Sans cela même sans vingt-huit jours j’irai peut-être passer à Versailles le mois de septembre, pas à cause de vous, de sorte que cela ne vous lie en rien. Que de pages ! et je ne vous ai pas encore parlé du petit Baudelaire. Ce sera pour la prochaine fois. Et avez-vous reçu l’appendice de Mme de Sévigné avec les fac-similés ?

Je vous embrasse tendrement et vos sœurs, sauf celle dont le mari est jaloux10. Moi qui ne le suis plus, mais qui l’ai été je respecte les jaloux et je ne veux pas leur causer l’ombre d’un ennui, ou leur faire le soupçon d’un secret.

Marcel.

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1- Lettre publiée dans Hahn (60-63) ; Kolb (II, 104-108).

2- Ancien Testament, Ézéchiel, 18, 2.

3- Personnage de La Dame de Monsoreau d’Alexandre Dumas, tout comme Bussy, quelques lignes plus loin.

4- Suzette, fille de Madeleine Lemaire.

5- « La Mort du loup » de Vigny se termine par : « Gémir, pleurer, prier, est également lâche, [...] Puis, après, comme moi, souffre et meurs sans parler. »

6- Allusion à la lettre du 22 juillet 1671 de Mme de Sévigné à Coulanges, sur les foins.

7- Sans doute le docteur Georges Schlemmer, qui possédait une villa au Mont-Dore.

8- Il s’agit de l’un des deux frères Lucien et Paul Hillemacher, compositeurs.

9- Non identifiée.

10- Élisa Hahn, Isabel Hahn – Mme Emil Seligman –, Maria Hahn – Mme Raymond de Madrazo ; sœurs de Reynaldo Hahn.

à madame Adrien Proust

Mercredi neuf heures et demie du matin
 [2 septembre 1896 ?]1

Ma chère petite Maman

 

Je suis content de te savoir à Dieppe. Je te « vois » mieux. Je crois que tu ferais bien en arrivant de présenter les lettres de créance à Mme Lemaire qui sans cela croira à des mystères. En tout cas, comme j’attends ton avis pour donner à Mlle Suzette2 la réponse prompte que demande sa lettre, dis-moi dans ta prochaine lettre ce que je dois dire de toi. Je voudrais aussi écrire à M. de Saint Maurice pour qu’il te fasse visiter sa maison. Tu me donneras également avis à ce sujet. On vient d’apporter une cuvette pour moi mais elle est trop comme cela

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et pas assez comme cela

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Je crois que le plus simple est d’attendre ton retour. (Félicie qui avait pourtant remarqué le défaut l’a bêtement payée « mais dans ces maisons-là » etc.) Voici qu’on m’a donné avec mon plateau un bulletin médical, un argus de la Presse (éloge de papa dans un journal de province) tout cela ne doit-il donc pas aller à Vichy. Donne tes ordres et plutôt à moi, je les transmettrai oralement ce qui est plus persuasif. Par exemple il est venu aussi pour Papa des brochures je crois que ce serait cher à faire suivre.

Je peux dire au point de vue de ma nuit : « Après toi le déluge. » Mais je mérite tes éloges. Rentré à onze heures juste. Oppressé (malgré plusieurs Espics3 dans la journée) fumage. Tout très long pour la 1re fois seul. Couché minuit 1/4, relevé, recouché minuit 1/2 (heure de ton cabinet de toilette) poitrine gênée malgré fumage. 2 perles d’amyle. Vite endormi. Cinq heures 1/2 réveillé par oppression ou au moins avec oppression et même râles assez forts. Levé fumage énergique d’Escouflaire et de Legras4 qui m’a littéralement5

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1- Lettre publiée dans Mère (70-72) ; Kolb (II, 115-117).

2- Suzette Lemaire, fille de Madeleine.

3- Des cigarettes « Espic », considérées comme remèdes contre l’asthme.

4- Les poudres d’Escouflaire et Legras dégageaient en se consumant des fumées considérées comme remèdes contre l’asthme.

5- La fin de la lettre manque dans la première édition ainsi que dans Kolb.

à madame Adrien Proust

Mercredi matin, neuf heures et demie
 [21 octobre 1896]1

Ma chère petite Maman

 

Il pleut à verse. Je n’ai pas eu d’asthme cette nuit. Et c’est seulement tout à l’heure après avoir beaucoup éternué que j’ai dû fumer un peu. Je ne suis pas très dégagé depuis ce moment-là parce que je suis très mal couché. En effet mon bon côté est du côté du mur. Sans compter qu’à cause de nombreux ciels de lit, rideaux etc. (impossibles à enlever parce qu’ils tiennent au mur) cela, en me forçant à être toujours du côté du mur m’est très incommode, toutes les choses dont j’ai besoin mon café, ma tisane, ma bougie, ma plume, mes allumettes etc. etc. sont à ma droite c’est-à-dire qu’il me faut toujours me mettre sur mon mauvais côté, etc.