Booked till August.
You’re in love. Your sonnets make Her laugh.
Friends desert you, you’re out of fashion.
—Then, one night, the Beloved deigns to write…!
That night… you return to the bursting cafés,
You order beers, lemonade,
—No one’s serious when they’re seventeen,
And lime-trees flower on the promenade.
29th September ’70
‘The dead of ‘92 and ‘93…’
‘Frenchmen of 1870, Bonapartists, Republicans, remember your
forefathers of ‘92 etc….’
(Paul de Cassagnac, Le Pays)
The dead of ‘92 and ‘93,
The firm kiss of liberty on your brows,
You, who with your clogs calmly broke the collar
Clamped tight around humanity’s soul and neck.
Exalted men, made great by suffering,
You, whose hearts leapt with love beneath your rags,
Soldiers whom Death, noble lover, has sown
In every ancient furrows, to make you live again,
You, whose blood washed clean our soiled greatness,
You, the dead of Valmy, of Fleurus, of Italy,*
You million Christs with soft dark eyes,
We let you slumber with the Republic,
We who cowered under the royal lash
—Cassagnac and Co. have dug you up again!
Mazas Prison, 3 September 1870
Le Mal
Tandis que les crachats rouges de la mitraille
Sifflent tout le jour par l’infini du ciel bleu;
Qu’écarlates ou verts, près du Roi qui les raille,
Croulent les bataillons en masse dans le feu;
Tandis qu’une folie épouvantable, broie
Et fait de cent milliers d’hommes un tas fumant;
—Pauvres morts! dans l’été, dans l’herbe, dans ta joie,
Nature! ô toi qui fis ces hommes saintement!…—
—Il est un Dieu, qui rit aux nappes damassées
Des autels, à l’encens, aux grands calices d’or;
Qui dans le bercement des hosannah s’endort,
Et se réveille, quand des mères, ramassées
Dans l’angoisse, et pleurant sous leur vieux bonnet noir,
Lui donnent un gros sou lié dans leur mouchoir!
Rages de Césars
L’Homme pâle, le long des pelouses fleuries,
Chemine, en habit noir, et le cigare aux dents:
L’Homme pâle repense aux fleurs des Tuileries
—Et parfois son œil terne a des regards ardents…
Car l’Empereur est soûl de ses vingt ans d’orgie!
Il s’était dit: ‘Je vais souffler la Liberté
Bien délicatement, ainsi qu’une bougie!’
La Liberté revit! Il se sent éreinté!
Il est pris.—Oh! quel nom sur ses lèvres muettes
Tressaille? Quel regret implacable le mord?
On ne le saura pas. L’Empereur a l’œil mort.
Evil
While the red mouths of machine-guns spit blood
And whistle non-stop in the endless blue,
While—scarlet or green beside their sneering king—*
Massed battalions are blown to bits,
While nightmare madness stacks
A million men on smoking heaps
—You poor beggars, dead in summer’s grass,
In your joy, Nature, maker of these saintly men.
There is a God, who laughs at patterned
Altar-cloths, incense, great gold chalices,
Who’s lulled to sleep by Hosannas,
And Who wakes when mothers, huddled
In the black of grief, tie a small coin
In their handkerchief, and give it Him.
Caesars’ Rage
The pale man walks on flower-dotted lawns,
Dressed in black, cigar jammed between teeth.
The pale man’s remembering Tuileries’* flowers
—Sometimes his dead eyes flare with life…
For the Emperor’s drunk on two decades of excess!
He’d told himself: ‘I’ll snuff out Freedom
With one small puff, like a candle.’
Freedom’s back, and he’s worn out!
He’s been caught. And what name trembles
On his silent lips? What regret won’t let him go?
We shan’t know. The Emperor’s eyes are dead.
Il repense peut-être au Compère en lunettes…
—Et regarde filer de son cigare en feu,
Comme aux soirs de Saint-Cloud, un fin nuage bleu.
Rêvé pour l’hiver
A *** Elle
L’hiver, nous irons dans un petit wagon rose
Avec des coussins bleus.
Nous serons bien. Un nid de baisers fous repose
Dans chaque coin moelleux.
Tu fermeras l’œil, pour ne point voir, par la glace,
Grimacer les ombres des soirs,
Ces monstruosités hargneuses, populace
De démons noirs et de loups noirs.
Puis tu te sentiras la joue égratignée …
Un petit baiser, comme une folle araignée,
Te courra par le cou…
Et tu me diras: ‘Cherche!’ en inclinant la tête,
—Et nous prendrons du temps à trouver cette bête
—Qui voyage beaucoup…
En wagon, le 7 octobre 70.
Le Dormeur du val
C’est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D’argent; où le soleil, de la montagne fière,
Luit: c’est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Perhaps he recalls his old bespectacled
Confederate*—and watches, as in the St Cloud*
Days, smoke drift from his cigar in thin blue clouds.
Winter Dream
To *** Her
In Winter, we’ll travel in a small pink coach
With blue cushions,
Well installed, mad kisses nesting
In cosy corners.
You’ll close your eyes, not to see through the glass
The leer of dark evening,
Snarling monster, droves of black demons,
Packs of black wolves.
Then you’ll feel something scratch against your cheek…
A little kiss, brief as a startled spider,
Will run up your neck…
You’ll bow your head and say: ‘Find it for me!’
—And we’ll take the time it takes to find that creature
—Which loves to travel…
Travelling, 7 October ‘70
Asleep in the Valley
A gully of green, a laughing river
Where silver tatters snag
Madly in grasses; where, from the proud
Mountain the sun shines; foaming trough of light.
A young soldier, mouth open, head bare,
Neck on a pillow of cool cress,
Sleeps, stretched out in the grass, sky above,
Pale on his green bed where light teems down.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme:
Nature, berce-le chaudement: il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Octobre 1870.
Au Cabaret-Vert, cinq heures du soir
Depuis huit jours, j’avais déchiré mes bottines
Aux cailloux des chemins. J’entrais à Charleroi.
—Au Cabaret-Vert: je demandai des tartines
De beurre et du jambon qui fût à moitié froid.
