McG.

The following translations by James McGowan have been published previously (some in slightly different form or with different titles) in 66 Translations from Charles Baudelaire’s Les Fleurs Du Mal’ (Peoria, Illinois: Spoon River Poetry Press, 1985):

To the Reader, The Albatross, Elevation, Correspondences, The Sick Muse, The Venal Muse, The Enemy, A Former Life, Man and the Sea, Don Juan in Hell, Beauty, The Giantess, Hymn to Beauty, Head of Hair, ‘You’d entertain the universe…’, A Carcass, De profundis clamavi, Lethe, Remorse after Death, Duellum, The Balcony, A Phantom, ‘I give to you these verses…’, The Flask, The Cat, Invitation to the Voyage, Conversation, Autumn Song, For a Creole Lady, Sorrows of the Moon, Cats, A Fantastical Engraving, The Cracked Bell, Spleen (I), Spleen (II), Spleen (III), Spleen (IV), Landscape, The Swan, The Seven Old Men, The Little Old Women, Dusk, The Love of Illusion, ‘I have not forgotten…’, Mists and Rains, Dawn, The Solitary’s Wine, Destruction, Lesbos, Condemned Women: Delphine and Hippolyta, Condemned Women, The Two Good Sisters, The Fountain of Blood, Allegory, A Beatrice, The Metamorphoses of the Vampire, A Voyage to Cythera, St Peter’s Denial, The Death of Lovers, The Death of the Poor, The Death of Artists, Voyaging, The Fountain, The Voice, Lament of an Icarus, Meditation.

Journals that have published James McGowan’s translations from the Flowers are:

Hiram Poetry Review. ‘A Former Life’, ‘Harmony of the Evening’, ‘Spleen I and II’, ‘The Blind’.

Nebo: ‘Congenial Horror’, ‘Very Far from France’.

Northeast: ‘Sorrows of the Moon’.

Pikestaff Forum: ‘To the Reader’, ‘The Enemy’, ‘The Cracked Bell’, ‘The Metamorphoses of the Vampire’, A Voyage to Cythera’, ‘St Peter’s Denial’, ‘The Death of Lovers’.

Poetry Miscellany: ‘The Taste for Nothingness’, ‘A Face Makes Promises’.

Spoon River Quarterly: ‘Music’, ‘The Jewels’.

Southern Humanities Review: ‘For a Creole Lady’.

Translation: ‘Dusk’.

THE FLOWERS OF EVIL

AU POËTE IMPECCABLE

Au Parfait Magicien ès Lettres Françaises

A Mon Très-cher et Très-Vénéré

MAÎTRE ET AMI

Théophile Gautier

Avec Les Sentiments

De La Plus Profonde Humilité

Je Dédie

Ces Fleurs Maladives

C.B.

TO THE IMPECCABLE POET

To The Perfect Magician of French Letters

To My Dearest and Most Admired

MASTER AND FRIEND

Théophile Gautier*

With Feelings

Of The Most Profound Humility

I Dedicate

These Sickly Flowers

C.B.

Au lecteur

La sottise, l’erreur, le péché, la lésine,

Occupent nos esprits et travaillent nos corps,

Et nous alimentons nos aimables remords,

Comme les mendiants nourrissent leur vermine.

Nos péchés sont têtus, nos repentirs sont lâches;

Nous nous faisons payer grassement nos aveux,

Et nous rentrons gaiement dans le chemin bourbeux,

Croyant par de vils pleurs laver toutes nos taches.

Sur l’oreiller du mal c’est Satan Trismégiste

Qui berce longuement notre esprit enchanté,

Et le riche métal de notre volonté

Est tout vaporisé par ce savant chimiste.

C’est le Diable qui tient les fils qui nous remuent!

Aux objets répugnants nous trouvons des appas;

Chaque jour vers l’Enfer nous descendons d’un pas,

Sans horreur, à travers des ténèbres qui puent.

Ainsi qu’un débauché pauvre qui baise et mange

Le sein martyrisé d’une antique catin,

Nous volons au passage un plaisir clandestin

Que nous pressons bien fort comme une vieille orange.

Serré, fourmillant, comme un million d’helminthes,

Dans nos cerveaux ribote un peuple de Démons,

Et, quand nous respirons, la Mort dans nos poumons

Descend, fleuve invisible, avec de sourdes plaintes.

Si le viol, le poison, le poignard, l’incendie,

N’ont pas cncor brodé de leurs plaisants dessins

Le canevas banal de nos piteux destins,

C’est que notre âme, hélas! n’est pas assez hardie.

To the Reader

Folly and error, stinginess and sin

Possess our spirits and fatigue our flesh.

