Pierre de Lavau. – Jean Cochin, etc., etc. » (Chroniques ecclésiastiques de THÉODORE DE BÈZE, Vol. I, p. 173.)

Or, nous vous le répétons, cette énumération nominale des victimes remplit près de cent cinquante pages… Jugez du nombre des suppliciés ! ! !

Nous venons de vous citer, chers lecteurs, des écrivains protestants, et malgré le caractère d’irrécusable autorité de leurs récits, vous pourriez les soupçonner d’exagération ou de partialité ? Citons maintenant un écrivain catholique : le maréchal Blaise de Montluc, envoyé en Guyenne, afin d’y exterminer l’hérésie et de combattre les huguenots forcés de prendre les armes pour défendre leur religion, leur foyer, leurs biens, leur famille, leur vie ; nous lisons dans les MÉMOIRES DE MONTLUC (Collection de Petitot, un vol. gr. in-8°.) :

« – Et me délibérai (dit le maréchal) d’user de toutes les cruautés que je pourrais envers ces méchantes gens ; je recouvrai secrètement deux bourreaux, lesquels on appela depuis mes laquais, pour ce qu’ils étaient souvent avec moi. » (P. 216.)

Un habitant de Lectoure, nommé Verdier, avait tenu des propos malsonnants pour la royauté, en présence de ses amis et d’un diacre réformé ; le maréchal de Montluc les fait saisir tous trois, on les lui amène :

« – J’avais (dit Montluc) les deux bourreaux derrière moi, bien équipés de leurs armes, et surtout d’un coutelas bien tranchant ; de rage, je sautai au cou de ce Verdier, et lui dis : Ô méchant paillard, as-tu bien osé souiller ta méchante langue contre la majesté de ton roi ? – Ah ! monsieur, – me répondit-il, – à tout pécheur miséricorde. – Alors la rage me prit plus que devant, et lui dis : – Misérable, veux-tu que j’aie miséricorde de toi, et tu n’as pas respecté le roi. – Et le poussant rudement à terre, je dis au bourreau : Frappe, vilain ! – Ma parole et son coup furent aussi tôt l’un que l’autre… Je fis pendre les deux autres à un orme voisin ; quant au diacre, pour ce qu’il n’avait que dix-huit ans, je ne le voulus faire mourir, afin qu’il portât la nouvelle de l’exécution aux siens ; mais bien lui fis-je bailler tant de coups qu’il en est mort huit ou dix jours après… Et voilà la première exécution que je fis en ce pays-là, sans sentence, ni écriture, car en ces choses, j’ai ouï dire qu’il FAUT COMMENCER PAR L’EXÉCUTION. » (P. 216-217.)

»…… M. de Sanctorens m’amena, le mardi, le capitaine Morallet avec six autres huguenots, que des gentilshommes avaient pris ; je les fis pendre tous les sept sans tant languir, ce qui jeta parmi les autres une grande frayeur, et ils se disaient : Comment ! il nous fait mourir sans aucun procès. » (P. 218.)

En effet, vous le voyez, chers lecteurs, il est impossible d’expédier plus lestement les gens. Le maréchal de Montluc, en sa qualité d’homme de guerre, regardait la procédure comme une déplaisante superfluité. – Frappe, vilain, disait-il à son bourreau : l’homme tombait… C’était bref, net et concluant.

« …… Après avoir en un jour pendu ou mis sur la roue trente à quarante de ces huguenots, – dit plus loin M. de Montluc, – nous allâmes à Cahors, où les juges réformés faisaient le procès à un catholique, M. de Viole. » (Ce catholique avait commis un méfait, on le détenait en prison, afin d’instruire régulièrement son procès. Montluc arrive, se présente au tribunal, et, s’adressant aux juges, il leur défend en ces termes de continuer le procès :)

« Le premier qui ouvre la bouche, je le tue, s’il ne me rend raison de ce que je viens demander. – L’un des juges voulant repartir : – Tu déclareras devant moi ce que je demande (l’innocence de l’accusé), ou je te pendrai de mes mains, car j’en ai pendu une vingtaine de plus gens de bien que toi. – Sur quoi, je tirai à demi mon épée. Je les eusse bien empêché de rendre sentence, ni arrêt, s’ils m’eussent osé désobéir. » (P. 220-221.)

Il va de soi que l’accusé catholique fut mis en liberté. Voici maintenant quelques faits et gestes de guerre de M. de Montluc. Il avait battu une compagnie de huguenots. Nous citons :

« …… Ces gens se jetaient dans les taillis et dans les fossés, le ventre à terre ; mes bandouillers les cherchaient par le bois et les tiraient comme quand on tire au gibier ; nous étions si peu, que nous ne pouvions tuer tout, car de prisonniers on n’en parlait pas en ce temps-là. (P. 232.) Nous logeâmes une nuit à Sauveterre, où je pris quinze ou seize huguenots, lesquels je fis tous pendre, sans dépenser papier ni encre, et sans LES VOULOIR ÉCOUTER, CAR CES GENS-LÀ PARLENT D’OR. » (P. 233.)

Montluc assiège la place forte de Montségur. Les huguenots résistent ; puis, écrasés par le nombre, ils tâchent de fuir. Nous citons toujours :

« …… Alors, je pris quatre-vingts ou cent soldats, et m’en allai autour des murailles ; autant sautait par dessus, cela était tué. La tuerie dura jusques à dix heures ou plus, parce que on cherchait les huguenots dans les maisons où on les tuait ; on n’en fit prisonniers que quinze à vingt, lesquels je fis pendre, et entre autres, tous les consuls de la ville, avec leur chaperon sur le cou. Le capitaine qui commandait là se nommait le capitaine Héraud, brave soldat s’il y en avait en Guyenne ; il avait été de ma compagnie ; beaucoup des miens le voulaient sauver pour sa vaillance ; mais je dis que, s’il réchappait, il nous ferait tête à chaque village, et que je connaissais bien sa valeur… Voilà pourquoi je le fis pendre. Il pensait toujours être sauvé, pour ce qu’il était vaillant ; mais cela le fit plutôt mourir… » (P. 257-238.)

Et plus loin, nous lisons encore :

« …… J’envoyai ma compagnie à Terraube, pour faire tuer tous ceux qui étaient là, et lui baillai le bourreau pour faire pendre le chef de ces huguenots, et après qu’ils furent tous tués (au nombre de deux cent trente), on les jeta dans un puits fort profond, et il s’en remplit tout, de sorte qu’on les pouvait toucher avec la main, CE FUT UNE TRÈS-BELLE TUERIE DE TRÈS-MAUVAIS GARÇONS. Mes soldats m’amenèrent les deux Begotte et deux autres de bonne maison, lesquels je fis pendre à un noyer à la vue de la ville, et sans l’honneur que je portais à la mémoire de feu M. Daussun, ses neveux, que l’on m’a amenés aussi, eussent été pendus comme les autres ; ils en furent à deux doigts près, car j’ordonnai de les dépêcher ; mais je ne sais comment je changeai d’avis. » (P.