Bienheureux, j’allongeai les jambes sous la table
Verte: je contemplai les sujets très naïfs
De la tapisserie.—Et ce fut adorable,
Quand la fille aux tétons énormes, aux yeux vifs,
—Celle-là, ce n’est pas un baiser qui l’épeure!—
Rieuse, m’apporta des tartines de beurre,
Du jambon tiède, dans un plat colorié,
Du jambon rose et blanc parfumé d’une gousse
D’ail,—et m’emplit la chope immense, avec sa mousse,
Que dorait un rayon de soleil arriéré.
Octobre 70.
La Maline
Dans la salle à manger brune, que parfumait
Une odeur de vernis et de fruits, à mon aise
Je ramassais un plat de je ne sais quel met
Belge, et je m’épatais dans mon immense chaise.
Feet among the flags, he sleeps, smiling how
A sick child might; he takes a nap.
Gather him close, Nature, rock him. He’s cold.
No scent makes his nostril quiver.
He sleeps in the sun, one hand on his still
Chest. In his right side, two red holes.
October 1870
At the Green Inn, five p.m.
A full week I’d been on the road, feet
Swollen and blistered. Made it to Charleroi,*
Stopped off at the Green Inn, ordered some
Ham rolls and a tall glass of draught beer.
Nice and relaxed, I stretched out my legs,
Cast my eye over the usual wit…
‘You don’t have to be mad to work here’
Etc…. And when the barmaid
(Obligatory well-filled blouse and eyes
That say she wouldn’t mind one bit)
Brought in my plate of rolls, freshly made,
Chilled butter, soft pink ham, and a slice
Or two of onion, I raised my glass
And saw summer in a splendid head.
October ‘70
Cunning
Spread carelessly across my massive chair
In that sepia living-room, with its smell
Of fruit and varnish, I settled in and took
A helping of some Belgian dish.
En mangeant, j’écoutais l’horloge,—heureux et coi.
La cuisine s’ouvrit avec une bouffée
—Et la servante vint, je ne sais pas pourquoi,
Fichu moitié défait, malinement coiffée
Et, tout en promenant son petit doigt tremblant
Sur sa joue, un velours de pêche rose et blanc,
En faisant, de sa lèvre enfantine, une moue,
Elle arrangeait les plats, près de moi, pour m’aiser;
—Puis, comme ça,—bien sûr pour avoir un baiser,—
Tout bas: ‘Sens donc: j’ai pris une froid sur la joue…’
Charleroi, octobre 70.
‘Au milieu, l’Empereur…’
—L’éclatante victoire de Sarrebrück,—
remportée aux cris de vive l’Empereur!
(Gravure belge brillamment coloriée,
se vend à Charleroi, 35 centimes.)
Au milieu, l’Empereur, dans une apothéose
Bleue et jaune, s’en va, raide, sur son dada
Flamboyant; très heureux,—car il voit tout en rose,
Féroce comme Zeus et doux comme un papa;
En bas, les bons Pioupious qui faisaient la sieste
Près des tambours dorés et des rouges canons,
Se lèvent gentiment. Pitou remet sa veste,
Et, tourné vers le Chef, s’étourdit de grands noms!
A droite, Dumanet, appuyé sur la crosse
De son chassepot, sent frémir sa nuque en brosse,
Et: ‘Vive l’Empereur!!’—Son voisin reste coi…
Un schako surgit, comme un soleil noir… Au centre,
Boquillon rouge et bleu, très naïf, sur son ventre
Se dresse, et,—présentant ses derrières—: ‘De quoi?…’
Octobre 70.
I ate, listening to the clock, happy, quiet.
Then, a sudden draught, and, from the kitchen
(Why, I don’t know), a button undone,
Hair nicely mismanaged, in came the maid.
She ran one dinky finger down the pink
White velvet of a cheek,
Put on a little-girlie pout,
Leant nicely over me to set some plates—
Then, like this, to get a kiss, murmured:
‘Feel my cheek, I come over* all cold.’
Charleroi, October ‘70
‘Centre: the Emperor…’
—The Stunning Victory at Sarrebrück,—
Gained to shouts of Long Live the Emperor!
(Belgian engraving, in dazzling colours
on sale at Charleroi, 35 centimes)
Centre: the Emperor, apotheosis
Of blue and gold, riding off, stiff as a board
On his dazzling nag; radiant, seeing the world
Through rose-tinted glasses; fierce as Zeus, soppy as papa.
Bottom: poor private soldiers napping
By the gilded drums and red cannons,
Obediently get up. Pitou* buttons his tunic,
Turns to his CO, head swimming with great names.
Right: Dumanet* leans on his rifle-butt,
Feels his close-cropped scalp prickle, and yells:
‘Long Live the Emperor!’ His neighbour says nothing…
A helmet rises like a black sun… Centre:
Simple Boquillon,* prostrate in red and blue, lifts
Himself up, and, end-first, says: ‘Emperor, my arse!’
October ‘70
Le Buffet
C’est un large buffet sculpté; le chêne sombre,
Très vieux, a pris cet air si bon des vieilles gens;
Le buffet est ouvert, et verse dans son ombre
Comme un flot de vin vieux, des parfums engageants;
Tout plein, c’est un fouillis de vieilles vieilleries,
De linges odorants et jaunes, de chiffons
De femmes ou d’enfants, de dentelles flétries,
De fichus de grand-mère où sont peints des griffons;
—C’est là qu’on trouverait les médaillons, les mèches
De cheveux blancs ou blonds, les portraits, les fleurs sèches
Dont le parfum se mêle à des parfums de fruits.
—Ô buffet du vieux temps, tu sais bien des histoires,
Et tu voudrais conter tes contes, et tu bruis
Quand s’ouvrent lentement tes grandes portes noires.
Octobre 70.
Ma Bohème (Fantaisie)
Je m’en allais, les poings dans mes poches crevées;
Mon paletot aussi devenait idéal;
J’allais sous le ciel, Muse! et j’étais ton féal;
Oh! là là! que d’amours splendides j’ai rêvées!
Mon unique culotte avait un large trou.
—Petit-Poucet rêveur, j’égrenais dans ma course
Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse.
Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou
Et je les écoutais, assis au bord des routes,
Ces bon soirs de septembre où je sentais des gouttes
De rosée à mon front, comme un vin de vigueur;
The Dresser
It’s a wide dresser carved in old, dark oak;
Now it’s got that lovely look old folk have;
Its doors are open, from its depths
Intriguing fragrances flood like vintage wine.
Stuffed full, it’s a ragbag of olden-day old things,
Yellowing scented linens, bits of children’s
And women’s clothing, tired lace,
Grandma’s headscarves printed with griffins;
—This is the place of medals and lockets,
White or blond hair, portraits, the fragrance
Of dried flowers blending with the smell of fruit.
—Dresser of bygone days, you’ve seen some things,
And could tell a tale or two; which begin
Whenever your great dark doors slowly open.
October ‘70
My Bohemia (Fantasy)
And so I went, hands thrust in torn pockets.
My coat was more idea than fact.
Beneath the sky—my Muse, my liege—I went;
Oh my! what dreams of splendid loves I had!
My one and only trousers were hugely holed.
—Starry-eyed Tom Thumb, I strewed my path
With verse. I laid my head at Great Bear Inn.
—My stars swished softly in the sky
And, seated on roadsides, I heard them
On lovely evenings in September, feeling dew
Drop on my face, like invigorating wine;
Où, rimant au milieu des ombres fantastiques,
Comme des lyres, je tirais les élastiques
De mes souliers blessés, un pied près de mon cœur!
Les Corbeaux
Seigneur, quand froide est la prairie,
Quand dans les hameaux abattus,
Les longs angelus se sont tus…
Sur la nature défleurie
Faites s’abattre des grands cieux
Les chers corbeaux délicieux.
Armée étrange aux cris sévères,
Les vents froids attaquent vos nids!
Vous, le long des fleuves jaunis,
Sur les routes aux vieux calvaires,
Sur les fossés et sur les trous
Dispersez-vous, ralliez-vous!
Par milliers, sur les champs de France,
Où dorment des morts d’avant-hier,
Tournoyez, n’est-ce pas, l’hiver,
Pour que chaque passant repense!
Sois donc le crieur du devoir,
Ô notre funèbre oiseau noir!
Mais, saints du ciel, en haut du chêne,
Mât perdu dans le soir charmé,
Laissez les fauvettes de mai
Pour ceux qu’au fond du bois enchaîne,
Dans l’herbe d’où l’on ne peut fuir,
La défaite sans avenir.
And rhyming verse among the phantom shadows,
I harped on the laces of my wounded boots,
One foot by my heart.
Crows
When the field is cold, Lord,
When in wasted hamlets
The long angelus has ceased…
Make the dear delicious crows
Swoop down from huge skies
Onto bare Nature.
Strange army of raucous cries,
Cold winds blast your nests!
Disperse, regroup,
Down yellow rivers,
Old Calvary roads,
Above ditches, over holes!
In your thousands, above France’s fields
Where the dead of yesterdays* lie sleeping,
Swirl about in winter
Lest passers-by forget.
Be the cry of duty,
Black herald, funeral bird!
But, you saints of heaven, high in the oak,
That mast of evening’s enchantment,
Leave the warbling birds of May
For those deep in the wood,
The grass which covers them for good,
Trapped in dead-end defeat.
Les Assis
Noirs de loupes, grêlés, les yeux cerclés de bagues
Vertes, leurs doigts boulus crispés à leurs fémurs
Le sinciput plaqué de hargnosités vagues
Comme les floraisons lépreuses des vieux murs;
Ils ont greffé dans des amours épileptiques
Leur fantasque ossature aux grands squelettes noirs
De leurs chaises; leurs pieds aux barreaux rachitiques
S’entrelacent pour les matins et pour les soirs!
Ces vieillards ont toujours fait tresse avec leurs sièges,
Sentant les soleils vifs percaliser leur peau,
Ou, les yeux à la vitre où se fanent les neiges,
Tremblant du tremblement douloureux du crapaud.
Et les Sièges leur ont des bontés: culottée
De brun, la paille cède aux angles de leurs reins;
L’âme des vieux soleils s’allume emmaillotée
Dans ces tresses d’épis où fermentaient les grains.
Et les Assis, genoux aux dents, verts pianistes
Les dix doigts sous leur siège aux rumeurs de tambour
S’écoutent clapoter des barcarolles tristes,
Et leurs caboches vont dans des roulis d’amour.
—Oh! ne les faites pas lever! C’est le naufrage…
Ils surgissent, grondant comme des chats giflés,
Ouvrant lentement leurs omoplates, ô rage!
Tout leur pantalon bouffe à leurs reins boursouflés.
Et vous les écoutez, cognant leurs têtes chauves
Aux murs sombres, plaquant et plaquant leurs pieds tors.
Et leurs boutons d’habit sont des prunelles fauves
Qui vous accrochent l’œil du fond des corridors!
Seated
Pus-filled growths, cratered skin, green rings under
The eyes, puffy fingers clasping thigh-bones,
Skull splashed with vague liver-spots
Like leprous growths sprouting on old walls;
In epileptic acts of love they’ve grafted
Ghostly bones onto the black skeletons
Of their chairs; morning noon and night their feet
Wrap themselves round breaking legs and rods.
These old boys have always been like this—bindweed
Round their chairs; feeling bright suns threadbaring
Their skin; or, eyes glued to windows where snows fade,
Trembling the way toads tremble with pain.
And the chairs are good to them; brown-seated
Straw yields to their rears’ fixed angles;
The heart of old suns glows, swaddled
In plaited ears of too-ripe corn.
There they sit, knees knocking against teeth, green pianists;
Ten fingers drum the underside of chairs;
They listen to the morse of sad barcaroles,
Heads bobbing on tides of love.
Don’t make them rise! Instant shipwreck…
They struggle up, growling like tormented cats;
Shoulder-blades open, so achingly slow!
Round swollen backsides, trousers balloon.
And you listen to them bump their baldness
Against dark walls, stamp and stamp their twisted feet,
And the buttons on their clothes are wild beasts’ eyes
Staring at you down long corridors.