And like a pet we feed our tame remorse

As beggars take to nourishing their lice.

Our sins are stubborn, our contrition lax;

We offer lavishly our vows of faith

And turn back gladly to the path of filth,

Thinking mean tears will wash away our stains.

On evil’s pillow lies the alchemist

Satan Thrice-Great,* who lulls our captive soul,

And all the richest metal of our will

Is vaporized by his hermetic arts.

Truly the Devil pulls on all our strings!

In most repugnant objects we find charms;

Each day we’re one step further into Hell,

Content to move across the stinking pit.

As a poor libertine will suck and kiss

The sad, tormented tit of some old whore,

We steal a furtive pleasure as we pass,

A shrivelled orange that we squeeze and press.

Close, swarming, like a million writhing worms,

A demon nation riots in our brains,

And, when we breathe, death flows into our lungs,

A secret stream of dull, lamenting cries.

If slaughter, or if arson, poison, rape

Have not as yet adorned our fine designs,

The banal canvas of our woeful fates,

It’s only that our spirit lacks the nerve.

Mais parmi les chacals, les panthères, les lices,

Les singes, les scorpions, les vautours, les serpents,

Les monstres glapissants, hurlants, grognants, rampants,

Dans la ménagerie infâme de nos vices,

Il en est un plus laid, plus méchant, plus immonde!

Quoiqu’il ne pousse ni grands gestes ni grands cris,

Il ferait volontiers de la terre un débris

Et dans un bâillement avalerait le monde;

C’est l’Ennui! —l’œil chargé d’un pleur involontaire,

Il rêve d’échafauds en fumant son houka.

Tu le connais, lecteur, ce monstre délicat,

—Hypocrite lecteur,—mon semblable, — mon frère!

But there with all the jackals, panthers, hounds,

The monkeys, scorpions, the vultures, snakes,

Those howling, yelping, grunting, crawling brutes,

The infamous menagerie of vice,

One creature only is most foul and false!

Though making no grand gestures, nor great cries,

He willingly would devastate the earth

And in one yawning swallow all the world;

He is Ennui!*—with tear-filled eye he dreams

Of scaffolds, as he puffs his water-pipe.

Reader, you know this dainty monster too;

—Hypocrite reader,—fellowman,—my twin!

Spleen et idéal

Spleen and the Ideal

1. Bénédiction

Lorsque, par un décret des puissances suprêmes,

Le Poëte apparaît en ce monde ennuyé,

Sa mère épouvantée et pleine de blasphèmes

Crispe ses poings vers Dieu, qui la prend en pitié:

—‘Ah! que n’ai-je mis bas tout un nœud de vipères,

Plutôt que de nourrir cette dérision!

Maudite soit la nuit aux plaisirs éphémères

Où mon ventre a conçu mon expiation!

Puisque tu m’as choisie entre toutes les femmes

Pour être le dégoût de mon triste mari,

Et que je ne puis pas rejeter dans les flammes,

Comme un billet d’amour, ce monstre rabougri,

Je ferai rejaillir ta haine qui m’accable

Sur l’instrument maudit de tes méchancetés,

Et je tordrai si bien cet arbre misérable,

Qu’il ne pourra pousser ses boutons empestés!’

Elle ravale ainsi l’écume de sa haine,

Et, ne comprenant pas les desseins éternels,

Elle-même prépare au fond de la Géhenne

Les bûchers consacrés aux crimes maternels.

Pourtant, sous la tutelle invisible d’un Ange,

L’Enfant déshérité s’enivre de soleil,

Et dans tout ce qu’il boit et dans tout qu’il mange

Retrouve l’ambroisie et le nectar vermeil.

Il joue avec le vent, cause avec le nuage,

Et s’enivre en chantant du chemin de la croix;

Et l’Esprit qui le suit dans son pèlerinage

Pleure de le voir gai comme un oiseau des bois.

1. Benediction

When, by an edict of the powers supreme,

The Poet in this bored world comes to be,

His daunted mother, eager to blaspheme,

Rages to God, who looks down piteously:

—‘Rather than have this mockery to nurse

Why not a nest of snakes for me to bear!

And may that night of fleeting lust be cursed,

When I conceived my penance,* unaware!

Since from all women you chose me to shame,

To be disgusting to my grieving spouse,

And since I can’t just drop into the flames

Like an old love-note, this misshapen mouse,

I’ll turn your hate that overburdens me

Toward the damned agent of your spiteful doom,

And I will twist this miserable tree

So its infected buds will never bloom!’

She swallows thus her hatred’s foaming spit

And, never grasping the divine design,

She makes herself within Gehenna’s* pit

The pyre suited to a mother’s crimes.

