La voilà la loi !… tas de brigands !
La colonne s’éloigne et disparait au tournant de la route ; Pierre, Marie et le petit Dominique, fondant en larmes, les mains jointes et toujours agenouillés au seuil de la maison :
– Hélas ! Mon Dieu ! ! nous voilà sans père ni mère !… sans personne !
* * *
Deux jours se sont écoulés depuis l’arrestation du père Poirier.
La nuit est noire ; un ouragan, mêlé de neige et de grêle, mugit au dehors et ébranle la porte de la maison de Sylvain ; la grand’chambre est faiblement éclairée par une petite lampe à bec de cuivre ; Jeanne, entourée de ses enfants, est courbée dans son lit… mourante…
Oui,… mourante. La terreur, le désespoir, les fatigues de son voyage à Orléans, entre deux gendarmes, à pied, dans la boue, par une humidité glaciale ; enfin, les rigueurs de la prison, ont porté un coup mortel à cette malheureuse femme, qui se trouvait dans un état de grossesse avancé.
Le père Poirier ne s’était pas trompé dans ses soupçons : Sylvain, averti par son fils de l’arrestation de Jeanne, avait quitté la marnière des bois de Mareuil, afin d’aller se constituer prisonnier à Orléans, et de faire ainsi mettre en liberté la mère de ses enfants. S’appuyant de chaque main sur un bâton, se traînant plutôt qu’il ne marchait, forcé de s’arrêter cent fois en chemin, tant il souffrait cruellement de sa blessure ; Sylvain, soutenu par l’héroïsme de son dévouement paternel, parvint à sortir des bois et à atteindre la grande route d’Orléans ; mais là, sa blessure se rouvrant, il perdit son sang en abondance, chancela, tomba épuisé au bord de la route et sans connaissance.
Un voiturier passait, c’était Ratapoil.
Ce garçon, beaucoup plus bête que méchant et qui n’était pas aviné ce jour-là, trouvant Sylvain évanoui au pied d’un arbre, eut pitié de ce malheureux, le secourut, le fit revenir à lui, le releva et le plaça sur sa charrette. À son grand étonnement, Sylvain le supplia de le conduire à la prison d’Orléans.
– Mais, malheureux !… – s’écria Ratapoil –, tu vas te faire prendre…
– Sois tranquille – répondit le mari de Jeanne –, je sais ce que je fais.
– À la bonne heure – dit Ratapoil.
Et il se dirigea vers Orléans.
La voiture fut rencontrée aux environs du village de St-Mesmin, par une patrouille de gendarmerie ; l’officier, à la vue d’un homme blessé, étendu dans cette charrette, la fit arrêter, afin d’interroger ce blessé qu’il soupçonnait d’avoir pris part à l’insurrection.
Sylvain fit les aveux les plus complets, demandant seulement en grâce que sa femme fut rendue à ses enfants, puisqu’il venait se livrer lui-même. L’officier crut pouvoir prendre sur lui de promettre à l’insurgé la liberté de Jeanne, s’il n’y avait contre elle aucune charge.
La charrette, escortée par les gendarmes, arriva bientôt à la prison d’Orléans, où l’on transporta Sylvain, incapable de marcher. Ratapoil croyait s’en retourner avec sa charrette ; mais, à la grande stupeur de son ardent bonapartisme, Ratapoil fut incarcéré comme complice de l’évasion d’un insurgé, et il eut beau crier : Vive l’empereur ! à plein gosier, vouloir justifier de la ferveur de ses opinions ; on lui répondit que le conseil de guerre déciderait de son sort.