Puis ils ont une main invisible qui tue:
Au retour, leur regard filtre ce venin noir
Qui charge l’œil souffrant de la chienne battue
Et vous suez pris dans un atroce entonnoir.
Rassis, les poings noyés dans des manchettes sales
Ils songent à ceux-là qui les ont fait lever
Et, de l’aurore au soir, des grappes d’amygdales
Sour leurs mentons chétifs s’agitent à crever.
Quand l’austère sommeil a baissé leurs visières
Ils rêvent sur leur bras de sièges fécondés,
De vrais petits amours de chaises en lisière
Par lesquelles de fiers bureaux seront bordés;
Des fleurs d’encre crachant des pollens en virgule
Les bercent, le long des calices accroupis
Tels qu’au fil des glaïeuls le vol des libellules
—Et leur membre s’agace à des barbes d’épis.
Les Douaniers
Ceux qui disent: Cré Nom, ceux qui disent macache,
Soldats, marins, débris d’Empire, retraités
Sont nuls, très nuls, devant les Soldats des Traités
Qui tailladent l’azur frontière à grands coups d’hache.
Pipe aux dents, lame en main, profonds, pas embêtés
Quand l’ombre bave aux bois comme un mufle de vache
Ils s’en vont, amenant leurs dogues à l’attache,
Exercer nuitamment leurs terribles gaîtés!
Ils signalent aux lois modernes les faunesses.
Ils empoignent les Fausts et les Diavolos.
‘Pas de ça, les anciens! Déposez les ballots!’
Their killing handshake comes from nowhere;
And when you leave, their gaze oozes black poison
Like the wretched eye of a beaten dog,
And you sweat, sucked into an awful vortex.
They sit down again; fists retracted into dirty sleeves;
They think about the helpers who got them up
And from dawn to dusk, ripe goitres
Rise and fall beneath spent chins, about to burst.
When stern sleep pulls their eyeshades down,
Head on arms, they dream of well-shagged seats
Spawning sweet baby chairs, edged with piping,
Destined one day for some noble study.
Ink flowers spurting seed like commas
Lull them in their rows of folded flower-cups
Like dragonflies working their way down the gladioli—
And they stir into life,* pricked by barbs of wheat.
The Customs Men
Those who say: ‘For Chrissake’, others who say: ‘Get lost—’
Soldiers, sailors, scum of Empire, pensioned off—
Are nothings next to the Tariff Soldiers,*
Who hack at azure frontiers with great axes.
Pipes in mouth, knives ready, deeply unconcerned
When darkness dribbles in woods, like a cow;
Off they go, their wolf-hounds on a lead,
To take their awful pleasures, every night.
Citing new laws, they finger Certain Nymphs,
They strong-arm Fausts* and Diavolos,*
With ‘You’re nicked, my lad. Now, drop that stuff.’
Quand sa sérénité s’approche des jeunesses,
Le Douanier se tient aux appas contrôlés!
Enfer aux Délinquants que sa paume a frôlés!
Le Cœur supplicié
Mon triste cœur bave à la poupe…
Mon cœur est plein de caporal!
Ils y lancent des jets de soupe,
Mon triste cœur bave à la poupe…
Sous les quolibets de la troupe
Qui lance un rire général,
Mon triste cœur bave à la poupe,
Mon cœur est plein de caporal!
Ithyphalliques et pioupiesques
Leurs insultes l’ont dépravé
A la vesprée, ils font des fresques
Ithyphalliques et pioupiesques;
Ô flots abracadabrantesques,
Prenez mon cœur, qu’il soit sauvé!
Ithyphalliques et pioupiesques
Leurs insultes l’ont dépravé!
Quand ils auront tari leurs chiques,
Comment agir, ô cœur volé?
Ce seront des refrains bachiques
Quand ils auront tari leurs chiques!
J’aurai des sursauts stomachiques,
Si mon cœur triste est ravalé!
Quand ils auront tari leurs chiques
Comment agir, ô cœur volé?
When His Majesty the Customs Man decides
To search juveniles, he’s after lovely contraband—
God help the Delinquents his hand has frisked.
Tortured Heart
My pooped heart oozes
’Baccy juices
Sad pooped heart.
Yelled abuse
And soupy juices
Smear my sad heart.
Privates parade
Their evening
Painting degrades.
Magical waves
Lift up and save
My tainted heart.
Quid-spitting done
How to go on
Poor swallowed heart
Their booze and smut
My knotted gut
My cheated heart?
Chant de guerre parisien
Le Printemps est évident, car
Du cœur des Propriétés vertes,
Le vol de Thiers et de Picard
Tient ses splendeurs grandes ouvertes!
Ô Mai! quels délirants cul-nus!
Sèvres, Meudon, Bagneux, Asnières,
Écoutez donc les bienvenus
Semer les choses printanières!
Ils ont schako, sabre et tam-tam
Non la vieille boîte à bougies
Et des yoles qui n’ont jam, jam…
Fendent le lac aux eaux rougies!
Plus que jamais nous bambochons
Quand arrivent sur nos tanières
Crouler les jaunes cabochons
Dans des aubes particulières!
Thiers et Picard sont des Éros,
Des enleveurs d’héliotropes,
Au pétrole ils font des Corots:
Voici hannetonner leurs tropes…
Ils sont familiers du Grand Truc!…
Et couché dans les glaïeuls, Favre
Fait son cillement aqueduc,
Et ses reniflements à poivre!
La Grand ville a le pavé chaud,
Malgré vos douches de pétrole,
Et décidément, il nous faut
Vous secouer dans votre rôle…
Paris War-Cry
Spring’s in the air; from deep
In the fertile Properties,
Which Thiers and Picard* annexed,
Growing splendours spread.
May! What a Carnival of bare arses!
Sèvres, Meudon, Bagneux, Asnières,*
Just listen to Welcome Spring
Bursting out all over.
Here they come, helmet, sabre, drum;
Not driven by ancient candle-power;
Their skiffs—they’ve ne… ne… never been to sea—*
Slice through the bloodied waters of the lake.