Still, with an angel guarding secretly,

The misfit child grows drunk on sunny air;

In all he drinks or eats in ecstasy

He finds sweet nectar and ambrosia there.

Free as a bird, he plays with clouds and wind,

Sings of the Passion with enraptured joy;

Tending his pilgrimage, his Guardian

Must weep to see the gladness of the boy.

Tous ceux qu’il veut aimer l’observent avec crainte,

Ou bien, s’enhardissant de sa tranquillité,

Cherchent à qui saura lui tirer une plainte,

Et font sur lui l’essai de leur férocité.

Dans le pain et le vin destinés à sa bouche

Ils mêlent de la cendre avec d’impurs crachats;

Avec hypocrisie ils jettent ce qu’il touche,

Et s’accusent d’avoir mis leurs pieds dans ses pas.

Sa femme va criant sur les places publiques:

‘Puisqu’il me trouve assez belle pour m’adorer,

Je ferai le métier des idoles antiques,

Et comme elles je veux me faire redorer;

Et je me soûlerai de nard, d’encens, de myrrhe,

De génuflexions, de viandes et de vins,

Pour savoir si je puis dans un cœur qui m’admire

Usurper en riant les hommages divins!

Et, quand je m’ennuierai de ces farces impies,

Je poserai sur lui ma frêle et forte main;

Et mes ongles, pareils aux ongles des harpies,

Sauront jusqu’à son cœur se frayer un chemin.

Comme un tout jeune oiseau qui tremble et qui palpite,

J’arracherai ce cœur tout rouge de son sein,

Et, pour rassasier ma bête favorite,

Je le lui jetterai par terre avec dédain!’

Vers le Ciel, où son œil voit un trône splendide,

Le Poëte serein lève ses bras pieux,

Et les vastes éclairs de son esprit lucide

Lui dérobent l’aspect des peuples furieux:

—‘Soyez béni, mon Dieu, qui donnez la souffrance

Comme un divin remède à nos impuretés

Et comme la meilleure et la plus pure essence

Qui prépare les forts aux saintes voluptés!

Those he would love watch him with jaundiced eye,

Or, growing bold with his tranquillity,

Look for a certain way to make him cry,

Testing on him their own ferocity.

In bread and wine intended for his mouth

They muddle filthy spit with dirt and ash;

Hypocrites, all that he touches they throw out,

And blame their feet for walking in his path.

His woman cries to all the countryside:

‘Since he has found me worthy to adore

I’ll let the heathen idols be my guide

And gild myself, as they have done before;

I’ll sate myself with incense, myrrh, and nard,

With genuflections, meats and wines galore,

To prove I can in that admiring heart

Laughingly claim the homage due the Lord!

I’ll set on him my frail, determined hand

When I am bored with this blasphemous farce;

My fingernails, like harpies’ talons,* can

Claw out a bloody pathway to his heart.

I’ll dig the bright red heart out of his breast,

A pitiful and trembling baby bird;

To satisfy the dog I like the best

I’ll toss it to him, with a scornful word!’

Toward Heaven, where he sees a throne of gold,

The Poet lifts his arms in piety,

And brilliant flashes from his lucid soul

Block from his sight the people’s cruelty:

—‘Be praised, my God, who gives us suffering

As remedy for our impurities,

And as the best and purest nurturing

To fit the strong for holy ecstasies!

Je sais que vous gardez une place au Poëte

Dans les rangs bienheureux des saintes Légions,

Et que vous l’invitez à l’éternelle fête

Des Trônes, des Vertus, des Dominations.

Je sais que la douleur est la noblesse unique

Où ne mordront jamais la terre et les enfers,

Et qu’il faut pour tresser ma couronne mystique

Imposer tous les temps et tous les univers.

Mais les bijoux perdus de l’antique Palmyre,

Les métaux inconnus, les perles de la mer,

Par votre main montés, ne pourraient pas suffire

A ce beau diadème éblouissant et clair;

Car il ne sera fait que de pure lumière,

Puisée au foyer saint des rayons primitifs,

Et dont les yeux mortels, dans leur splendeur entière,

Ne sont que des miroirs obscurcis et plaintifs!’

2. L’Albatros

Souvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage

Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,

Qui suivent, indolents compagnons de voyage,

Le navire glissant sur les gouffres amers.

A peine les ont-ils déposés sur les planches,

Que ces rois de l’azur, maladroits et honteux,

Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches

Comme des avirons traîner à côté d’eux.

Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule!

Lui, naguère si beau, qu’il est comique et laid!

L’un agace son bec avec un brûle-gueule,

L’autre mime, en boitant, l’infirme qui volait!

