Lorsqu'il voulait manger des fruits, il les cueillait directement sur l'arbre au lieu d'attendre qu'ils tombent comme auparavant. Lorsqu'il voulait de l'herbe, il l'arrachait du sol au lieu de s'agenouiller comme auparavant. Lorsque les mouches le piquaient, il brisait une branche d'arbre et s'en servait comme chasse-mouches ; et il se faisait un nouveau bonnet de boue fraîche fangeuse-spongieuse lorsque le soleil était trop chaud. Quand il en avait assez de marcher seul à travers l'Afrique, il chantait dans sa trompe et ça faisait autant de bruit que plusieurs fanfares. Il fit un détour afin de trouver un gros Hippopotame (ce n'était pas un parent) et lui administrer une terrible fessée pour s'assurer que le Serpent-Python-de-Rocher-Bicolore ne lui avait pas menti au sujet de sa nouvelle trompe. Le reste du temps, il ramassa les peaux de melon qu'il avait jetées en se rendant au fleuve Limpopo, car c'était un Pachyderme très propre. Par un soir sombre il retrouva sa chère famille ; il enroula sa trompe et dit :
— Comment allez-vous ?
Ils étaient très heureux de le revoir et ils dirent aussitôt :
— Viens ici recevoir une fessée pour ton insatiable curiosité.
— Peuh ! dit l'Enfant Éléphant. Je crois que vous ne connaissez rien à la fessée ; moi par contre, je peux vous montrer.
Sur ce, il déroula sa trompe et jeta deux de ses chers frères cul par-dessus tête.
— Oh, purée ! dirent-ils. Où as-tu appris ce coup-là et qu'as-tu fait à ton nez ?
— Le Crocodile qui vit sur les rives du grand Fleuve Limpopo aux grasses eaux vert-de-grisées et huileuses m'en a donné un nouveau, dit l'Enfant Éléphant. Je lui ai demandé ce qu'il mangeait au dîner et j'ai reçu ça en souvenir.
— Ce n'est pas beau, dit son oncle poilu, le Babouin.
— Oui, c'est vrai, dit l'Enfant Éléphant, mais c'est bien commode.
Et, saisissant son oncle poilu, le Babouin, par une patte poilue, il l'envoya dans un nid de frelons. Puis ce méchant Enfant Éléphant se mit à fesser toute sa chère famille pendant un long moment, jusqu'à ce qu'ils fussent très échauffés et fort étonnés. Il arracha à sa grande tante l'Autruche les plumes de sa queue ; et il attrapa sa grande tante la Girafe par les pattes de derrière et la traîna dans un buisson d'épines ; il cria après son gros oncle l'Hippopotame et lui souffla des bulles dans les oreilles pendant que celui-ci faisait la sieste dans l'eau après manger ; mais il ne laissa personne toucher à l'Oiseau Kolokolo. À la fin, ça chauffait tellement que tous les membres de sa chère famille se précipitèrent, un par un, vers les rives du grand Fleuve Limpopo aux grasses eaux vert-de-grisées et huileuses, et bordé d'arbres à fièvre, pour emprunter au Crocodile de nouveaux nez. Quand ils revinrent, personne ne fessa plus personne ; et depuis ce jour, ô ma Mieux-Aimée, tous les Éléphants que tu verras, et tous ceux que tu ne verras pas, ont des trompes exactement semblables à la trompe de l'insatiable Enfant Éléphant.
À mon service j'ai mis
Six bons garçons.
Voici leurs noms :
Quoi, Pourquoi, Quand,
Où, Qui, Comment.
C'est d'eux que j'ai tout appris.
De l'orient
Jusqu'au couchant
Je les envoie par monts, par vaux
Mais quand s'achèvent leurs travaux,
À tous je propose
Une bonne pause.
Aux heures où d'usage
Je suis à l'ouvrage,
Je leur donne un long répit,
Et je n'oublie pas
Le temps des repas,
Car ils ont grand appétit
Mais autres gens, autres manières :
Je connais une personne
Jeune et mignonne
Qui emploie bien dix millions
De bons garçons
Et qui jamais ne leur laisse
Repos ni cesse.