Our revels now are never-ending
When in the ant-heaps where we live
Yellow hailstorms rain on our heads
Ushering in uncommon dawns.
The Gods of Love: Thiers is one, P(r)ic-
Ard* is too; they dead-head heliotropes,
Paint Corots* with their petrol-bombs:
Here come their troops, picking off whatever moves…
They’re on first-name terms with His Nibs!
Stretched out in beds of irises, Favre*
Winks to activate his tear-ducts;
He peppers up his snivels.
The City’s cobblestones are hot
Despite your showers of flames;
Only one thing now for you—
You need a rocket up your…
Et les Ruraux qui se prélassent
Dans de longs accroupissements,
Entendront des rameaux qui cassent
Parmi les rouges froissements!
A. Rimbaud.
Mes petites amoureuses
Un hydrolat lacrymal lave
Les cieux vert-chou:
Sous l’arbre tendronnier qui bave,
Vos caoutchoucs
Blancs de lunes particulières
Aux pialats ronds,
Entrechoquez vos genouillères,
Mes laiderons!
Nous nous aimions à cette époque,
Bleu laideron!
On mangeait des œufs à la coque
Et du mouron!
Un soir, tu me sacras poète,
Blond laideron:
Descends ici, que je te fouette
En mon giron;
J’ai dégueulé ta bandoline,
Noir laideron;
Tu couperais ma mandoline
Au fil du front.
Pouah! mes salives desséchées,
Roux laideron
Infectent encor les tranchées
De ton sein rond!
And the fat cats* lying through
Long days of abject sloth
Will hear boughs break among
Disturbances, coloured red.
A. Rimbaud
My Little Lovebirds
Essential tears wash green
Cabbage skies;
Under the wet tendril tree,
Your waterproofs,
White with moon rings of
Tear-drop roundnesses,
Knock your knee-pads together,
My uglies!
We loved each other then
My blue ugly!
We used to eat boiled eggs
And chickweed!
One night you crowned me Poet,
My blond ugly.
Come here, across my lap
So I can hit you;
I’ve puked on your brilliantine,
My black ugly.
Your sharp forehead would unpick
My mandolin.
Ugh! My dried-out spit,
My redhead ugly
Still spreads germs down the trench
Between your round breasts!
Ô mes petites amoureuses,
Que je vous hais!
Plaquez de fouffes douloureuses
Vos tétons laids!
Piétinez mes vieilles terrines
De sentiment;
—Hop donc! Soyez-moi ballerines
Pour un moment!…
Vos omoplates se déboîtent,
Ô mes amours!
Une étoile à vos reins qui boitent,
Tournez vos tours!
Et c’est pourtant pour ces éclanches
Que j’ai rimé!
Je voudrais vous casser les hanches
D’avoir aimé!
Fade amas d’étoiles ratées,
Comblez les coins!
—Vous crèverez en Dieu, bâtées
D’ignobles soins!
Sous les lunes particulières
Aux pialats ronds,
Entrechoquez vos genouillères,
Mes laiderons!
A. R.
My little lovebirds,
I loathe you!
Plaster your nasty tits
With painful smacks!
Trample the old shards
Of my feelings;
Jump, be my ballerinas
For today!…
Your shoulder-blades dislocate
My lovely things!
Star-sewn limping rump,
Go do your tricks!
Yet it’s for these mutton-joints
I’ve written verse!
I’d spoil your hips
For having loved!
You heap of faded stars,
Weave into corners!
You’ll die seeing God, riddled
With worthy causes!
Under moon rings of
Teardrop roundnesses,
Knock your knee-pads together,
My uglies!
A. R.
Accroupissements
Bien tard, quand il se sent l’estomac écœuré,
Le frère Milotus, un œil à la lucarne
D’où le soleil, clair comme un chaudron récuré,
Lui darde une migraine et fait son regard darne,
Déplace dans les draps son ventre de curé.
Il se démène sous sa couverture grise
Et descend, ses genoux à son ventre tremblant,
Effaré comme un vieux qui mangerait sa prise,
Car il lui faut, le poing à l’anse d’un pot blanc,
A ses reins largement retrousser sa chemise!
Or, il s’est accroupi, frileux, les doigts de pied
Repliés, grelottant au clair soleil qui plaque
Des jaunes de brioche aux vitres de papier;
Et le nez du bonhomme où s’allume la laque
Renifle aux rayons, tel qu’un charnel polypier.
… … … … … … … … … … … … … …
Le bonhomme mijote au feu, bras tordus, lippe
Au ventre: il sent glisser ses cuisses dans le feu,
Et ses chausses roussir, et s’éteindre sa pipe;
Quelque chose comme un oiseau remue un peu
A son ventre serein comme un monceau de tripe!
Autour, dort un fouillis de meubles abrutis
Dans des haillons de crasse et sur de sales ventres;
Des escabeaux, crapauds étranges, sont blottis
Aux coins noirs: des buffets ont des gueules de chantres
Qu’entrouvre un sommeil plein d’horribles appétits.
L’écœurante chaleur gorge la chambre étroite;
Le cerveau du bonhomme est bourré de chiffons.
Il écoute les poils pousser dans sa peau moite,
Et, parfois, en hoquets fort gravement bouffons
S’échappe, secouant son escabeau qui boite…
… … … … … … … … … … … … … …
Squatting Down
It’s very late; sick to his stomach,
Brother Milotus,* one eye on the skylight
Through which the saucepan-bright sun
Arrows him a migraine so he can’t see straight,
Shifts his sacerdotal guts beneath the covers.
He wriggles under his grey blanket,
Then gets up, knees to trembling belly,
Scared as some veteran choking on snuff—
The problem is, while one hand grabs the potty,
The other’s somehow got to hold his night-shirt up!
He’s squatting now, feeling the cold, toes
Curled, shivering in the sunlight which slaps yellows
Like choux-pastry onto papery window-panes;
And the old boy’s nose, lit up like lacquer,
Sniffs at the sun, a spread of polyps.
… … … … … … … … … … … … … ….
The old boy’s cooking nicely by the fire, arms knotted,
Blubber-lip by belly; he feels his thighs slip firewards,
Breeches scorch, pipe go out;
Something bird-like twitters
In his tummy, peaceable as tripe.