I know in Heaven there’s a place for me

Kept for the poet in celestial zones,

And that I’ll feast throughout eternity With Virtues,

Powers, Dominations, Thrones.*

Man’s sorrow is a nobleness, I trust,

Untouchable by either earth or hell;

I know to weave my mystic crown I must

Tax all the times, the universe as well.

But treasure lost from old Palmyra’s wealth,*

The unknown metals, pearls out of the sea,

Can’t equal, though you mounted them yourself,

This diadem of dazzling clarity,

Since it is perfect luminosity,

Drawn from the holy hearth of primal rays,

Of which men’s eyes, for all their majesty,

Are only mournful mirrors, dark and crazed!’

2. The Albatross

Often, when bored, the sailors of the crew

Trap albatross, the great birds of the seas,

Mild travellers escorting in the blue

Ships gliding on the ocean’s mysteries.

And when the sailors have them on the planks,

Hurt and distraught, these kings of all outdoors

Piteously let trail along their flanks

Their great white wings, dragging like useless oars.

This voyager, how comical and weak!

Once handsome, how unseemly and inept!

One sailor pokes a pipe into his beak,

Another mocks the flier’s hobbled step.

Le Poëte est semblable au prince des nuées

Qui hante la tempête et se rit de l’archer;

Exilé sur le sol au milieu des huées,

Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.

3. Élévation

Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,

Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,

Par delà le soleil, par delà les éthers,

Par delà les confins des sphères étoilées,

Mon esprit, tu te meus avec agilité,

Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l’onde,

Tu sillonnes gaiement l’immensité profonde

Avec une indicible et mâle volupté.

Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides;

Va te purifier dans l’air supérieur,

Et bois, comme une pure et divine liqueur,

Le feu clair qui remplit les espaces limpides.

Derrière les ennuis et les vastes chagrins

Qui chargent de leur poids l’existence brumeuse,

Heureux celui qui peut d’une aile vigoureuse

S’élancer vers les champs lumineux et sereins;

Celui dont les pensers, comme des alouettes,

Vers les cieux le matin prennent un libre essor,

—Qui plane sur la vie, et comprend sans effort

Le langage des fleurs et des choses muettes!

The Poet is a kinsman in the clouds

Who scoffs at archers, loves a stormy day;

But on the ground, among the hooting crowds,

He cannot walk, his wings are in the way.*

3. Elevation

Above the valleys, over rills and meres,

Above the mountains, woods, the oceans, clouds,

Beyond the sun, past all ethereal bounds,

Beyond the borders of the starry spheres,

My agile spirit, how you take your flight!

Like a strong swimmer swooning on the sea

You gaily plough the vast immensity

With manly, inexpressible delight.

Fly far above this morbid, vaporous place;

Go cleanse yourself in higher, finer air,

And drink up, like a pure, divine liqueur,

Bright fire, out of clear and limpid space.

Beyond ennui, past troubles and ordeals

That load our dim existence with their weight,

Happy the strong-winged man, who makes the great

Leap upward to the bright and peaceful fields!

The man whose thoughts, like larks, take to their wings

Each morning, freely speeding through the air,

—Who soars above this life, interpreter

Of flowers’ speech, the voice of silent things!

4. Correspondances

La Nature est un temple où de vivants piliers

Laissent parfois sortir de confuses paroles;

L’homme y passe à travers des forêts de symboles

Qui l’observent avec des regards familiers.

Comme de longs échos qui de loin se confondent

Dans une ténébreuse et profonde unité,

Vaste comme la nuit et comme la clarté,

Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.

Il est des parfums frais comme des chairs d’enfants,

Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,

—Et d’autres, corrompus, riches et triomphants,

Ayant l’expansion des choses infinies,

Comme l’ambre, le musc, le benjoin et l’encens,

Qui chantent les transports de l’esprit et des sens.

5. ‘J’aime le souvenir …’

J’aime le souvenir de ces époques nues,

Dont Phœbus se plaisait à dorer les statues.

Alors l’homme et la femme en leur agilité

Jouissaient sans mensonge et sans anxiété,

Et, le ciel amoureux leur caressant l’échine,

Exerçaient la santé de leur noble machine.

Cybèle alors, fertile en produits généreux,

Ne trouvait point ses fils un poids trop onéreux,

Mais, louve au cœur gonflé de tendresses communes,

Abreuvait l’univers à ses tetines brunes.

L’homme, élégant, robuste et fort, avait le droit

D’être fier des beautés qui le nommaient leur roi;

Fruits purs de tout outrage et vierges de gerçures,

Dont la chair lisse et ferme appelait les morsures!

