« Plusieurs autres personnes du voisinage déposent
dans le même sens. On ne cite personne comme ayant fréquenté la
maison. On ne sait pas si la dame et sa fille avaient des parents
vivants. Les volets des fenêtres de face s’ouvraient rarement. Ceux
de derrière étaient toujours fermés, excepté aux fenêtres de la
grande arrière-pièce du quatrième étage. La maison était une assez
bonne maison, pas trop vieille. « Isidore Muset, gendarme, dépose
qu’il a été mis en réquisition, vers trois heures du matin, et
qu’il a trouvé à la grande porte vingt ou trente personnes qui
s’efforçaient de pénétrer dans la maison. Il l’a forcée avec une
baïonnette et non pas avec une pince. Il n’a pas eu grand-peine à
l’ouvrir, parce qu’elle était à deux battants et n’était
verrouillée ni par en haut, ni par en bas. Les cris ont continué
jusqu’à ce que la porte fût enfoncée, puis ils ont soudainement
cessé. On eût dit les cris d’une ou de plusieurs personnes en proie
aux plus vives douleurs ; des cris très hauts, très prolongés,
– non pas des cris brefs, ni précipités. Le témoin a grimpé
l’escalier. En arrivant au premier palier, il a entendu deux voix
qui se discutaient très haut et très aigrement ; – l’une, une
voix rude, l’autre beaucoup plus aiguë, une voix très singulière.
Il a distingué quelques mots de la première, c’était celle d’un
Français. Il est certain que ce n’est pas une voix de femme. Il a
pu distinguer les mots sacré et diable. La voix aiguë était celle
d’un étranger. Il ne sait pas précisément si c’était une voix
d’homme ou de femme. Il n’a pu deviner ce qu’elle disait, mais il
présume qu’elle parlait espagnol. Ce témoin rend compte de l’état
de la chambre et des cadavres dans les mêmes termes que nous
l’avons fait hier. « Henri Duval, un voisin, et orfèvre de son
état, dépose qu’il faisait partie du groupe de ceux qui sont entrés
les premiers dans la maison. Confirme généralement le témoignage de
Muset. Aussitôt qu’ils se sont introduits dans la maison, ils ont
refermé la porte pour barrer le passage à la foule qui s’amassait
considérablement, malgré l’heure plus que matinale. La voix aiguë,
à en croire le témoin, était une voix d’Italien. À coup sûr, ce
n’était pas une voix française. Il ne sait pas au juste si c’était
une voix de femme ; cependant, cela pourrait bien être. Le
témoin n’est pas familiarisé avec la langue italienne ; il n’a
pu distinguer les paroles, mais il est convaincu d’après
l’intonation que l’individu qui parlait était un Italien. Le témoin
a connu Mme l’Espanaye et sa fille. Il a fréquemment causé avec
elles. Il est certain que la voix aiguë n’était celle d’aucune des
victimes. « Odenheimer, restaurateur.
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