All around, jumbled furniture sleeps stupid
In its dirty rags, bellied out in filth;
Stools like weird toads squat unseen
In dark corners; sideboards open wide as singers’ throats,
Mouths agape in the sleep of ghastly greed.
Stomach-turning heat gorges the narrow room;
The old boy’s head is stuffed full of rags;
He hears the hairs growing under his damp skin,
And, accompanied by the grave belching of buffoons,
Sometimes takes his leave, upsetting his wobbly stool…
… … … … … … … … … … … … … ….
Et le soir, aux rayons de lune, qui lui font
Aux contours du cul des bavures de lumière,
Une ombre avec détails s’accroupit, sur un fond
De neige rose ainsi qu’une rose trémière…
Fantasque, un nez poursuit Vénus au ciel profond.
L’Orgie parisienne
ou
Paris se repeuple
Ô lâches, la voilà! dègorgez dans les gares!
Le soleil expia de ses poumons ardents
Les boulevards qu’un soir comblèrent les Barbares.
Voilà la Cité belle, assise à l’occident!
Allez! on préviendra les reflux d’incendie,
Voilà les quais! voilà les boulevards! voilà,
Sur les maisons, l’azur léger qui s’irradie,
Et qu’un soir la rougeur des bombes étoila.
Cachez les palais morts dans des niches de planches!
L’ancien jour effaré rafraîchit vos regards.
Voici le troupeau roux des tordeuses de hanches,
Soyez fous, vous serez drôles, étant hagards!
Tas de chiennes en rut mangeant des cataplasmes.
Le cri des maisons d’or vous réclame. Volez!
Mangez! voici la nuit de joie aux profonds spasmes
Qui descend dans la rue, ô buveurs désolés,
Buvez! Quand la lumière arrive intense et folle,
Fouillant à vos côtés les luxes ruisselants,
Vous n’allez pas baver, sans geste, sans parole,
Dans vos verres, les yeux perdus aux lointains blancs,
Evenings, in saliva circles
Of moonlight dribbling onto his arse,
A shadow squats, detailed against a backdrop
Of pink snow, like a hollyhock…
The weird sight of a nose pursuing planet Venus.
Parisian Orgy
or
Paris Filling Up Again
Here she is, you cowards! Pile out onto station platforms!
The sun’s fierce breath has purified
The boulevards which barbarians* raped one night.
Here’s the holy city, established in the West.
Go on! We’ll stop old fires relighting;
Here’s the riverside, the boulevards, here
The houses set against a blue sky’s radiance
Which one night was spangled red with bombs.
Board up dead palaces, cosset them in wood!
Old, startled daylight cools your gaze.
Here comes the hip-wriggling red-head gang.
Be wild, you mad and gaunt comedians.
Packs of dogs on heat devouring cataplasms,
The cry from golden houses calls you. Steal!
Eat! The deeply shuddering night of joy
Comes down into the street. Oh, you desolate drinkers,
Drink! When wild, intense light streams down,
Into the rivers of luxury beside you,
You won’t slobber into your glass,
With your still, mute eyes fixed on distant nothingness?
Avalez, pour la Reine aux fesses cascadantes!
Écoutez l’action des stupides hoquets
Déchirants. Écoutez sauter aux nuits ardentes
Les idiots râleux, vieillards, pantins, laquais!
Ô cœurs de saleté, bouches épouvantables,
Fonctionnez plus fort, bouches de puanteurs!
Un vin pour ces torpeurs ignobles, sur ces tables…
Vos ventres sont fondus de hontes, ô Vainqueurs!
Ouvrez votre narine aux superbes nausées!
Trempez de poisons forts les cordes de vos cous!
Sur vos nuques d’enfants baissant ses mains croisées
Le Poète vous dit: ô lâches, soyez fous!
Parce que vous fouillez le ventre de la Femme
Vous craignez d’elle encore une convulsion
Qui crie, asphyxiant votre nichée infâme
Sur sa poitrine, en une horrible pression.
Syphilitiques, fous, rois, pantins, ventriloques,
Qu’est-ce que ça peut faire à la putain Paris,
Vos âmes et vos corps, vos poisons et vos loques?
Elle se secouera de vous, hargneux pourris!
Et quand vous serez bas, geignant sur vos entrailles,
Les flancs morts, réclamant votre argent, éperdus,
La rouge courtisane aux seins gros de batailles
Loin de votre stupeur tordra ses poings ardus!
Quand tes pieds ont dansé si fort dans les colères,
Paris! quand tu reçus tant de coups de couteau,
Quand tu gis, retenant dans tes prunelles claires
Un peu de la bonté du fauve renouveau,
Ô cité douloureuse, ô cité quasi morte,
La tête et les deux seins jetés vers l’ Avenir
Ouvrant sur ta pâleur ses milliards de portes,
Cité que le Passé sombre pourrait bénir:
Drink it down, for the Queen of the tumbling arse!
Hear the stupid rip of hiccups!
On fervent nights, hear the agitation
Of lunatics, lackeys, empty vessels!
Hearts of filth, god-awful mouths,
Work harder, stinking, hell-hole mouths.
Wine for these foul torpors, at these tables…
Your guts are ripped wide with shame, you Victors!
Open your nostrils to the greatest nauseas!
Soak your neck-cords in violent poisons!
Lowering clasped hands to your young necks
The Poet says: ‘Cowards, be as mad as you like!’
As you’re delving into Woman’s belly,
You fear the wild cry of her convulsion
Which might smother you again, nestling
Squalidly on her breast, and horribly crushed.
Syphilitics, madmen, dummies, kings, ventriloquists,
Do you think that Paris—tart!—cares a rap
For your souls, your bodies, your poisons, your rags?
She’ll throw you off, you foul-tempered wrecks.
And when you’re laid low, just a gutful of moans,
Dead meat crying out for cash, frantic,
The red courtesan with battle-heavy breasts
Will make hard fists, far from your stupor!