4. Correspondences

Nature is a temple, where the living

Columns sometimes breathe confusing speech;

Man walks within these groves of symbols, each

Of which regards him as a kindred thing.

As the long echoes, shadowy, profound,

Heard from afar, blend in a unity,

Vast as the night, as sunlight’s clarity,

So perfumes, colours, sounds may correspond.

Odours there are, fresh as a baby’s skin,

Mellow as oboes, green as meadow grass,*

—Others corrupted, rich, triumphant, full,

Having dimensions infinitely vast,

Frankincense, musk, ambergris, benjamin,

Singing the senses’ rapture, and the soul’s.

5. ‘I love the thought…’

I love the thought of ancient, naked days

When Phoebus* gilded statues with his rays.

Then women, men in their agility

Played without guile, without anxiety,

And, while the sky stroked lovingly their skin,

They tuned to health their excellent machine.

Cybele,* in offering her bounty there,

Found mortals not a heavy weight to bear,

But, she-wolf full of common tenderness,

From her brown nipples fed the universe.*

Man had the right, robust and flourishing,

Of pride in beauties who proclaimed him king;

Pure fruit unsullied, lovely to the sight,

Whose smooth, firm flesh went asking for the bite!

Le Poëte aujourd’hui, quand il veut concevoir

Ces natives grandeurs, aux lieux où se font voir

La nudité de l’homme et celle de la femme,

Sent un froid ténébreux envelopper son âme

Devant ce noir tableau plein d’épouvantement.

Ô monstruosités pleurant leur vêtement!

Ô ridicules troncs! torses dignes des masques!

Ô pauvres corps tordus, maigres, ventrus ou flasques,

Que le dieu de l’Utile, implacable et serein,

Enfants, emmaillota dans ses langes d’airain!

Et vous, femmes, hélas! pâles comme des cierges,

Que ronge et que nourrit la débauche, et vous, vierges,

Du vice maternel traînant l’hérédité

Et toutes les hideurs de la fécondité!

Nous avons, il est vrai, nations corrumpues,

Aux peuples anciens des beautés inconnues:

Des visages rongés par les chancres du cœur,

Et comme qui dirait des beautés de langueur;

Mais ces inventions de nos muses tardives

N’empêcheront jamais les races maladives

De rendre à la jeunesse un hommage profond,

—A la sainte jeunesse, à l’air simple, au doux front,

A l’œil limpide et clair ainsi qu’une eau courante,

Et qui va répandant sur tout, insouciante

Comme l’azur du ciel, les oiseaux et les fleurs,

Ses parfums, ses chansons et ses douces chaleurs!

6. Les Phares

Rubens, fleuve d’oubli, jardin de la paresse,

Oreiller de chair fraîche où l’on ne peut aimer,

Mais où la vie afflue et s’agite sans cesse,

Comme l’air dans le ciel et la mer dans la mer;

Today, the Poet, when he would conceive

These native grandeurs, where can now be seen

Women and men in all their nakedness,

Feels in his soul a chill of hopelessness

Before this terrible and bleak tableau.

Monstrosities that cry out to be clothed!

Bodies grotesque and only fit for masques!

Poor twisted trunks, scrawny or gone to flab,

Whose god, implacable Utility,*

In brazen wraps, swaddles his progeny!

And pale as tapers, all you women too

Corruption gnaws and nourishes, and you

O virgins, heir to all maternal vice

And all the squalor of the fecund life!

It’s true, we have in our corrupted states

Beauties unknown to ancient people’s tastes:

Visages gnawed by sores of syphilis,

And one might say, beauties of listlessness;

But these inventions of our tardy muse

Never avert the sickly modern crew

From rendering to youth their deepest bow,

—To holy youth, to smooth, untroubled brow,

To limpid eye, to air of innocence,

Who pours out on us all, indifferent

As flowers, birds, the blue of sky or sea,

His perfumes, songs, his sweet vitality!

6. The Beacons

Rubens,* garden of sloth, stream of oblivion,

Pillow of blooming flesh where no one can make love,

But where life’s spirit flows and tosses ceaselessly,

As wind does in the sky, or seas within the sea;

Léonard de Vinci, miroir profond et sombre,

Où des anges charmants, avec un doux souris

Tout chargé de mystère, apparaissent à l’ombre

Des glaciers et des pins qui ferment leur pays;

Rembrandt, triste hôpital tout rempli de murmures,

Et d’un grand crucifix décoré seulement,

Où la prière en pleurs s’exhale des ordures,

Et d’un rayon d’hiver traversé brusquement;

