Un cheval ayant mangé les boucles d’oreilles d’une de mes belles amies est mort empoisonné, le carmin de son museau et la fuchsine du jus de la treille composant un poison mortel.
LES RONGEURS D’ARBRES
Isolé, ou emprisonné, ou travaillant, Alexandre Dumas père se consolait avec l’odeur d’un vêtement de femme. Trois hommes pareils, même chapeau rond, même petite taille, se rencontrèrent étonnés d’être si pareils et se devinèrent une pareille idée : voler la consolation de l’isolé.
LE COQ ET LA PERLE
Je le croyais ruiné, mais il a encore des esclaves et plusieurs pièces à sa maison. Sur les rochers, les cantatrices étaient à demi nues dans leurs maillots. Le soir, on entrait dans les wagons et les petits trains glissaient sous les pins. Je le croyais ruiné !… il a même trouvé un éditeur pour moi ! l’éditeur m’a donné une tortue dont la coquille est rose et vernie : le moindre ducaton ferait bien mieux mon affaire.
Tu sors ? tu vas faire remarquer ta maladie : les lanternes à roulettes te regardent et le zèbre à bascule achève de t’étourdir.
Je me déclare mondial, ovipare, girafe, altéré, sino-phobe et hémisphérique. Je m’abreuve aux sources de l’atmosphère qui rit concentriquement et pète de mon incertitude.
Et quand, du lancier polonais, les membres découpés, la bouteille brisée, il ne resta plus qu’un œil, l’œil chanta les Deux Grenadiers.
Que te manque-t-il, ô crâne, pour avoir l’air d’un cul de poulet ? la baudruche ? et pour avoir l’air d’une autruche ? la chair de poule.
En bonnet de folie, le rémouleur (c’est la mort) écarte un mantelet doublé de soie cerise pour repasser un grand sabre. Un papillon sur la roue l’arrête.
Ses bras blancs devinrent tout mon horizon.
Un incendie est une rose sur la queue ouverte d’un paon.
Le jeu des dominos sur le tapis évoquait la Mort et le tablier blanc de la bonne n’était pas pour éloigner cette idée.
J’ai rêvé que les nonnes ont établi des parterres dans le Sacré-Cœur, parce que Dieu aime la terre et les ont semés de confetti, parce qu’il aime la joie.
Portrait de grand-père par un enfant de cinq ans : une tête de bœuf qui fume la pipe. La famille est ravie ; grand-père est vexé.
Il était deux heures du matin : elles étaient élégantes les trois vieilles, comme on l’eût été il y a cinquante ans ; châles de dentelles noires, bonnets à brides, camées, robes de soie noire marquant les plis de l’étoffe fabriquée. Le trottoir était désert et leurs yeux gros de larmes se levaient vers une fenêtre dont le rideau était faiblement éclairé.
Si tu mets ton oreille au tic tac de ton oreille, tu entendras bien en toi quelque chose qui n’est pas toi-même et qui est un ou le démon.
Quand on fait un tableau, à chaque touche, il change tout entier, il tourne comme un cylindre et c’est presque interminable. Quand il cesse de tourner, c’est qu’il est fini. Mon dernier représentait une tour de Babel en chandelles allumées.
En Belgique, dans les bureaux de tabac, les pipes en terre sont enfilées par centaines sur des montures en éventail qui vont jusqu’au plafond. Un enfant belge m’a dit que les ailes du diable sont ainsi.
Augustine était fille de ferme quand le Président la remarqua. Pour éviter le scandale, il lui décerna des titres et des brevets d’institutrice, puis un « de » vers son nom, quelque argent, et plus il la pourvoyait, plus elle était digne de lui. Je me suis tout donné à moi-même, pauvre paysan breton, le titre de duc, le droit de porter un monocle, j’ai pu grandir ma taille, ma pensée et je ne pourrai pas être digne de moi-même.
De gros fruits sur un arbre nain, bien trop gros pour lui. Un palais sur le rocher d’une île trop petite. Un art dans une nation bien trop pur pour elle.
Un cheval s’est échappé des écuries de l’institut. Le poulain est en arrêt près du Pont. Napoléon Ier court après. Le valet de chambre, un maréchal, s’il vous plaît, rattrape l’Empereur qui a oublié son petit manteau et sa bouteille de Rome ou de rhum.
Un ours qui dansait quitta la place du village et alla pisser contre un mur.
Il arrive quand tu ronfles que le monde matériel éveille l’autre.
En descendant la rue de Rennes, je mordais dans mon pain avec tant d’émotion qu’il me sembla que c’était mon cœur que je déchirais.
Un buisson d’épines bleu pâle, c’est un clocher dans le clair de lune.
Dans les Cordillères des Andes, sur le houblon, poussent les raisins, on ne les voit pas.
Les chaînes éclairent, mais les hosties qui sont des pommes n’éclairent pas : c’est un lustre.
Il n’y a plus rien que le sommet des arbres, il n’y a plus rien que l’arête d’un toit de maison, il n’y a plus rien qu’une fesse malade, plaidant le faux pour savoir le vrai et qui a raison.
