Le livre de la loi
Introduction au Liber AL vel Legis et
avertissement des traducteurs (Introduction au Livre de la Loi in Équinoxe Vol.
I No. 3) Fais ce que tu veux sera le tout de la Loi. (I. 40.)
Plusieurs traductions
françaises du Livre de la Loi ont déjà vu le jour en France ou au Canada ;
il est probable que celle-ci ait bel et bien une place à part : outre les
moyens mis en œuvre pour son élaboration, c’est le but qu’elle se propose d’atteindre
qui devrait asseoir son autorité. En effet, le Livre de la Loi, techniquement
appelé Liber AL vel Legis, Sub Figura XXXI ou CCXX selon qu’il s’agisse du
manuscrit ou de son édition corrigée par son scribe Aleister Crowley (1875-1947),
est le premier, et le plus important des écrits reçus entre 1904 et 1911 et qu’il
qualifiera de sacrés : il est alors nécessaire pour en faire la traduction,
outre avoir les qualifications requises pour ce qui est de la langue et du
domaine concerné, de respecter les règles afférentes à cette catégorie délicate
d’écrits, sans parler des exigences spécifiques au texte lui-même, exigences
que nous aborderons plus loin. Il est peut-être d’abord utile de décrire les
circonstances entourant la révélation du livre.
Ce n’est pas notre propos
ici de présenter son auteur, ou plutôt, et selon lui, son scribe : Aleister
Crowley, le mage-poète-montagnard anglais sans lequel la magie ne serait
désormais guère plus qu’une branche de l’occultisme. On pourra trouver les
détails de sa vie et de sa pensée dans les ouvrages cités dans la bibliographie
ci-après. Il suffira de rappeler que la Grande Bête 666 se trouvait, en ce
printemps 1904, au Caire en voyage de noces, ce qui ne l’empêchait pas d’entretenir,
par une discipline spirituelle que peu de magiciens ont la volonté d’observer, un
athlétique Corps de Lumière (la sphère de sensations).
"Ils t’attendent"
avait déclaré Ouarda (Ouarda signifiant Rose en arabe, prénom de l’épouse de
Crowley) à propos du dieu Horus, également nommé Râ-Hoor-Khuit. En effet, bien
qu’ignorant tout de l’Egypte ancienne, la compagne du futur prophète reconnut
au musée Boulak une stèle de bois peint datant de la XXVI dynastie représentant
Horus et immatriculée du nombre auquel Crowley était associé depuis son enfance :
666. Après avoir fait traduire le texte de la stèle, Crowley élaborera un rituel
d’évocation à Horus et célèbrera l’équinoxe comme il avait coutume de le faire,
c’est à dire selon l’enseignement de la Golden Dawn. Ce travail culminera avec
trois séances, les 8, 9 et 10 Avril de midi à une heure, au cours desquelles
une voix dicta distinctement à Crowley, et en présence de Rose, chacun des
trois chapitres du Livre de la Loi.
LE LIVRE DE LA LOI
Le livre se présente comme
une théophanie de Nuit (chapitre 1), Hadit (chapitre 2) et Râ-Hoor-Khuit (chapitre
3). A l’image d’autres livres saints, il contient une loi, un symbolisme
tendant à la ritualisation, des énigmes et, le fait est notable, l’interdiction
sans appel de le commenter et même de l’étudier ! La première lecture
finie, il ne nous restera plus qu’à détruire le volume ou faire des efforts d’imagination
pour l’aborder différemment… Nous ne nous engagerons donc pas sur ce chemin et
nous nous bornerons à dire que Crowley mit quelque temps à accepter le contenu
de la révélation, laquelle d’ailleurs ne laisse personne indifférent. Il
reconnaîtra tout de même bientôt la loi de Thélème (" Le mot de la Loi est
Thélèma " (I. 39.) ; Thélèma signifiant volonté en grec - le grec et
sa numérologie sont l’une des clés du livre) comme la clé absolue de la
nouvelle ère, autrement nommée dans le langage gnostique de Crowley : le
nouvel Æon, l’Æon d’Horus, l’enfant couronné et conquérant, seigneur du nouvel
Æon. Celui-ci supplante alors l’Æon d’Osiris, le dieu agonisant, ayant lui-même
succédé à celui d’Isis ; chaque Æon couvrant une période d’environ deux
mille ans.
LA TRADUCTION
"Vois ! Ceci est
révélé par Aiwass le ministre de Hoor-Paar-Kraat" (I. 7.). Crowley s’est
longtemps demandé si Aiwass était son propre ange gardien ou s’il s’agissait d’une
entité distincte de son être (il finira par trancher en faveur de la première
solution) ; toujours est-il que le scribe n’est autre que la réincarnation
du prêtre égyptien Ankh-af-na-Khonsu -"Mon scribe Ankh-af-na-Khonsu… "
(I. 36.) que l’on voit sur la stèle converser avec le dieu. Ces précisions sont
importantes pour comprendre le langage employé, et l’anglais semble parfois
teinté de quelque chose comme de l’égyptien ancien… "Ce livre sera traduit
dans toutes les langues : mais toujours avec l’original dans l’écriture de
la bête… " (III. 47.). Vous trouverez donc le manuscrit en regard de la
traduction. A propos de la langue, comme nous le faisions remarquer plus haut, l’anglais
employé dans ce texte comporte un certain nombre d’originalités que Crowley
considérait à l’époque comme des fautes de style, voire de grammaire (n’allez
pourtant pas croire que c’est ici que se trouve la raison profonde de l’attribution
de la paternité de l’ouvrage au ministre de Hoor-Paar-Kraat par le poète de
Cambridge…). Ces bizarreries ont évidemment été entièrement reproduites, sans
volonté de corriger un texte qu’Hymaneus Beta, Fr. Sup. de l’Ordo Templi
Orientis regrette, sur le ton de la plaisanterie, qu’il n’ait encore été
traduit en anglais… Il nous semble de toute façon évident qu’un texte sacré
comporte plusieurs niveaux qui le rendent intraduisible ; notre travail n’est
alors qu’une facilité d’accès à l’original. Un problème de traduction s’est
posé qui doit être soulevé : le texte est adressé personnellement par
Aiwass à son scribe et possède néanmoins par endroits un caractère universel :
la seconde personne, unique en anglais, a donc été rendue soit au singulier, soit
au pluriel selon les cas. Il appartient au lecteur de reprendre le texte s’il
le désire, à l’aide du manuscrit en regard. LIBER CCXX VS LIBER XXXI Le Livre
de la Loi a deux formes : le manuscrit porte le numéro 31 ("Sub
Figura XXXI") tandis que le texte modifié par son scribe (qui ajoutera la
numérotation des versets du premier chapitre et modifiera la ponctuation) porte
le numéro 220 ("S. F. CCXX"), correspondant au nombre de ses versets.
Nous avons souhaité la clarté du Liber 220 avec un accès aisé au 31, au cas où
le lecteur outrepasserait l’interdiction d’étude… Cette édition a été préparée
par Philippe Pissier, Matthieu Léon, Elise Ghiringhelli, RasPaul Universalis et
Sr.
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