When your feet danced such angry steps,
Paris! when you received such knife-wounds,
And now you lie there, a remnant of wild
Natural goodness still in your eyes,
Oh city of pain, city close to death,
Head and breasts thrust towards the Future
Which opens its million doors to your pallor,
City which a sombre Past might bless,
Corps remagnétisé pour les énormes peines,
Tu rebois donc la vie effroyable! tu sens
Sourdre le flux des vers livides en tes veines,
Et sur ton clair amour rôder les doigts glaçants!
Et ce n’est pas mauvais. Tes vers, tes vers livides
Ne gêneront pas plus ton souffle de Progrès
Que les Stryx n’éteignaient l’œil des Cariatides
Où des pleurs d’or astral tombaient des bleus degrés.
Quoique ce soit affreux de te revoir couverte
Ainsi; quoiqu’on n’ait fait jamais d’une cité
Ulcère plus puant à la Nature verte,
Le Poète te dit: ‘Splendide est ta Beauté!’
L’orage t’a sacrée suprême poésie;
L’immense remuement des forces te secourt;
Ton œuvre bout, la mort gronde, Cité choisie!
Amasse les strideurs au cœur du clairon lourd.
Le Poète prendra le sanglot des Infâmes,
La haine des Forçats, la clameur des maudits;
Et ses rayons d’amour flagelleront les Femmes.
Ses strophes bondiront: voilà! voilà! bandits!
—Société, tout est rétabli:—les orgies
Pleurent leur ancien râle aux anciens lupanars:
Et les gaz en délire, aux murailles rougies,
Flambent sinistrement vers les azurs blafards!
Mai 1871.
Les Mains de Jeanne-Marie
Jeanne-Marie a des mains fortes,
Mains sombres que l’été tanna,
Mains pâles comme des mains mortes.
—Sont-ce des mains de Juana?
Body galvanized for colossal pains,
You drink again the horrible life! You feel
White worms swarm through your veins,
And icy fingers crawl across your open love!
Nor is it bad. The worms, the white worms
Won’t squeeze the breath of Progress out of you,
As the Vampires of Night couldn’t darken
Old splendours, cascading star-gold tears from blue skies.
Though it’s grim to find you covered in this way,
Though no city ever became a more putrid
Ulcer in the face of green Nature,
The Poet says to you: ‘Your beauty is a splendour.’
The storm has crowned you Poetry Supreme;
The huge stirring of forces rescues you;
City elect, your work comes to the boil, death rumbles!
Gather stridencies into your great trumpet.
The Poet will take on the sob of the Disgusting,
The Convicts’ hatred, the shouts of the Damned;
His light-beams of love will lash all womankind.
His stanzas will leap: There, deal with that, you bandits!
—Society, all is restored; orgies weep their hoarse
Ancient tears in the lupanars of old;
On reddened walls, sinister gaslight leaps
In frenzy, up towards the bloodless blue.
May 1871
The Hands of Jeanne-Marie
Jeanne-Marie has strong hands,
Dark hands which summer tanned,
Hands as pale as dead hands
—Are these the hands of Juana?
Ont-elles pris les crèmes brunes
Sur les mares des voluptés?
Ont-elles trempé dans des lunes
Aux étangs de sérénités?
Ont-elles bu des cieux barbares,
Calmes sur les genoux charmants?
Ont-elles roulé des cigares
Ou trafiqué des diamants?
Sur les pieds ardents des Madones
Ont-elles fané des fleurs d’or?
C’est le sang noir des belladones
Qui dans leur paume éclate et dort.
Mains chasseresses des diptères
Dont bombinent les bleuisons
Aurorales, vers les nectaires?
Mains décanteuses de poisons?
Oh! quel Rêve les a saisies
Dans les pandiculations?
Un rêve inouï des Asies,
Des Khenghavars ou des Sions?
—Ces mains n’ont pas vendu d’oranges,
Ni bruni sur les pieds des dieux:
Ces mains n’ont pas lavé les langes
Des lourds petits enfants sans yeux.
Ce ne sont pas mains de cousine
Ni d’ouvrières aux gros fronts
Que brûle, aux bois paunt l’usine,
Un soleil ivre de goudrons.
Ce sont des ployeuses d’échines,
Des mains qui ne font jamais mal,
Plus fatales que des machines,
Plus fortes que tout un cheval!
Did they turn a creamy chocolate
On lakes of sensuality,
Did they swim among moons
In waters of serenity?
Did they drink barbaric skies,
Placed calmly on delicious knees,
Roll cigars
Or trade in diamonds?
Did they winnow golden flowers
On the Madonna’s burning feet?
It’s black belladonna blood
Which bursts in their palms and sleeps.
Hands which chase two-winged insects,
Whose first-light blueynotes
Rumble round the nectaries?
Hands which measure poison out?
What Dream has caught them, stretched in
Their pandiculation?
Bizarre dream of Asias,
Khenghavars* or Sions?*
—These hands have sold no oranges,
Nor darkened at the feet of gods;
These hands have washed no rags
Of heavy eyeless children.
These aren’t the hands of cousins
Or working women whose broad brows
Are scorched by a sun blind-drunk on tar,
Down in the woods that stink of factories.
These are hands that bend backbones,
Hands that never cause harm,
More deadly than machines,
Stronger than a horse.
Remuant comme des fournaises,
Et secouant tous ses frissons,
Leur chair chante des Marseillaises
Et jamais les Eleisons!
Ça serrerait vos cous, ô femmes
Mauvaises, ça broierait vos mains,
Femmes nobles, vos mains infâmes
Pleines de blancs et de carmins.
L’éclat de ces mains amoureuses
Tourne le crâne des brebis!
Dans leurs phalanges savoureuses
Le grand soleil met un rubis!
Une tache de populace
Les brunit comme un sein d’hier;
Le dos de ces Mains est la place
Qu’en baisa tout Révolté fier!
Elles ont pâli, merveilleuses,
Au grand soleil d’amour chargé,
Sur le bronze des mitrailleuses
A travers Paris insurgé!
Ah! quelquefois, ô Mains sacrées,
A vos poings, Mains où tremblent nos
Lèvres jamais désenivrées,
Crie une chaîne aux clairs anneaux!