Le lendemain de l’arrestation de Sylvain et selon la promesse de l’officier, Jeanne fut mise en liberté. Elle s’informa du sort réservé à son mari ; elle apprit que s’il n’était pas guillotiné comme assassin prévenu d’avoir riposté au feu de la troupe, il serait certainement transporté à la Guyane ou en Algérie…
Jeanne, grosse de sept mois,… brisée par le chagrin, par les insomnies de deux nuits de prison, passées au milieu des angoisses que lui causait la pensée de ses enfants, pour la première fois, séparés d’elle pendant si longtemps ; Jeanne était déjà cruellement frappée ;… mais, en entendant ces mots affreux : ÉCHAFAUD ou TRANSPORTATION, c’est-à-dire, la mort ou l’exil de Sylvain, Jeanne, foudroyée, tomba sans mouvement ; et, atteint du même coup, l’enfant qu’elle portait dans son sein… mourut avant de naître…
L’infortunée, revenue à elle, après d’horribles convulsions, demanda, suppliante, la faveur suprême de voir son mari ; on lui répondit que cela ne se pouvait point avant le jugement en vertu duquel Sylvain serait : guillotiné ou transporté.
Ce refus essuyé, n’espérant plus (quel espoir !…) n’espérant plus revoir son mari que la veille de sa mort, ou de son départ pour l’exil, Jeanne n’avait plus qu’un désir, qu’une consolation possibles : la présence de ses enfants. Elle quitta en hâte Orléans afin de retourner chez elle ; il lui fallait parcourir environ six lieues sous une pluie battante, mêlée de givre et de grêle, à travers une route détrempée par la neige à demi fondue.
Le jour allait bientôt finir. La vaillante mère partit,… elle partit en proie à une fièvre brûlante ; elle sentait comme on dit : que l’enfant qu’elle portait ne remuait plus. Hélas ! ces pulsations intérieures, annonçant la prochaine naissance de l’innocente créature qui aspire à la vie, ne faisaient plus, de leur doux choc, battre délicieusement le cœur de Jeanne ! Non, elles avaient cessé ! des souffrances leur succédaient,… souffrances d’abord sourdes,… puis aiguës,… puis déchirantes…
Souvent Jeanne trébucha, défaillante, sur la route, le front baigné d’une sueur froide… Alors, s’appuyant à un arbre, elle comprimait sous ses mains crispées, ses flancs maternels, palpitants d’une douleur atroce ;… puis, tombant à genoux,… elle reprenait haleine, ramassait un peu de neige dont elle étanchait sa soif dévorante, et se relevait toujours courageuse, en disant :
– L’enfant que je porte est mort ! mais, il m’en reste trois qui vivent,… je le crois du moins,… pourvu, mon Dieu ! que Dominique n’ait pas joué avec le feu, et qu’il ne lui soit point arrivé malheur !
Et elle se remettait en marche.
L’une des préoccupations constantes de cette infortunée dans sa prison, avait été cette épouvantable crainte : que son Dominique ne fût brûlé vif, en jouant avec le feu !
– Non que Marie manquât de sollicitude – pensait Jeanne –, mais, seule à la maison, elle avait à soigner le vieux grand-père et les deux enfants… Elle ne pouvait veiller à tout à la fois, et un malheur est si vite arrivé !
Ainsi, bourrelée par les angoisses ; ainsi, torturée par des souffrances de plus en plus vives, la femme de l’insurgé poursuivait son chemin. L’un de ses sabots se fend, éclate :
– Tant mieux – se dit-elle –, j’irai plus vite !
Elle jette loin d’elle l’autre sabot, et, seulement chaussée de ses bas, elle continue sa route durant plusieurs lieues dans la neige à demi fondue par une pluie glaciale.
Jeanne traversa le village de Lailly, elle n’était plus qu’à une demi-lieue de sa demeure. Quoique la nuit ne fût pas encore très-avancée, on n’apercevait dans les maisons aucune lumière ; tout était sombre, morne, silencieux ; la terreur inspirée par le passage de la colonne mobile planait encore sur ce pauvre village. En passant devant la paroisse, Jeanne songea que dans cette église elle avait épousé Sylvain,… que dans cette église ses enfants avaient été baptisés… Ce retour involontaire sur elle-même lui rappela les modestes fêtes rustiques du mariage et du baptême, les joies de la famille, qu’elle égayait par son riant naturel… Elle était si gaie, Jeanne, en ces temps-là !… Oui,… et maintenant pour le père, pour l’époux, c’était l’exil ou l’échafaud !…
Pour la femme et pour les enfants,… c’était la misère,… c’était l’abandon,… c’étaient les souvenirs désespérés ou les rêves sanglants !
