Dès lors, quelle importance que je doive y avoir part ou non ? Une importance nulle.

Ceux qui désirent leur salut ne croient pas vraiment à la réalité de la joie en Dieu.

La croyance à l’immortalité est nuisible parce qu’il n’est pas en notre pouvoir de nous représenter l’âme comme vraiment incorporelle. Ainsi cette croyance est en fait croyance au prolongement de la vie, et elle ôte l’usage de la mort.

Présence de Dieu. Cela doit s’entendre de deux façons. Pour autant qu’il est créateur, Dieu est présent en toute chose qui existe, dès lors qu’elle existe. La présence pour laquelle Dieu a besoin de la coopération de la créature, c’est la présence de Dieu, non pas pour autant qu’il est le Créateur, mais pour autant qu’il est l’Esprit. La première présence est la présence de création. La seconde est la présence de décréation. (Celui qui nous a créés sans nous ne nous sauvera pas sans nous. Saint Augustin.)

Dieu n’a pu créer qu’en se cachant. Autrement il n’y aurait que lui.

La sainteté doit donc aussi être cachée, même à la conscience dans une certaine mesure. Et elle doit l’être dans le monde.

Être et avoir

L’homme n’a pas d’être, il n’a que de l’avoir. L’être de l’homme est situé derrière le rideau, du côté du surnaturel. Ce qu’il, peut connaître de lui-même c’est seulement ce qui lui est prêté par les circonstances ». Je est caché pour moi (et pour autrui) ; il est du côté de Dieu, il est en Dieu, il est Dieu. Être orgueilleux, c’est oublier qu’on est Dieu… Le rideau, c’est la misère humaine : il y avait un rideau même pour le Christ.

Job. Satan à Dieu : T’aime-t-il gratuitement ?

Il s’agit du niveau de l’amour. L’amour est-il situé au niveau des brebis, des champs de blé, des nombreux enfants ? Ou plus loin, dans la troisième dimension, derrière ? Si profond que soit cet amour, il y a un moment de rupture où il succombe, et c’est le moment qui transforme, qui arrache du fini vers l’infini, qui rend transcendant dans l’âme l’amour de l’âme pour Dieu. C’est la mort de l’âme. Malheur à celui pour qui la mort du corps précède celle de l’âme ! L’âme qui n’est pas pleine d’amour meurt d’une mauvaise mort. Pourquoi faut-il qu’une telle mort tombe indistinctement ? Il le faut bien. Il faut que tout tombe indistinctement.

L’apparence colle à l’être et seule la douleur peut les arracher l’un de l’autre.

Quiconque a l’être ne peut avoir l’apparence. L’apparence enchaîne l’être.

Le cours du temps arrache le paraître de l’être et l’être du paraître, par violence. Le temps manifeste qu’il n’est pas l’éternité.

Il faut se déraciner. Couper l’arbre et en faire une croix, et ensuite la porter tous les jours.

Il ne faut pas être moi, mais il faut encore moins être nous.

La cité donne le sentiment d’être chez soi.

Prendre le sentiment d’être chez soi dans l’exil.

Être enraciné dans l’absence de lieu.

Se déraciner socialement et végétativement.

S’exiler de toute patrie terrestre.

Faire tout cela à autrui, du dehors, est de l’ersatz de décréation. C’est produire de l’irréel.

Mais en se déracinant on cherche plus de réel.

EFFACEMENT

Dieu m’a donné l’être pour que je le lui rende. C’est comme une de ces épreuves qui ressemblent à des pièces et qu’on voit dans les contes et les histoires d’initiation. Si j’accepte ce don, il est mauvais et fatal ; sa vertu apparaît par le refus. Dieu me permet d’exister en dehors de lui. À moi de refuser cette autorisation.

L’humilité, c’est le refus d’exister en dehors de Dieu. Reine des vertus.

Le moi, ce n’est que l’ombre projetée par le péché et l’erreur qui arrêtent la lumière de Dieu, et que je prends pour un être.

Même si on pouvait être comme Dieu, il vaudrait mieux être de la boue qui obéit à Dieu.

Ce que le crayon est pour moi quand, les yeux fermés, je palpe la table avec la pointe – être cela pour le Christ.