Et c’est un soubresaut étrange
Dans nos êtres, quand, quelquefois,
On veut vous déhâler, Mains d’ange,
En vous faisant saigner les doigts!
Active as furnaces,
Shaking like tremors, their flesh
Sings out the Marseillaise,
And not one sole Eleison!*
These hands would break your necks, bad
Women, crush your hands,
Noble ladies, your vile hands
Covered in carmine and white.
The radiance of these loving hands
Turns the skulls of tiny lambs!
On each savoury finger-joint
The full sun puts a ruby.
A splash of populace
Stains them brown, like yesterday’s breast;
On the back of these Hands every
Proud Revolutionary placed a kiss!
These marvellous hands have paled
In the huge sun filled with love,
On the bronze muzzle of machine-guns,
Everywhere in Paris rising up!
Ah, sometimes, sacred Hands,
Round your wrists, Hands brushed by
Our ever-drunken trembling lips,
A chain of brilliant links cries out.
Then suddenly our whole being gives
A start when some people
Try to whiten your angelic Hands,
By making all your fingers bleed!
Les Sœurs de charité
Le jeune homme dont l’œil est brillant, la peau brune,
Le beau corps de vingt ans qui devrait aller nu,
Et qu’eût, le front cerclé de cuivre, sous la lune
Adoré, dans la Perse un Génie inconnu,
Impétueux avec des douceurs virginales
Et noires, fier de ses premiers entêtements,
Pareils aux jeunes mers, pleurs de nuits estivales
Qui se retournent sur des lits de diamants;
Le jeune homme, devant les laideurs de ce monde
Tressaille dans son cœur largement irrité
Et plein de la blessure éternelle et profonde,
Se prend à désirer sa sœur de charité.
Mais, ô Femme, monceau d’entrailles, pitié douce,
Tu n’es jamais la Sœur de charité, jamais,
Ni regard noir, ni ventre où dort une ombre rousse
Ni doigts légers, ni seins splendidement formés.
Aveugle irréveillée aux immenses prunelles
Tout notre embrassement n’est qu’une question:
C’est toi qui pends à nous, porteuse de mamelles;
Nous te berçons, charmante et grave Passion.
Tes haines, tes torpeurs fixes, tes défaillances
Et les brutalités souffertes autrefois
Tu nous rends tout, ô Nuit pourtant sans malveillances,
Comme un excès de sang épanché tous les mois.
—Quand la femme, portée un instant, l’épouvante,
Amour, appel de vie et chanson d’action
Viennent la Muse verte et la Justice ardente
Le déchirer de leur auguste obsession.
Sisters of Charity
The young man with bright eyes, dark skin,
Copper-laurelled brow, twenty-year old beauty
Meant to go naked, which an unknown Persian
Genie might have adored by moonlight,
Impetuous youth, glowing darkly virginal,
Proud of his first obsessions,
Like young seas, tears on a summer’s night,
Rolling on their bed of diamonds.
Facing the world’s ugliness,
The young man’s irritated heart shudders;
Scored deep by a wound which never heals,
He starts to desire his sister of charity.
But—Women, heap of innards, sweet softness,
You’re never the Sister of Charity, never,
Nor dark look, nor belly where an auburn shadow sleeps,
Nor lightest touch, nor splendid breasts.
Sleeping blindness with enormous eyes,
Our whole embrace is just a question;
You bend over us, you, breast-bearer,
And we cradle you, grave and charming Passion.
Your hates, torpors, failings,
Brutalities suffered in the past,
You give us back everything, Night of no ill-will,
Like a monthly overflow of blood.
When Woman, briefly excited, frightens him
With love—that assertion of life, that song of action—
Then the Green Muse and burning Justice come
To tear him apart with lofty obsession.
Ah! sans cesse altéré des splendeurs et des calmes,
Délaissé des deux Sœurs implacables, geignant
Avec tendresse après la science aux bras almes
II porte à la nature en fleur son front saignant.
Mais la noire alchimie et les saintes études
Répugnent au blessé, sombre savant d’orgueil;
II sent marcher sur lui d’atroces solitudes.
Alors, et toujours beau, sans dégoût du cercueil,
Qu’il croie aux vastes fins, Rêves ou Promenades
Immenses, à travers les nuits de Vérité
Et t’appelle en son âme et ses membres malades
Ô Mort mystérieuse, ô Sœur de charité.
Juin 1871.
L’Homme juste
[ … … … … … … ….. ]
Le Juste restait droit sur ses hanches solides:
Un rayon lui dorait l’épaule; des sueurs
Me prirent: ‘Tu veux voir rutiler les bolides?
Et, debout, écouter bourdonner les flueurs
D’astres lactés, et les essaims d’astéroïdes?
‘Par des farces de nuit ton front est épié,
Ô Juste! Il faut gagner un toit. Dis ta prière,
La bouche dans ton drap doucement expié;
Et si quelque égaré choque ton ostiaire,
Dis: Frère, va plus loin, je suis estropié!’
Et le Juste restait debout, dans l’épouvante
Bleuâtre des gazons après le soleil mort:
‘Alors, mettrais-tu tes genouillères en vente,
Ô vieillard? Pèlerin sacré! Barde d’Armor!
Pleureur des Oliviers! Main que la pitié gante!
Always thirsting for splendour and calm,
Abandoned by the two unyielding Sisters,
Whimpering softly for knowledge, its embrace of life,
He offers full-blown nature his bloodstained brow.
But dark alchemy, saintly study
Repel the wounded boy, dark expert in pride;
He feels atrocious solitude bear down on him.
Then, beautiful still, untroubled by the grave,
Let him believe in vast purposes, Immense Walks
And Dreams, across Nights of Truth,
And call you into his soul, his ailing limbs—
You, mysterious Death, you sister of charity!
June 1871
The Just Man
[ … … … … … … … … … ]
The Just Man stood upright on firm hips,
One shoulder gold with sun; I started
Sweating: ‘You want to see meteors glow,
Stand and hear the flow of milky stars
Hum, the swarms of asteroids?
‘Night’s shenanigans, Just Man, have marked
Your card! Find a roof.
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