À peine ouvertes ses paupières,
Au loin, pour traiter ses affaires,
Elle envoie, très urgemment,
Un bon million de Comment
À peu près deux millions d'Où,
Et surtout…
Sept millions de Pourquoi !
6. La rengaine du père Kangourou
(The Sing-Song of Old Man Kangaroo)
Le Kangourou ne fut pas toujours tel que nous le connaissons aujourd'hui ; c'était autrefois un Animal Différent avec quatre courtes pattes. Il était gris, laineux et d'un orgueil démesuré ; il dansait sur une crête au milieu de l'Australie et il alla trouver le Petit Dieu Nqa. Il alla trouver Nqa à six heures du matin avant le petit déjeuner en disant :
— Rends-moi différent de tous les autres animaux d'ici cinq heures cet après-midi.
D'un bond, se leva Nqa de son siège sur l'étendue de sable et s'écria :
— Va-t'en !
Le Kangourou était gris, laineux et d'un orgueil démesuré ; il dansait sur une arête rocheuse au milieu de l'Australie, et il alla trouver le Moyen Dieu Nquing. Il alla trouver Nquing à huit heures du matin après le petit déjeuner en disant :
— Rends-moi différent de tous les autres animaux et rends-moi aussi prodigieusement populaire d'ici cinq heures cet après-midi.
D'un bond, se leva Nquing de son terrier parmi les spinifex et s'écria :
— Va-t'en !
Le Kangourou était gris, laineux et d'un orgueil démesuré ; il dansait sur un banc de sable au milieu de l'Australie et il alla trouver le Grand Dieu Nqong. Il alla trouver Nqong à dix heures du matin avant le déjeuner en disant :
— Rends-moi différent de tous les autres animaux ; rends-moi prodigieusement populaire et couru d'ici cinq heures cet après-midi.
Nqong sauta hors de son bain dans le marais salant et s'écria :
— Compte sur moi !
Nqong appela Dingo, Dingo Chien-Jaune, toujours affamé, couleur de poussière au soleil. Il lui désigna Kangourou et dit :
— Dingo ! Réveille-toi, Dingo ! Tu vois ce Monsieur qui danse sur la fosse aux cendres ? Il veut être populaire et qu'on lui coure après. À toi de jouer, Dingo !
Dingo sauta en l'air, Dingo Chien-Jaune, et il dit :
— Quoi ? Cette espèce de chat-lapin ?
Aussitôt Dingo s'élança, Dingo Chien-Jaune, toujours affamé souriant comme un seau à charbon, il se mit à courir après Kangourou. Aussitôt s'élança le fier Kangourou sur ses quatre courtes pattes comme un petit lapin. Et voilà, ô ma Mieux-Aimée, comment s'achève la première partie de ce récit.
Il courut à travers le désert, il courut à travers les montagnes, il courut à travers les marais salants, il courut à travers les roseaux, il courut à travers les eucalyptus, il courut à travers les spinifex, il courut au point d'avoir mal aux pattes de devant. Il n'avait pas le choix !
Dingo courait toujours, Dingo Chien-Jaune, toujours affamé souriant comme un piège à rat, sans gagner ni perdre du terrain, il courait après Kangourou. Il n'avait pas le choix !
Kangourou courait toujours, le Père Kangourou. Il courut à travers les cordylines, il courut dans l'herbe haute, il courut dans l'herbe rase, il courut par-dessus les tropiques du Capricorne et du Cancer ; il courut au point d'avoir mal aux pattes de derrière. Il n'avait pas le choix !
Dingo courait toujours, Dingo Chien-Jaune, de plus en plus affamé, souriant comme un collier de cheval sans gagner ni perdre du terrain ; et ils atteignirent la rivière Wollgong. Mais il n'y avait pas de pont et il n'y avait pas de bac et Kangourou ne savait pas comment traverser, alors il se dressa sur ses pattes de derrière et sauta. Il n'avait pas le choix !
Il sauta à travers les hautes herbes de la Savane ; il sauta à travers les cailloux du Plateau, il sauta à travers les déserts au milieu de l'Australie. Il sauta comme un Kangourou.
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