Pour montrer l’importance du service de bouche chez les Rothschild, un magazine a représenté cette famille en peut au bas d’une pile énorme d’assiettes. Un lecteur examine les fourmis avec une loupe :
« Lequel est Henri ? lequel est Henri ? »
Lors d’un voyage en Algérie avec son Égérie, l’impératrice, l’empereur Napoléon III dut se sauver en grand costume à travers les palétuviers. Ce qui augmentait le marasme, c’est que l’empereur avait des bottes qui lui faisaient mal.
L’enfant, l’éfant, l’éléphant, la grenouille et la pomme sautée.
Le périscope de Mentana est une grotte souterraine : l’encadrement de roches, un rectangle élégant. Le lac est en encre de Chine et tient dans le cadre ; deux séraphins, noirs de faces, se cognent la tête à droite et à gauche obliquement ; en bordure, au pied de la colonne rocheuse, et sur le gradin, un bureaucrate en jaquette moins grand que nature gratte son crâne chauve. Cela sent un peu la vitrine, c’est le périscope de Mentana.
L’oiseau gaucher et bossu nommé Morgue ne fait son nid qu’avec des épis de blé et l’orne avec des capucines par préciput et hors texte.
Alléluia
Sous les thuyas
le prince de Lusignan
de sa maîtresse était l’amant
Cela sentait la naphtaline
on n’avait pas quitté le port
et cela sentait encor.
Pour rouler sur l’azur la tête en bas, ils y ont des fauteuils à roulettes mécaniques.
La dentelle sur la poitrine de N.-S. un moineau en emporte les fils.
On fait les foins au pavillon d’Armenonville.
Dans cette forêt bretonne où la calèche s’avance, il n’y a qu’un ange moqueur : la paysanne en rouge dans les branches qui rit de mon ignorance de la langue celtique.
Pour se venger de l’écrivain qui leur a donné la vie, les héros qu’il a créés lui cachent son porte-plume.
Autour de la baie, au nord, au sud, habitent derrière chaque rocher un frère ou une sœur de Napoléon.
L’horizon bout. Soleil ! prends tous ces hamacs roses et blancs ! Tu n’auras pas le mien, il est d’ambre, et il est brodé de jais de ce côté-ci, du moins.
Titre : DESCRIPTION D’UNE AVENUE.
La vis, ce qui rampe autour de la spirale ; ce qui s’exprime à la pointe : le vice !
Les rochers blancs en tas et l’alpiniste de ces nuages, l’aérostat.
L’archange foudroyé n’eut que le temps de desserrer sa cravate, on aurait dit qu’il priait encore.
Brouillard, étoile d’araignée.
L’aube, à l’horizon, est un miroir d’étain qui projette un reflet sur une maison.
C’était un costume de Pierrot en percale, à culotte trop courte même pour le genou et que je louai, le disputant à un certain sergent. J’y ai trouvé des lettres ! oui ! des lettres que je publierai quand la boutique sera détruite ou le sergent mort.
Jouez à la paume, marches de l’escalier. La boule reste trop longtemps en l’air à vibrer et retombe sur le ventre mouvant de l’escalier ou de l’accordéon.

Les pavés en mosaïque simulent le relief pour me faire perdre toute stabilité. O méchanceté des architectes !
Au pied du lit, l’armoire à glace, c’est la guillotine, on y voit nos deux têtes pécheresses.
Sur la Seine, les trombes d’eau montaient aussi haut que les tours : je suis perdu dans le labyrinthe d’une écluse et d’un pont.
Tu te trompes, mon bon ange, pourquoi ces paroles de consolation : je pleurais de joie.
Il éclabousse, le jet de la bouteille d’encre ! ce n’est pas une grenouille, mais un petit chef d’orchestre qui indique la rampe et le bas d’une robe blanche.
Croient-ils donc qu’on ait des truffes dans le cœur ?
Sautez à la corde en descendant l’escalier, vos pieds ne le toucheront pas.
Décollement de principes : le prolétaire est circonspect.
Tant de gens qui m’aiment m’attendent sur le pont du bateau, mais comment y grimper ?
Mur de briques, bibliothèque !
Entre les rideaux, le linteau est une glissière pour la fumée ! non ! pour les anges bleus qui dansent.
L’artillerie du Sacré-Cœur ou la canonisation de Paris.
Les alvéoles de l’interminable rideau de tulle, c’est comme j’imagine les maisons de New York.
Le soleil est en dentelles.
Un coin de doublure bleu pâle, un coin de fourrure comme un pan de ciel sur un coin du pôle.
Il y a tant de corail enchevêtré que l’eau ne peut être loin : ce sont les cheveux et l’eau, c’est cette topaze à l’oreille.
Le zouave qui avait connu le siècle me parlait ainsi avec l’inflexion du regret : « En Algérie, nous nous promenions en voiture et nous regardions nos moustaches dans des glaces de poche, mais si nous sortions du papier à cigarettes, il arrivait qu’il fût taché de sang. »
La flamme de sa main veut rejoindre son profil. Son corps est un dossier de chaise ; ses genoux sont les pieds de son maigre trône. Son sceptre que heurte de sa flûte immobile un autre arlequin en dansant s’appuie à l’épaule négligemment.
Comme un bateau est le poète âgé
ainsi qu’un dahlia, le poème étagé
Dahlia ! Dahlia ! que Dalila lia
Le monde a comme épine dorsale un crocodile, son bandeau royal est une ligne de chemin de fer.
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