Sylvain devait être à jamais enchaîné à la terre d’exil,… là-bas,… là-bas,… au delà de l’immensité des mers,… en ces pays mortels d’où l’on ne revient plus ;… ou bien,… sa tête roulerait dans le panier rouge de la guillotine…
Et pourtant Sylvain avait été honnête homme jusqu’à la fin… Jeanne, sans se mêler de politique, sentait bien qu’aimant père, femme et enfants, comme il les aimait, c’était autant par devoir que par affection pour sa famille que son mari avait pris les armes. – La République est l’héritage de nos enfants ! – disait Sylvain –, et Jeanne comprenait la portée de ces paroles.
Mais, en pensant à la ruine de tant d’espérances,… à ce contraste horrible du présent et du passé, rappelé à son souvenir par la vue de l’église, le cœur de Jeanne se brisa ; elle fondit en sanglots ; elle n’avait pas pleuré depuis son départ d’Orléans. Ces larmes d’abord la soulagèrent ; mais, bientôt ses souffrances physiques devinrent plus poignantes encore,… devinrent si poignantes, si intolérables, qu’au milieu de cette nuit et de ce silence, Jeanne cria de douleur ; elle cria !… elle, si résignée ! elle, si vaillante ! et un moment elle crut qu’elle allait mourir…
Mourir… Non, pas encore ! une mère comme elle ne veut pas se résigner à la mort avant d’avoir revu ses enfants, et tant qu’il lui reste un souffle de vie,… tant que les déchirements de son âme et de son corps lui prouvent qu’elle existe,… elle va… là où ces enfants l’appellent ! Elle va,… comme elle peut, la pauvre mère,… incapable de marcher… Elle se traîne,… elle rampe sur les genoux, sur les mains,… mais elle va !…
Cependant, malgré son courage, Jeanne, après ce cri de douleur atroce arraché de ses entrailles, se sentit anéantie, incapable de faire un pas de plus ; elle tomba sur ses genoux, et elle n’était qu’à une demi-lieue de sa demeure.
– Je ne veux pas mourir ici – se dit Jeanne, en se relevant à grand-peine –. Non, je ne resterai pas en route,… je reverrai mes enfants !
Elle se souvint alors de la marraine de Dominique, bonne et digne femme, boulangère de son état, et dont la maison se trouvait sur la place de l’église.
– Je vais aller chez Madeleine – pensait Jeanne –, je m’y réchaufferai, je m’y reposerai pendant un quart d’heure, je reprendrai des forces, et je pourrai ensuite arriver jusque chez nous…
Elle parvint à se traîner jusqu’à la porte de Madeleine ; aucune lumière ne brillait au dehors du logis.
– Ils sont couchés se dit Jeanne – ; frappons toujours.
Elle frappa.
– Qui est-là ?
– Moi,… Jeanne ;… je suis bien fatiguée. Ouvre-moi, Madeleine ; je n’en puis plus…
– Va-t-en !… n’approche pas de la maison, tu nous ferais arriver malheur à tous ! !
– Madeleine, laisse-moi, pour l’amour de Dieu, seulement me réchauffer, me reposer un instant chez toi…
– Veux-tu t’en aller, mon Dieu ! veux-tu t’en aller ! Les gendarmes n’ont qu’à passer et te voir à notre porte,… nous serions perdus…
– Madeleine, aie pitié de moi ! Je te demande un quart d’heure de repos,… rien qu’un quart d’heure…
– Va-t-en ! tu serais ma sœur,… que tu n’entrerais pas chez nous ! Va-t-en !…
La douleur physique et morale, arrivée à sa dernière exaltation, offre parfois des phénomènes étranges, effrayants.
