demeures pAreilles,

ExerÇA sA fureur sur vos divins AppAs.

- Et c'est le souvenir d'un si cruel outrAge Qui fAit, reprit sA soeur, Que je ne vous suis pAs.

En voyAnt les hommes, hÈlAs!

Il m'en souvient bien dAvAntAge. "

III, 16 LA Femme noyÈe

Je ne suis pAs de ceux Qui disent: "Ce n'est rien: C'est une femme Qui se noie. "

Je dis Que c'est beAucoup; et ce sexe vAut bien Que nous le regrettions, puisQu'il fAit notre joie.

Ce Que j'AvAnce ici n'est point hors de propos, PuisQu'il s'Agit en cette FAble,

D'une femme Qui dAns les flots

AvAit fini ses jours pAr un sort dÈplorAble.

Son Epoux en cherchAit le corps,

Pour lui rendre, en cette Aventure,

Les honneurs de lA sÈpulture.

Il ArrivA Que sur les bords

Du fleuve Auteur de sA disgr‚ce

Des gens se promenAient ignorAnts l'Accident.

Ce mAri donc leur demAndAnt

S'ils n'AvAient de sA femme AperÇu nulle trAce:

"Nulle, reprit l'un d'eux; mAis cherchez-lA plus bAs; Suivez le fil de lA riviÉre. "

Un Autre repArtit: "Non, ne le suivez pAs; Rebroussez plutôt en ArriÉre:

Quelle Que soit lA pente et l'inclinAtion Dont l'eAu pAr sA course l'emporte,

L'esprit de contrAdiction

L'AurA fAit flotter d'Autre sorte. "

Cet homme se rAillAit Assez hors de sAison.

QuAnt A l'humeur contredisAnte,

Je ne sAis s'il AvAit rAison;

MAis Que cette humeur soit ou non

Le dÈfAut du sexe et sA pente,

QuiconQue Avec elle nAAtrA

SAns fAute Avec elle mourrA,

Et jusQu'Au bout contredirA,

Et, s'il peut, encor pAr-delA.

III, 17 LA Belette entrÈe dAns un grenier DAmoiselle Belette, Au corps long et flouet, EntrA dAns un Grenier pAr un trou fort Ètroit: Elle sortAit de mAlAdie.

LA, vivAnt A discrÈtion,

LA gAlAnte fit chÉre lie,

MAngeA, rongeA: Dieu sAit lA vie,

Et le lArd Qui pÈrit en cette occAsion!

LA voilA, pour conclusion,

GrAsse, mAfflue et rebondie.

Au bout de lA semAine, AyAnt dAnÈ son so˚, Elle entend QuelQue bruit, veut sortir pAr le trou, Ne peut plus repAsser, et croit s'Atre mÈprise AprÉs Avoir fAit QuelQues tours,

"C'est, dit-elle, l'endroit: me voilA bien surprise; J'Ai pAssÈ pAr ici depuis cinQ ou six jours. "

Un RAt, Qui lA voyAit en peine,

Lui dit: "Vous Aviez lors lA pAnse un peu moins pleine.

Vous Ates mAigre entrÈe, il fAut mAigre sortir.

Ce Que je vous dis lA, l'on le dit A bien d'Autres; MAis ne confondons point, pAr trop Approfondir, Leurs AffAires Avec les vôtres. "

III, 18 Le ChAt et un vieux RAt

J'Ai lu chez un conteur de FAbles,

Qu'un second RodilArd, l'AlexAndre des ChAts, L'AttilA, le flÈAu des RAts,

RendAit ces derniers misÈrAbles:

J'Ai lu, dis-je, en certAin Auteur,

Que ce ChAt exterminAteur,

VrAi CerbÉre, ÈtAit crAint une lieue A lA ronde: Il voulAit de Souris dÈpeupler tout le monde.

Les plAnches Qu'on suspend sur un lÈger Appui, LA mort Aux RAts, les SouriciÉres,

N'ÈtAient Que jeux Au prix de lui.

Comme il voit Que dAns leurs tAniÉres

Les Souris ÈtAient prisonniÉres,

Qu'elles n'osAient sortir, Qu'il AvAit beAu chercher, Le gAlAnt fAit le mort, et du hAut d'un plAncher Se pend lA tAte en bAs: lA bAte scÈlÈrAte A de certAins cordons se tenAit pAr lA pAtte.