Nous occupons l’ancien emplacement de la 4e, boyau d’enfilade. Pluie toute la nuit, la tranchée s’éboule – pose de claies – 3 petits postes en avant – nous pataugeons dans 20 ou 30 cm de boue et d’eau. Crottés jusqu’aux cuisses et trempés, nous ne pouvons fermer l’oeil.
Mercredi 2 [décembre]
Réveil – le temps s’éclaircit par degrés – bombardement des tranchées par le 77 boche – Dastis manque d’être tué – à 10 h ½ comme je sommeille vaguement, les pieds gelés, on vient m’avertir que Gautier qui vient de recevoir une balle au cou, demande à me serrer la main avant de mourir – je cours en baissant le dos. Legouis l’a pansé. Il va un peu mieux et je crois qu’il s’en tirera. Nous restons près de lui. Il est couché dans la boue, un peu de paille sous les fesses, des couvertures sur le ventre et, courageux, se remet peu à peu – à 2 h Herbin reçoit une balle à l’épaule – elle a traversé le parapet – on le panse aussi. Un bleu de la 1ere section, classe 14, est tué. Au crépuscule, M. Mistarlet vient chercher Gautier. Herbin a pu partir seul.
Nous sommes relevés à 7 h ½ et gagnons à Riaville la 1re grange où nous avons couché. Jus – repas froid – pommes et poires de Braconnot – nuit dans le foin. Je suis proposé pour ss-lieutt.
Jeudi 3 [décembre]
Au petit jour, nous gagnons la cave que nous occuperons dans la journée. Le fourrier me confirme que je suis proposé pour ss-lieutt. Un ss-off de la 1re l’est également. Qui l’emportera ? Le soir le temps s’éclaircit. Nous occupons la tranchée à droite, elle est habitable et très bien si on la compare à l’autre.
Vendredi 4 [décembre]
Toute la nuit, j’ai surveillé et dirigé la corvée de nettoyage du boyau. De la boue et de la boue, de l’eau. Je crains bien que ce soit un travail inutile. Au jour, éreinté, je m’endors sans avoir la force de manger. Dans le même abri que Legouis, nous causons et lisons les journaux. Dastis n’est pas bien lui non plus – moi ça va. Relevés vers 8 h sous une averse de balles, un sergent de la 10e tué à Riaville. 3 officiers du génie tués également dans la journée par un obus. Le soir vent violent – attente de la 1re section à Pintheville. Mistarlet me dit que je serai nommé sûrement dans le courant du mois. Retour à Manheulles, marche très rapide, les hommes exténués traînent par-derrière le long de la route. Curieux ce trajet Pintheville-Manheulles avec son cortège de voitures, brouettes, charrettes, etc.
Samedi 5 [décembre]
Nous occupons le cantonnement où nous étions en arrivant de Tillat. Repos relatif – toilette. Je me fais attraper par un lieutt de territoriale pour aller à la popote.
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