À la guerre, on a vu des hommes mortellement blessés, se relever soudain et combattre avec acharnement, redoublant d’énergie, de furie, à chaque blessure nouvelle ; répondre à chaque coup par un élan désespéré ; puiser, enfin, une force surhumaine dans la rage de leur agonie, et expirer après une lutte prolongée presqu’au delà des limites du possible.
On a vu, à la chasse, des bêtes fauves mortellement atteintes, perdant leur sang, parcourir avec une rapidité vertigineuse de grands espaces, afin de regagner le repaire où gîtaient leurs petits.
Mais, qu’est-ce que le courage du soldat ? Mais, qu’est-ce que l’instinct de la bête fauve, auprès du courage et de la tendresse de la mère ?
Jeanne, repoussée de l’asile momentané qu’elle implorait, éprouva une sorte de commotion électrique… Elle se redressa brusquement ; et cette femme, naguère anéantie par la fatigue, par la souffrance, et hors d’état de marcher ; cette femme trouva soudain la force de courir vers sa maison, où l’appelaient ses enfants ;… course fébrile, haletante, furieuse, folle,… pendant laquelle Jeanne retint, pour ainsi dire, sa vie prête à lui échapper ; elle courut donc d’un trait jusqu’à sa maison. À la porte, elle frappa, elle se nomma ; Marie vint ouvrir. Jeanne se précipita dans la chambre, en criant :
– Mes enfants !
Et puis, elle tomba.
Elle n’aurait pu faire deux pas de plus.
Les enfants de Jeanne la mirent au lit ; des secours, on ne pouvait ni en demander, ni en attendre, durant ces jours de trouble et de guerre civile ; la maison se trouvait, d’ailleurs, très-éloignée du village. Enfin, l’accueil inhospitalier de Madeleine montrait assez qu’il régnait une telle épouvante dans le pays, que personne, ni homme, ni femme, n’aurait osé mettre les pieds dans la maison de Sylvain, après l’arrestation de sa femme, de Petit-Jean et du père Poirier.
Jeanne, à peine arrivée chez elle, accoucha d’un enfant mort. Cet avortement, ses causes et ses effets eurent des suites funestes. Épuisée par le sang qu’elle perdait, incapable de quitter son lit, la malheureuse mère dut, de ses mains, pieusement ensevelir dans l’un des langes préparés pour elle avec tant d’amour,… ensevelir cette innocente créature, morte avant de naître. La malheureuse mère dut encore, faute de prêtres, de cimetière et de fossoyeur, prier Marie d’aller enterrer l’enfant, en un coin du jardin, dans une petite fosse creusée par Pierre…
Oh ! ce fut quelque chose d’affreux pour Jeanne, pour son fils, pour sa fille, que cet ensevelissement, que cet enterrement nocturnes dans ce lieu désert… Oui, ce fut affreux !
Et vous, Madame, qui peut-être lisez ce livre, au milieu de vos enfants bien aimés, qu’un époux, cher à votre cœur, contemple avec joie et tendresse, songez hélas ! songez que ce n’est pas seulement une famille, mais des milliers de familles d’insurgés, qui, dans notre pays de France, ont souffert et souffrent des malheurs irréparables !
Jeanne, depuis le moment où elle a donné le jour à un enfant mort, est donc alitée…
La nuit est venue…
Au dehors de la maison, mugit l’ouragan chargé de neige et de grêle ; au dedans, la petite lampe de cuivre, prête à s’éteindre, éclaire faiblement cette grande chambre ; le foyer est froid et noir.
Jeanne, couchée dans son lit, a fait transporter près d’elle le berceau du petit Dominique. Il dort ; son sommeil est souriant.
Pierre et Marie, sur pied depuis deux jours, se sont tellement empressés autour de leur mère, pour lui donner leurs soins ; ils ont tant pleuré, tant pleuré, qu’épuisés par les larmes, que brisés par une fatigue et des émotions au-dessus de leur âge, ils ne peuvent plus se tenir debout ; malgré la douleur, malgré les craintes que leur cause la maladie de leur mère, maladie qu’ils ne croient cependant pas mortelle, ils ont peu à peu, involontairement, cédé au besoin d’un sommeil réparateur, besoin impérieux, irrésistible à cet âge.