Michel-Ange, lieu vague où l’on voit des Hercules

Se mêler à des Christs, et se lever tout droits

Des fantômes puissants qui dans les crépuscules

Déchirent leur suaire en étirant leurs doigts;

Colères de boxeur, impudences de faune,

Toi qui sus ramasser la beauté des goujats,

Grand cœur gonflé d’orgueil, homme débile et jaune,

Puget, mélancolique empereur des forçats;

Watteau, ce carnaval où bien des cœurs illustres,

Comme des papillons, errent en flamboyant,

Décors frais et légers éclairés par des lustres

Qui versent la folie à ce bal tournoyant;

Goya, cauchemar plein de choses inconnues,

De fœtus qu’on fait cuire au milieu des sabbats,

De vieilles au miroir et d’enfants toutes nues,

Pour tenter les démons ajustant bien leurs bas;

Delacroix, lac de sang hanté des mauvais anges,

Ombragé par un bois de sapins toujours vert,

Où, sous un ciel chagrin, des fanfares étranges

Passent, comme un soupir étouffé de Weber;

Ces malédictions, ces blasphèmes, ces plaintes,

Ces extases, ces cris, ces pleurs, ces Te Deum,

Sont un écho redit par mille labyrinthes;

C’est pour les cœurs mortels un divin opium!

Leonardo,* a mirror, sombre and profound,

Where charming angels with ingratiating smiles

Burdened with mystery, are seen within the shades

Of glaciers and of pines that border the terrain;

Rembrandt,* sad hospital full of strange whispering,

The one adornment there, a giant crucifix,

Where prayer is full of tears, and rises from the filth—

Abrupt across the room, a ray of winter sun;

And Michelangelo, vague place where Hercules

Mingles with forms of Christ,* and rising very straight

Above are mighty ghosts, which in the dusky light

Will stretch their fingers out, and tear their winding-sheets;

Rage of the boxing-ring, impudence of a faun,

You who could call to beauty vassals in the camp,

Great heart puffed up with pride, feeble and jaundiced man,

Puget,* sad and forlorn, the convicts’ emperor;

Watteau,* this carnival, where many famous hearts

Wander about like bright, flamboyant butterflies,

Decor is cool and light under the chandeliers

That pour down madness on this ever-circling dance;

Goya,* a nightmare full of things unspeakable,

Of foetuses one cooks for midnight revellers,

Old women at the mirror, children fully nude,

Dressing to tempt the devils, very carefully;

Delacroix,* lake of blood, the evil angels’ haunts,

Shaded within a wood of fir-trees always green;

Under a gloomy sky, strange fanfares pass away

And disappear, like one of Weber’s* smothered sighs;

These curses, blasphemies, these maledictions, groans

These ecstasies, these pleas, cries of Te Deum* tears

Echo respoken by a thousand labyrinths,—

An opium divine for hungry mortals’ hearts!

C’est un cri répété par mille sentinelles,

Un ordre renvoyé par mille porte-voix;

C’est un phare allumé sur mille citadelles,

Un appel de chasseurs perdus dans les grands bois!

Car c’est vraiment, Seigneur, le meilleur témoignage

Que nous puissions donner de notre dignité

Que cet ardent sanglot qui roule d’âge en âge

Et vient mourir au bord de votre éternité!

7. La Muse malade

Ma pauvre muse, hélas! qu’as-tu donc ce matin?

Tes yeux creux sont peuplés de visions nocturnes,

Et je vois tour à tour réfléchis sur ton teint

La folie et l’horreur, froides et taciturnes.

Le succube verdâtre et le rose lutin

T’ont-ils versé la peur et l’amour de leurs urnes?

Le cauchemar, d’un poing despotique et mutin,

T’a-t-il noyée au fond d’un fabuleux Minturnes?

Je voudrais qu’exhalant l’odeur de la santé

Ton sein de pensers forts fût toujours fréquenté,

Et que ton sang chrétien coulât à flots rythmiques

Comme les sons nombreux des syllabes antiques,

Où régnent tour à tour le père des chansons,

Phœbus, et le grand Pan, le seigneur des moissons.

It is a call passed by a thousand sentinels,

An order shouted through a thousand speaking horns;

It is a beacon on a thousand citadels,

A cry of hunters lost within a mighty wood!

For it is truly, Lord, best witness in the world

That we might give to you of human dignity,

This ardent sob that rolls onward from age to age

And comes to die in meeting your eternity!

7. The Sick Muse

My wretched muse, what does the morning bring?

Dream visions haunt your eyes, and I discern,

Reflected in the shadings of your skin,

Madness and horror, cold and taciturn.

Have they—green succubus* and rosy imp—

Poured on you fear and love out of their urns?