Pierre, assis à l’extrémité du lit, s’est profondément endormi ; Marie a placé un escabeau près du chevet de sa mère, et, cédant aussi à un invincible besoin de sommeil, elle appuie son front au traversin où repose la tête de Jeanne, de Jeanne agonisante. Son beau visage, à cette heure, d’une blancheur de cire, commence à se marbrer de taches livides ; ses lèvres, d’où s’échappe, à de longues intermittences, un souffle brusque, haletant, ses lèvres deviennent violettes et froides ; ses yeux demi-clos sont fixes et vitreux ; soudain elle les ouvre de toute leur grandeur ;… ses traits se contractent ;… ils prennent une effrayante expression de haine… Elle lève à demi sa main droite qu’elle tâche de fermer, comme si elle voulait montrer le poing à une vision qui surgit au milieu du délire de son agonie ; ses dents se serrent ;… puis, elle balbutie d’une voix éteinte :
– Scélérat !… Oh ! cet homme,… si… je… pouvais,… mon Dieu ! Oh !… cet homme,… je…
Elle n’achève pas,… un râle sourd et rauque soulève une dernière fois sa poitrine : l’heure suprême a sonné !
Jeanne sent la mort venir, et s’écrie expirante :
– Mon pauvre Sylvain !… mes enfants ! !…
Pierre, plongé dans un sommeil profond, ne peut répondre à ce faible et dernier appel de sa mère mourante… Marie, placée plus près de Jeanne, a entendu sa voix, s’éveille à demi, fait un léger mouvement pour relever sa tête appesantie, et murmure machinalement :
– Oui,… maman…
Puis, elle se rendort…
Jeanne agite imperceptiblement ses lèvres ; sa tête s’incline lentement sur son épaule,… du côté de la muraille. Jeanne meurt…
Jeanne est morte !…
Bientôt la flamme de la petite lampe depuis longtemps vacillante s’éteint ;… le feu du foyer aussi est éteint ; les ténèbres envahissent celle chambre mortuaire ; et, lorsqu’au dehors l’ouragan cesse par instant de mugir et d’ébranler la porte, on peut entendre, au milieu du silence de la nuit, la respiration douce et paisible des trois enfants endormis auprès du cadavre de leur mère…
* * *
L’extrême fin de ce récit se lie à l’épisode suivant : LOUISE, ou la Famille du bourgeois transporté.
LOUISE
Edmond Morand, citoyen de la ville d’Orléans, fut condamné comme Sylvain Poirier, et pour le même CRIME, à la transportation en Afrique. Les deux jugements furent rendus le même jour.
Edmond Morand remplissait depuis douze ans les fonctions de caissier dans l’une des plus considérables maisons de commerce d’Orléans ; il ne possédait pas d’autres ressources que sa place de comptable ; il la remplissait avec autant de zèle que d’intelligence et de probité ; il avait mérité l’estime et l’affection de tous ceux qui le connaissaient. Durant son exil, sa femme lui écrivit souvent ; voici quelques-unes de ces lettres. Elles feront apprécier l’homme et sa famille.
À Monsieur Edmond Morand, condamné politique, à Brest ; poste restante
Décembre, 1851
Mes lettres, m’as-tu dit en nous quittant, mon ami : seront ouvertes avant que de t’être remises, selon la coutume adoptée envers les prisonniers. Je n’ai à cacher nulle de mes pensées ; cependant, la mesure dont tu m’as prévenue m’impose, au sujet de certaines circonstances, une extrême réserve ; tu la comprendras, de même que je comprendrai la tienne, puisque tes lettres aussi, ne me parviendront qu’après avoir été lues par une personne étrangère ; à moins qu’il en soit autrement, grâce à une occasion extraordinaire sur laquelle nous devons peu compter.
À ton arrivée à Brest, où tu dois être embarqué pour l’Algérie, tu trouveras cette lettre.
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