Has nightmare with his proud unruly grip

Sunk you within some fabulous Minturnes?*

I’d wish your breast to breathe the scent of health,

Your mind to think great thoughts the whole day long,

Your Christian blood to flow in waves that scan

With varied sounds of ancient syllables,

Where reign in turn the father of all song,

Apollo, and the harvest-lord, great Pan.*

8. La Muse vénale

Ô muse de mon cœur, amante des palais,

Auras-tu, quand Janvier lâchera ses Borées,

Durant les noirs ennuis des neigeuses soirées,

Un tison pour chauffer test deux pieds violets?

Ranimeras-tu donc tes épaules marbrées

Aux nocturnes rayons qui percent les volets?

Sentant ta bourse à sec autant que ton palais,

Récolteras-tu l’or des voûtes azurées?

Il te faut, pour gagner ton pain de chaque soir,

Comme un enfant de chœur, jouer de l’encensoir,

Chanter des Te Deum auxquels tu ne crois guère,

Ou, saltimbanque à jeun, étaler tes appas

Et ton rire trempé de pleurs qu’on ne voit pas,

Pour faire épanouir la rate du vulgaire.

9. Le Mauvais Moine

Les cloîtres anciens sur leurs grandes murailles

Étalaient en tableaux la sainte Vérité,

Dont l’effet, réchauffant les pieuses entrailles,

Tempérait la froideur de leur austérité.

En ces temps où du Christ florisssaient les semailles,

Plus d’un illustre moine, aujourd’hui peu cité,

Prenant pour atelier le champ des funérailles,

Glorifiait la Mort avec simplicité.

8. The Venal Muse

O muse of mine, in love with palaces,

Will you, when January flings his winds,

In the black tedium of snowy nights,

Find half-burned logs to warm your purple feet?

Your mottled shoulders, will they flush to warmth

As moonbeams slip inside our window glass?

Knowing your purse and palate both are dry,

Will you glean gold out of the azure vaults?

You must, to earn your meagre evening bread,

Like a bored altar boy swing censers, chant

Te Deums* to the never present gods,

Or, starving clown, put up your charms for sale,

Your laughter steeped in tears for no one’s eyes,

To bring amusement to the vulgar crowd.

9. The Wretched Monk

Old monasteries under steadfast walls

Displayed tableaux of holy Verity,

Warming the inner men in those cold halls

Against the chill of their austerity.

Those times, when seeds of Christ would thrive and grow,

More than one monk, now in obscurity,

Taking the graveyard as his studio,

Ennobled Death, in all simplicity.

—Mon âme est un tombeau que, mauvais cénobite,

Depuis l’éternité je parcours et j’habite;

Rien n’embellit les murs de ce cloître odieux.

Ô moine fainéant! quand saurai-je donc faire

Du spectacle vivant de ma triste misère

Le travail de mes mains et l’amour de mes yeux?

10. L’Ennemi

Ma jeunesse ne fut qu’un ténébreux orage,

Traversé çà et là par de brillants soleils;

Le tonnerre et la pluie ont fait un tel ravage,

Qu’il reste en mon jardin bien peu de fruits vermeils.

Voilà que j’ai touché l’automne des idées,

Et qu’il faut employer la pelle et les râteaux

Pour rassembler à neuf les terres inondées,

Où l’eau creuse des trous grands comme des tombeaux.

Et qui sait si les fleurs nouvelles que je rêve

Trouveront dans ce sol lavé comme une grève

Le mystique aliment qui ferait leur vigueur?

—Ô douleur! ô douleur! Le Temps mange la vie,

Et l’obscur Ennemi qui nous ronge le cœur

Du sang que nous perdons croît et se fortifie!

11. Le Guignon

Pour soulever un poids si lourd,

Sisyphe, il faudrait ton courage!

Bien qu’on ait du cœur à l’ouvrage,

L’Art est long et le Temps est court.

—My soul’s a tomb that, wretched cenobite,*

I travel in throughout eternity;

Nothing adorns the walls of this sad shrine.

O slothful monk! Oh, when may I assign

This living spectacle of misery

To labour of my hands, my eyes’ delight?

10. The Enemy

When I was young I lived a constant storm,

Though now and then the brilliant suns shot through,

So in my garden few red fruits were born,

The rain and thunder had so much to do.

Now are the autumn days of thought at hand,

And I must use the rake and spade to groom,

Rebuild and cultivate the washed-out land

The water had eroded deep as tombs.

And who knows if the flowers in my mind

In this poor sand, swept like a beach, will find

The food of soul to gain a healthy start?

I cry! I cry! Life feeds the seasons’ maw

And that dark Enemy who gnaws our hearts

Battens on blood that drips into his jaws!

11. Ill Fortune*

One must have courage as strong

As Sisyphus’,* lifting this weight!

Though the heart for the work may be great,

Time is fleeting, and Art is so long!*

Loin des sépultures célèbres,

Vers un cimetière isolé,

Mon cœur, comme un tambour voilé,

Va battant des marches funèbres.

—Maint joyau dort enseveli

Dans les ténèbres et l’oubli,

Bien loin des pioches et des sondes;

Mainte fleur épanche à regret

Son parfum doux comme un secret

Dans les solitudes profondes.

12. La Vie antérieure

J’ai longtemps habité sous de vastes portiques

Que les soleils marins teignaient de mille feux,

Et que leurs grands piliers, droits et majestueux,

Rendaient pareils, le soir, aux grottes basaltiques.

Les houles, en roulant les images des cieux,

Mêlaient d’une façon solennelle et mystique

Les tout-puissants accords de leur riche musique

Aux couleurs du couchant reflété par mes yeux.

C’est là que j’ai vécu dans les voluptés calmes,

Au milieu de l’azur, des vagues, des splendeurs

Et des esclaves nus, tout imprégnés d’odeurs,

Qui me rafraîchissaient le front avec des palmes,

Et dont l’unique soin était d’approfondir

Le secret douloureux qui me faisait languir.

Far from the tombs of the brave

Toward a churchyard obscure and apart,

Like a muffled drum, my heart

Beats a funeral march to the grave.

—But sleeping lies many a gem

In dark, unfathomed caves,

Far from the probes of men;

And many a flower waves

And wastes its sweet perfumes

In desert solitudes.

12. A Former Life

I once lived under vast and columned vaults

Tinged with a thousand fires by ocean suns,

So that their grand, straight pillars would become,

In evening light, like grottoes of basalt.

In surges rolled the images of skies;

With solemn, mystic force the sea combined

Its harmonies, all-powerful, sublime,

With sunset colours, glowing in my eyes.

So there I lived, in a voluptuous calm

Surrounded by the sea, by splendid blue,

And by my slaves, sweet-scented, handsome, nude,

Who cooled my brow with waving of the palms,

And had one care—to probe and make more deep

What made me languish so, my secret grief.

13. Bohémiens en voyage

La tribu prophétique aux prunelles ardentes

Hier s’est mise en route, emportant ses petits

Sur son dos, ou livrant à leurs fiers appétits

Le trésor toujours prês des mamelles pendantes.

Les hommes vont à pied sous leurs armes luisantes

Le long des chariots où les leurs sont blottis,

Promenant sur le ciel des yeux appesantis

Par le morne regret des chimères absentes.

Du fond de son réduit sablonneux, le grillon,

Les regardant passer, redouble sa chanson;

Cybèle, qui les aime, augmente ses verdures,

Fait couler le rocher et fleurir le désert

Devant ces voyageurs, pour lesquels est ouvert

L’empire familier des ténèbres futures.

14. L’Homme et la mer

Homme libre, toujours tu chériras la mer!

La mer est ton miroir; tu contemples ton âme

Dans le déroulement infini de sa lame,

Et ton esprit n’est pas un gouffre moins amer.

Tu te plais à plonger au sein de ton image;

Tu l’embrasses des yeux et des bras, et ton cœur

Se distrait quelquefois de sa propre rumeur

Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage.

13. Gypsies Travelling

That tribe of prophets with the burning eyes

Is on the road, their babies on their backs,

Who satisfy their appetite attacks

With treasured breasts that always hang nearby.

On foot, with weapons shining, go the men

Beside the carts in which their people lie,

With sorrow-laden eyes searching the sky,

Yearning for vanished chimeras* again.

The cricket, as he sees them pass along,

Deep in his lair redoubles his shrill song;

Cybele,* their friend, augments her greenery,

Turns rocks to springs, brings flowers from the sand

Before these sojourners, empowered to see

Their future darkness, that familiar land.

14. Man and the Sea

Free man, you’ll love the ocean endlessly!

It is your mirror, you observe your soul

In how its billows endlessly unroll—

Your spirit’s bitter depths are there to see.

You plunge in joy to your reflection’s core,

With eyes and heart seizing it all along;

Your heart sometimes neglects its proper song

Distracted by the ocean’s savage roar.

Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets:

Homme, nul n’a sondé le fond de tes abîmes,

Ô mer, nul ne connaît tes richesses intimes,

Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets!

Et cependant voilà des siècles innombrables

Que vous vous combattez sans pitié ni remord,

Tellement vous aimez le carnage et la mort,

Ô lutteurs éternels, ô frères implacables!

15.